jeudi 15 mai 2025
Accueil Blog Page 14

La Nuit aux Musées éclaire le Muséum d’Histoire Naturelle

Palais longchamps, Marseille, France

La seconde édition de la Nuit aux Musées se tient ce soir au Palais Longchamp. Une soirée gratuite et ouverte à tous, placée sous le signe des océans, de la science et de la fête.

Ce soir, Marseille rallume les vitrines de ses trésors naturalistes. Le Muséum d’Histoire Naturelle, niché dans l’écrin du Palais Longchamp, accueille la deuxième édition de la Nuit aux Musées. Un événement nocturne et gratuit, orchestré par la Ville de Marseille et ses partenaires, qui promet une immersion singulière autour du thème « Solidarités, Mer et Océans ».

Un programme riche attend les visiteurs. Entre 19h et 22h, étudiants, médiateurs et scientifiques partageront leurs connaissances lors de rencontres et débats sur les grands enjeux scientifiques contemporains. De quoi nourrir la réflexion dans un lieu emblématique, où fossiles, minéraux et espèces menacées racontent les histoires de la biodiversité passée et actuelle.

Pour les plus joueurs, un rallye photo est organisé jusqu’à 23h par les étudiants en médiation scientifique, avec un photobooth et la visite de l’exposition temporaire Océans en complément. À 21h, une conférence menée par des étudiants en Sciences et Humanités viendra interroger les liens entre sciences et société.

À l’extérieur, place à l’engagement écologique et à la convivialité : les associations Sortie d’amphi et Clean my calanques sensibiliseront les visiteurs à la préservation des milieux marins, tandis que les foodtrucks régaleront les plus affamés.

Enfin, la soirée se clôturera en musique, sous les étoiles, avec les DJ sets de Pipa Wave, proposés par le Centre Culturel de Luminy. Une touche festive pour finir en beauté cette nuit un peu magique, qui n’est pas sans rappeler la comédie La Nuit au musée… mais sans tablette magique, juste la curiosité pour guide.

Philippe Arcamone

Endométriose : À Aix, un centre d’expertise change les règles

Young woman suffering from menstrual cramps at home. Gynecology

Longtemps reléguée au rang de caprice hormonal, l’endométriose est aujourd’hui l’une des pathologies chroniques les plus fréquentes chez les femmes en âge de procréer. À l’occasion de la Journée mondiale, le Dr Jean-Philippe Estrade, gynécologue-obstétricien à l’HPP d’Aix-en-Provence, alerte sur une maladie complexe, encore trop souvent minimisée. À l’Hôpital privé de Provence, un centre d’expertise tente de changer les règles.

« L’endométriose est une maladie dans laquelle un tissu semblable à la muqueuse utérine se développe en dehors de l’utérus. » C’est court, c’est simple — et c’est ainsi que la décrit l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Mais derrière cette définition d’apparence anodine, le Dr Jean-Philippe Estrade, spécialiste reconnu de la pathologie, déroule une mécanique biologique et culturelle bien plus vaste. Car l’endométriose, dit-il, « est une maladie qui fait mal deux fois : une fois dans le corps, une fois dans le regard médical ».

La douleur, c’est le fil rouge. Et pas qu’en période de règles. Douleurs pelviennes, digestives, urinaires, douleurs pendant les rapports, parfois même thoraciques ou scapulaires. « Le plus caractéristique, au départ, c’est la douleur cyclique. Mais ensuite, au fil du temps, le cerveau s’hypersensibilise, explique-t-il. Il intègre la douleur, l’anticipe, la généralise. C’est comme un bleu sur lequel on appuie tous les mois. »

Résultat : un cortège de symptômes souvent invisibles à l’imagerie, qui échappent aux radars diagnostiques et laissent les patientes seules face à leurs sensations. « L’endométriose, c’est comme un cancer du sein à l’envers : les symptômes arrivent avant les images. »

Et quand les examens ne montrent rien, les patientes repartent avec un verdict violent : « c’est dans votre tête ». Et pourtant, elles souffrent. Un écart qui alimente les doutes, les remises en question, et parfois le soupçon d’hystérie, au sens clinique du terme. 

« On nous a appris le traducteur pour les symptômes masculins. Mais pas pour les femmes »

Dr Jean-Philippe Estrade

« On nous a appris le traducteur pour les symptômes masculins. Mais pas pour les femmes » livre sans détour le praticien. Il dénonce une médecine encore profondément marquée par une culture paternaliste, où les douleurs des femmes sont minimisées. « Dans l’esprit collectif, une femme malade, ce n’est pas trop possible. C’est souvent elle l’aidante. Dans la famille, on s’inquiète toujours plus pour un homme. » Et le phénomène se renforce au fil des consultations : « Les femmes qui entendent qu’elles exagèrent finissent par culpabiliser. Elles arrêtent de consulter. »

Pourtant, la pathologie est loin d’être rare. Un peu trop fréquente, même, pour certains praticiens débordés. « Il y a des gynécologues qui vous disent : “Ce n’est pas possible, c’est la cinquième patiente aujourd’hui. Ce n’est pas une endométriose, c’est juste des règles douloureuses.” » Comme si le réel ne devait pas se répéter.

