« Montrer, montrer et montrer encore : former pour donner envie aux jeunes de s’engager dans le métier » : le leitmotiv du chef japonais Ippei Uemura prend presque la forme d’un proverbe. Aujourd’hui, dans le monde de la gastronomie comme dans bien d’autres métiers, on le constate : malgré une forte demande et de nombreux postes à pourvoir, les offres restent sans réponses, et les candidats sérieux manquent à l’appel. Un « turn-over » parfois difficilement tenable s’installe. Pour des chefs comme Ippei Uemura, si bien sûr le covid a éloigné les jeunes d’un secteur économique sensible, la clé du problème se trouve dans la transmission pédagogique. En décembre, il a ainsi passé une journée aux Tamaris avec les jeunes du lycée hôtelier de Bonneveine : au programme, visite des élevages de poisson, préparation et dégustation.
Au cœur du savoir-faire, la main
« La cuisine, c’est avant tout un travail de manipulation. Il y a évidemment un côté théorique, mais la pratique est essentielle. » Celui qui a appris les mille et une facettes de la cuisine ancestrale japonaise aux côtés des chefs les plus prestigieux de son pays est fier de l’héritage reçu : « Après avoir côtoyé toute ma jeunesse des maîtres de la gastronomie, j’ai envie de transmettre mon savoir-faire à d’autres. Cela ne m’empêche d’ailleurs pas de continuer à apprendre de la part d’autres chefs, que j’admire énormément. »
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Une philosophie : la connaissance intime des produits
Un moment comme celui passé avec les jeunes du lycée hôtelier est un régal pour Ippei Uemura, ainsi que pour ses élèves d’un jour. « Ma philosophie est simple : il faut connaître ses produits depuis leur origine pour pouvoir retrouver leur histoire dans l’assiette. » Savoir comment est pêché le poisson, le tenir vivant dans sa main, le préparer « dans les règles de l’art », car oui, le but est bien aussi de faire comprendre aux jeunes qui se destinent à la cuisine que ce n’est pas seulement un métier, mais un art. « Avoir une connaissance intime du produit, c’est aussi une question de respect, pour l’animal et les richesses naturelles de la terre, ajoute le chef. C’est ainsi qu’on va éviter de gaspiller. » De façon très pragmatique, la technique d’abattage de l’« ikejime » permet de neutraliser rapidement le système nerveux de l’animal et ainsi de lui éviter tout stress qui gâterait son goût.
Le partage de l’émotion
Au Tabi, son restaurant situé sur la corniche Kennedy, Ippei Uemura propose un « voyage dans l’assiette » : c’est bien qu’il entend susciter du rêve et de l’émotion chez ses clients. « Notre responsabilité de chef, c’est de donner envie », résume-t-il sobrement. La tête de ce chef japonais bien connu des Marseillais fourmille d’idées pour les prochains mois… mais il ne perd pas de vue sa volonté de transmission, et les jeunes qui le rencontrent en restent marqués.
Jeanne RIVIERE