Drogue (II) : empoisonneurs et « bienfaiteurs »

Un contingent de policiers en intervention © Pixabay

156 plans stups à Marseille dont 116 dans les quartiers nord, 220 points de vente dans les Bouches-du-Rhône, 1500 à 2000 clients par jour à La Castellane, aux Oliviers et à Campagne Levêque, 60 à 80 000 euros quotidiens de chiffre d’affaires par réseau, des files d’attente ininterrompues de toxicomanes comme au premier jour des soldes dans un supermarché : face à cette pieuvre tentaculaire qui attire des centaines de jeunes oisifs en quête d’un job lucratif, face aux francs-tireurs des « Ubershit and Coke » qui livrent eux-mêmes la drogue à domicile, les policiers sont évidemment impuissants.

A lire aussi, la partie I du dossier: Drogue: une tolérance stupéfiante https://lemeridional.com/index.php/2021/04/01/drogue-i-une-tolerance-stupefiante/

Les bénéficiaires de ces cadeaux ne parlent plus de « trafiquants » mais de « bienfaiteurs ». Mais oui. Les empoisonneurs qui dézinguent le cerveau d’une bonne partie de notre jeunesse au cannabis et à la cocaïne sont surtout perçus comme des « bienfaiteurs » qui surfent sur la misère sociale. Ils nourrissent ou aident des familles dans le besoin et arrosent copieusement les centres sociaux, les mosquées, les clubs de foot, les stades et… certains partis tacitement complices de leurs agissements.

D’où l’omerta et la loi du silence qui régissent ces cités de la drogue : on ne dénonce pas un homme qui vous fait du bien, même s’il agit mal. Dès lors, tous les dés sont pipés et le jeu social faussé de A à Z. Tout se passe en réalité comme si les autorités s’accommodaient du trafic pour acheter la paix sociale en faisant semblant de le combattre pour être en accord avec la loi pénale. Ce laxisme qui ne dit pas son nom est si ancré dans nos mœurs que la « nouvelle économie » a désormais pris le pas sur l’économie réelle.

Certains élus ne sont pas dupes de cette emprise de la drogue, mais ils préfèrent fermer les yeux car ils n’ont aucune solution sociale à substituer aux largesses tous azimuts des trafiquants. Certains clament avec véhémence leur souhait de voir intervenir l’armée pour « libérer » les cités et permettre enfin aux nombreux habitants otages de ces trafics de vivre en toute sécurité. Ils savent pertinemment que c’est impossible et que seules la police, la douane et la gendarmerie sont habilitées à réprimer la délinquance mais ils font du racolage électoral… La frime se superpose alors à l’impuissance organisée.

 » Bref, ajoute le policier goguenard, on nous demande de faire les guignols, mais pas trop quand même, pour éviter les chantages à l’émeute et les délits de faciès. » Les chiffres, les vrais, ne font que corroborer ce tragique constat d’impuissance : les policiers et les douaniers sont délibérément muselés et bridés dans leur action. La preuve, c’est qu’on perd chaque année 600 policiers environ depuis 1981. On enregistre en effet chaque année 1000 départs pour 400 embauches seulement. Les deux tiers des écoles de police ont été fermées alors qu’elles formaient 800 à 1500 élèves deux fois par an. Les gendarmes ne sont guère mieux lotis et certaines brigades n’ont même plus d’essence pour effectuer leurs patrouilles !

Une saisie d’armes © Claude Nucera

Seul compte l’affichage et le vernis médiatique. Par exemple, lorsqu’un attentat islamiste bouleverse l’opinion, on mobilise 30 000 réservistes retraités de la police pour « mettre du bleu » aux postes frontières. « Notre mission à Menton, c’était du vent, raconte un réserviste, on nous demande d’interpeller les immigrés clandestins venant d’Italie dans une zone de vingt kilomètres autour de la frontière. Moi j’ai arrêté trois fois le même clando dans la même journée au poste Saint-Louis et on le compte pour trois migrants appréhendés dans les statistiques…  » On fait du chiffre pour faire du chiffre.