Écouter, examiner, proposer

Face à ce constat, le Dr Estrade, lui, a fait du diagnostic précoce et de la prise en charge globale une priorité avec en premier lieu « écouter. Dès la première consultation, on peut comprendre 90% des choses si on prend le temps de poser les bonnes questions. »

Ensuite vient l’examen clinique, « qui doit être doux, autorisé, expliqué ». Puis l’échographie, souvent plus utile que l’IRM qui vient ensuite si besoin : « dans 80 à 90 % des cas, cela permet déjà d’avoir une bonne idée. » Le traitement, quant à lui, repose sur deux piliers : soulager et accompagner.

Soulager, cela veut dire « recadrer les antalgiques, qui sont souvent pris à l’aveugle et en quantité ». Accompagner, cela veut dire proposer une contraception hormonale adaptée – quand la patiente ne souhaite pas de grossesse – ou orienter vers une chirurgie, une PMA, une préservation ovocytaire, en fonction du bilan. « Ce n’est pas une maladie qu’on soigne en ligne droite. Il faut s’adapter, en permanence. »

Mais aussi – et surtout – ne pas réduire la médecine à la molécule. « Il y a les centres de douleur chronique, les soins de support, l’alimentation, la sophrologie, l’acupuncture, le yoga… »

Luna, l’algorithme qui ne juge pas

C’est aussi pour lutter contre l’errance médicale que Jean-Philippe Estrade a cofondé Luna, avec Inès Ben Amor. Une application gratuite, validée scientifiquement et dopée à l’intelligence artificielle, qui propose un dépistage précoce et anonyme.

En quelques minutes, via une série de questions, l’outil établit un score de risque d’endométriose, et oriente vers un professionnel de santé formé à l’écoute de ces patientes. « Ce que permet Luna, c’est de poser une question — sans être jugée. La machine ne vous dira jamais que c’est dans votre tête. Elle donne un pourcentage. Et ensuite, elle vous propose un rendez-vous. »

Depuis son lancement en 2019, plus de 70 000 tests ont été réalisés et depuis avril 2024, 2 000 femmes ont été suivies via Luna, notamment à l’Hôpital privé de Provence (HPP). La structure a ouvert, il y a deux ans, un centre d’expertise pluridisciplinaire, qui propose un parcours de soins cohérent, humain, et rapide, sans renvois en boucle entre services.

Un pôle d’excellence

Avec plus de 500 interventions par an, dont 100 cas complexes, il s’impose aujourd’hui comme un pôle de référence régional. IRM, échographie, chirurgie robotique Da Vinci, plasmajet, assistance en réalité augmentée… la technologie est au service d’une approche globale, avec deux parcours hospitaliers dédiés, un suivi infirmier renforcé et des équipes aguerries.

« Une patiente doit pouvoir rencontrer la bonne personne au bon moment », résume Dr Estrade. Chirurgiens, gynécologues, médecins de la douleur, de la reproduction, sages-femmes, sexologues, sophrologues, tout le spectre de la maladie est couvert, jusqu’au suivi post-opératoire à domicile. « C’est souvent au moment où la maladie s’impose que les patientes découvrent – ou redécouvrent – leur corps.
Ce parcours, c’est aussi pour beaucoup de patientes une manière de reprendre le pouvoir sur leur corps.
»

Pour en parler sans tabou, l’HPP propose une table ronde ouverte à toutes et tous ce mercredi 26 mars à 18h30, sur le thème : « Rencontres et innovations : vers une endométriose sans douleur ? » Un rendez-vous en présence de spécialistes, à suivre sur place ou en ligne pour rompre le silence autour d’une maladie qui ne doit plus rester invisible.

Narjasse Kerboua


Table ronde gratuite — mercredi 26 mars à 18 h 30 à l’HPP
« Rencontres et innovations : vers une endométriose sans douleur ? »
En présence de médecins, sages-femmes, soignants. Diffusion en direct possible ici.

La French Tech Aix-Marseille renouvelle son board et réaffirme ses ambitions

Edition du Grand Bain 2024 au Palais du Pharo. Crédit photo: Nedim Imre

L’Assemblée générale 2025 de la French Tech Aix-Marseille a acté une nouvelle co-présidence et redessiné les priorités de l’écosystème tech local. Plus d’impact, plus de connexions, plus d’ambition.

