Comme en chaque période estivale, le musée Fragonard de Grasse propose trois expositions temporaires : l’une autour de la peinture, l’autre autour de la photographie, la dernière autour des costumes provençaux. A partir du 4 juin et jusqu’au 2 octobre prochain, c’est un peintre grassois qui est mis à l’honneur, avec une exposition intitulée « Jean-Baptiste Mallet, la route du bonheur ».
De confidentiel qu’il était encore il y a une dizaine d’années, Jean-Baptiste Mallet (1759-1835) connaît aujourd’hui un renom bien à lui. Il faut dire qu’il a fallu un peu de temps pour détourner le grand public de la simple image d’un « peintre du quotidien ». Sa carrière, débutée dans les années 1780 sous Louis XVI, ne s’achèvera qu’une cinquantaine d’années plus tard, sous Louis-Philippe. Le jeune homme a suivi le parcours classique d’un futur peintre d’histoire et a voyagé en Italie, mais on trouve chez lui un choix de sujets autrement étonnants.
Un peintre plein d’originalité
Témoin de l’ère révolutionnaire, Mallet choisit de peindre « les invisibles », à savoir ceux dont l’image, en raison de leur choix ou de leur mode de vie, ne devait plus apparaître au grand jour. Il brosse des scènes émouvantes comme les nobles vivant cachés pendant la Terreur, les messes secrètes, les émigrés, les familles déchirées par le départ des Volontaires. Il peint aussi le monde des prostituées, désormais tolérées en théorie dans l’espace public.
peindre « les invisibles »
L’historien de l’intime
Au lendemain du Code civil, ce peintre si indépendant d’esprit – et non exempt d’humour, comprend que le statut de la femme est bridé par les nouvelles lois. Par ses œuvres osées, il présente celle-ci comme une figure de liberté, la déesse Vénus lui servant souvent d’allégorie (« Le Lever », « La Frileuse », « Les Cartes », « Le Bain »…)
Une œuvre doublement intéressante
Si on ne prétend pas porter Jean-Baptiste Mallet aussi haut que son compatriote grassois Jean-Honoré Fragonard, il intéressera à la fois l’historien de l’art et l’historien de l’intime : Mallet n’assiste pas en spectateur passif aux événements historiques. Il les analyse et les interprète avec un œil tout personnel.
il intéresse à la fois l’historien de l’art et l’historien de l’intime
Cette exposition mérite le détour ; le musée Fragonard a bénéficié de prêts de neuf prestigieuses institutions (telles que le Louvre, le musée Cognacq-Jay et Carnavalet) : une cinquantaine d’œuvres rejoignent les trente toiles déjà exposées à Grasse.
Jeanne RIVIERE
« Jean-Baptiste Maller, la route du bonheur », du 4 juin au 2 octobre 2022. Musée Fragonard, Hôtel de Villeneuve, 14 rue Jean Ossola, 06130, Grasse.