Ce ping-pong franco-italien prêterait à sourire s’il ne traduisait, là aussi, une claire volonté politique de favoriser l’immigration clandestine en feignant de la combattre. Les zones frontalières prétendument surveillées par Frontex sont de véritables passoires. Et les policiers ne sont pas vraiment bien formés pour s’opposer à ces vagues continues encouragées par des associations de gauchistes pro-migrants. Ils doivent normalement tirer 90 cartouches par an et on leur demande d’être performants en cas d’attaque terroriste : c’est impossible. Ceux qui tirent dans le mille, ce sont les amateurs de tir sportif qui tirent 1000 cartouches chaque dimanche par plaisir !

« Ce sont les gardiens de la paix qui avec un bagage minimum doivent faire un maximum », s’indigne un ancien major. La hiérarchie policière, qui tient à conserver ses primes de fin d’année, se garde bien de faire des vagues et avalise ce système inique de pseudo répression. La seule façon de stériliser vraiment le trafic de drogue, c’est de tarir la demande en contrôlant systématiquement les toxicomanes qui font la queue dans les cités.

L’amende forfaitaire de 200 euros pour usage de stupéfiants, ils s’en moquent comme de leur première chemise. Il faudrait leur infliger des peines de prison dites de « sevrage sanitaire« . Et les files d’attente, j’en suis sûr, se réduiraient comme neige au soleil.

Omerta et menaces

La seconde mesure radicale consisterait à doubler, voire tripler, les peines de prison infligées aux trafiquants. Si vous les condamnez à vingt ou trente ans de réclusion criminelle, vous verrez qu’ils réfléchiront à deux fois avant de se lancer dans le « business« . C’est exactement ce qu’ont fait les gouvernements français et américains dans les années 70 pour venir à bout de la French Connection.

Et la douane, direz-vous, pourquoi est-elle devenue si discrète ? Parce qu’elle aussi a été réduite à quia. Elle a été dépouillée de ses principales unités, déshabillée, désintégrée. De nombreux services ont été regroupés, des sites d’implantation ont été supprimés (celui d’Arles par exemple), et ses moyens humains et matériels sont très limités.

La région ne compte plus que 1121 douaniers pour surveiller une zone très vaste comptant une importante surface maritime, des ports, des aéroports, des autoroutes, etc. Le maillage national a disparu. Cette baisse régulière des effectifs n’empêche pas les douaniers d’être très performants puisqu’ils ont réussi à intercepter l’an dernier 70 tonnes de produits illicites (dont 60 tonnes de cannabis) et à constater 16 215 infractions.

Cette action remarquable de la douane gêne-t-elle réellement le trafic de stupéfiants ? Réponse: non. La seule mission assignée aux nouveaux douaniers, c’est de favoriser le flux des marchandises au sein de l’Union européenne et donc, de contrôler au minimum leur circulation. Et quand Bruxelles se décide enfin à renouveler une partie de la flotte des gardes-côtes, elle finance un nouveau patrouilleur maritime, le « Jean-François Deniau », basé à La Seyne, dont la vocation est davantage d’accueillir à son bord les immigrés clandestins récupérés en Méditerranée que de les renvoyer chez eux !

Moyennant quoi, l’arrogance des racailles s’accroît de jour en jour : voici le texte hallucinant des tracts placardés à la cité de La Savine où les policiers des Stups ont neutralisé un réseau très structuré :

« Nous souhaitons faire passer un message à tous les locataires de La Savine. Toute personne qui envisage de coopérer avec la police, sachez que nous le saurons et nous nuirons à votre vie. Merci de faire attention et de faire les bons choix pour votre sécurité. Nous vivons avec vous tous les jours, eux ne sont que de passage ».

On appelle ça des menaces sous condition…

José D’Arrigo, rédacteur en chef du Méridional