La French Tech Aix-Marseille entame un nouveau cycle La French Tech sans rompre avec son ADN. Réunis dans l’amphithéâtre d’Aix-Marseille Université (Amu), les membres de l’association ont élu un board en partie renouvelé et une co-présidence inédite. Émilie Mercadal, fondatrice de la healthtech Rofim, et Sébastien Demech, dirigeant de Telaqua, prennent la suite de Julie Davico-Pahin. Un tandem aux profils complémentaires pour porter les ambitions 2025 de la communauté tech locale.

L’Assemblée générale mixte a permis de dresser le bilan des actions menées en 2024 et de dessiner les priorités de l’année à venir. Une feuille de route que l’équipe sortante, épaulée par l’ensemble du board, a construite autour de trois axes structurants : soutenir les startups du territoire, stimuler les coopérations avec les grands groupes, renforcer la dimension nationale et internationale. Une stratégie à plusieurs étages pour répondre à un écosystème en demande de leviers concrets, mais aussi de perspectives.

Le cap est clair. L’accélération du développement des startups reste une priorité. Cela passe par un accompagnement ciblé au financement, une meilleure mise en relation avec les grands comptes installés sur le territoire – souvent jugés difficiles d’accès – et la multiplication des passerelles business.

Le programme French Tech Sans Filtre, destiné à rompre l’isolement des dirigeants, sera poursuivi et renforcé. Objectif : favoriser des temps d’échange sincères, moins institutionnels, pour faire émerger des collaborations nouvelles.

Une tech plus inclusive et durable

En parallèle, l’ambition est clairement affichée de faire rayonner l’écosystème au-delà des frontières régionales. Des actions à l’international sont prévues, en cohérence avec les priorités de la Mission French Tech nationale. Et pour capter les tendances en amont, une Task Force Innovation sera constituée, chargée d’identifier les signaux faibles et les ruptures technologiques à venir.

Mais c’est sur le terrain de l’inclusion que la French Tech Aix-Marseille entend se positionner davantage. Une nouvelle promotion du programme French Tech Tremplin sera lancée, avec pour objectif d’accompagner des profils sous-représentés dans l’univers entrepreneurial. Le Pacte Parité, levier de transformation de la gouvernance des startups, sera mis en avant et accompagné. En parallèle, l’Observatoire des startups viendra documenter les évolutions de l’écosystème.

Enfin, en 2025, Le Grand Bain, événement phare du territoire dédié à la tech inclusive et durable, reviendra dans une version repensée, plus ouverte, plus engagée avec une édition repensée pour élargir encore les cercles de la tech engagée.

Diversité des profils pour répondre aux enjeux

La dynamique engagée ces dernières années a permis de structurer un réseau cohérent, articulé autour de partenaires historiques que sont la Métropole Aix-Marseille-Provence, la Ville de Marseille et la CCIAMP. Tous étaient présents à l’ouverture de l’assemblée : Éric Berton (AMU), Jean-Pierre Cochet (Ville de Marseille), Linda Casta (Métropole) et Morgann Rougeron (CCIAMP) ont rappelé leur engagement aux côtés de l’association.

Parmi les 31 candidats en lice, 13 ont été élus pour composer le nouveau conseil d’administration. Huit entrepreneurs, trois structures d’accompagnement, deux représentants de l’écosystème. Une composition pensée pour refléter la diversité des profils, des expertises et des enjeux à venir.

Julie Davico-Pahin laisse derrière elle une structure toujours soutenue par ses partenaires historiques : Métropole, CCIAMP, Ville de Marseille. Un écosystème qui assume désormais pleinement son rôle de locomotive tech dans le sud, et qui entend bien le faire savoir.

À l’heure des grands équilibres nationaux et des compétitions régionales, la French Tech Aix-Marseille veut garder un coup d’avance. Ni frondeuse, ni suiveuse : en mouvement.

N.K.


Le nouveau board 2025 de la French Tech Aix-Marseille
Collège Entrepreneurs : Imane Bessaih (Fiidi) ; Sami Chlagou (Cross the Ages) ; Sébastien Demech (Telaqua) ; Anton Fert (Tchek) ; Mathias Fonlupt (Entent) ; Tanguy Goetz (Neptech) ; Béatrice Leduby (Deki Ecologistic) ; Aurélie Toubol (Troov).
Collège Structures d’accompagnement : Frédéric Guilleux (Zebox) ; Annick Labat (574 Sud – Groupe SNCF) ; Alexandre Tremblay (Albert School).
Collège Partenaires de l’écosystème : Lionel Aubert (Rise Partners) ; Élodie Cesaro (Mélaw)


Gérard Gazay prend la tête de la Soleam dans un contexte de recomposition

Le maire (LR) d’Aubagne succède à Michel Roux à la présidence de la société publique locale (Soleam) qui pilote plusieurs projets structurants de la métropole Aix-Marseille-Provence. Cette nomination intervient alors que la SPL amorce une nouvelle phase de gouvernance et de rationalisation.

C’est une nomination qui s’inscrit dans un contexte de recomposition plus large du paysage de l’aménagement métropolitain. Gérard Gazay, maire d’Aubagne et vice-président de la Métropole Aix-Marseille-Provence (AMP) délégué au développement économique, a été élu ce 24 mars président de la Soleam. Cette société publique locale (SPL), fondée en 2010, intervient sur plusieurs secteurs majeurs de Marseille, mais aussi dans d’autres communes du territoire métropolitain.

Le nouvel élu succède à Michel Roux, vice-président de la Métropole délégué au projet métropolitain, qui avait lui-même été désigné en novembre dernier après la démission de l’élu marseillais Yves Moraine. La succession de présidents en quelques mois illustre les tensions et les réajustements au sein des instances métropolitaines, à l’approche des municipales de 2026.

Réorganisation en cours

Cette élection s’accompagne d’un chantier de gouvernance plus profond. Directeur général de la Soleam depuis sa création, Jean-Yves Miaux, dont le mandat arrivait à échéance le 31 mars, a vu celui-ci prolongé jusqu’à fin juin. Il laissera ensuite la place à un nouveau dirigeant, attendu au début de l’été, qui devra non seulement redresser une structure en difficulté, mais aussi poser les bases d’une fusion des opérateurs d’aménagement à l’échelle métropolitaine.

Cette stratégie de mutualisation, portée par plusieurs élus du territoire, vise à rationaliser les outils existants — Soleam, Euroméditerranée, EPA ou SPL locales — pour gagner en efficacité sur les opérations d’aménagement, d’équipement ou de renouvellement urbain. Un chantier copernicien que les municipales de 2026 pourraient toutefois ralentir.

Parmi les premiers changements concrets, Jean-Paul Kaplanski, nommé directeur général délégué en novembre 2023, voit son mandat social s’interrompre au 1er avril. Ce juriste de formation réintègre ses fonctions initiales de directeur des affaires juridiques.

Des finances à rééquilibrer

Au-delà de la gouvernance, les enjeux financiers de la Soleam pèsent lourdement sur sa trajectoire. Selon les informations du site TPBM, le budget consolidé de la SPL affichait un déficit de 556 000 euros en 2024, pour 8,2 millions d’euros de charges d’exploitation et 7,7 millions de recettes. En décembre dernier, la Métropole Aix-Marseille-Provence a dû injecter 1,2 million d’euros sous forme d’avance en compte courant afin de couvrir les besoins liés à la restructuration en cours.

Aujourd’hui dotée d’un capital de 5,91 millions d’euros, la Soleam emploie 60 collaborateurs. Elle reste majoritairement contrôlée par la Métropole AMP (66,7 %), aux côtés de la Ville de Marseille (16,9 %) et du Département des Bouches-du-Rhône (15,2 %). Six autres communes actionnaires – Allauch, Aubagne, La Ciotat, Marignane, Roquefort-la-Bédoule et Salon-de-Provence – détiennent chacune une part symbolique de 0,18 %, en lien avec les projets en cours sur leur territoire.

À moyen terme, la Soleam demeure un outil stratégique pour mener à bien les opérations d’aménagement d’intérêt métropolitain. Mais elle devra, pour cela, démontrer sa capacité à se réformer, à mutualiser ses moyens avec les autres entités existantes, et à retrouver une trajectoire budgétaire plus soutenable. La nouvelle équipe en place sera attendue sur ces trois fronts.

L.-.R.M

L’aciériste Marcegaglia forge son avenir bas-carbone à Fos-sur-Mer

Le groupe italien Marcegaglia vise une aciérie sans charbon. Deux millions de tonnes d’acier bas-carbone par an, 750 millions d’euros d’investissement. Le tout sans un centime d’aide publique… et encore quelques inconnues à lever.

La scène est posée sur les terres industrielles de Fos-sur-Mer, au cœur de la zone portuaire du Grand Port Maritime de Marseille. Là où l’usine historique d’Ascometal – rachetée à la barre du tribunal de commerce en juin dernier – avait vu ses feux s’éteindre, le groupe italien Marcegaglia entend rallumer les flammes d’une sidérurgie plus verte.

Nom de code : projet Mistral. Le plan consiste à moderniser les installations existantes et à construire une nouvelle aciérie électrique bas-carbone. Une relance industrielle d’ampleur, dans un décor qui en a vu d’autres. « Ce projet est fondamental, stratégique », affirme Antonio Marcegaglia, dans un français teinté d’Italien, devant le ministre de l’Industrie, Marc Ferracci et les élus locaux. « On est très, très bien avancés, grâce à tous les interlocuteurs. »

© Alain Robert

Un site pensé comme un tout

Deux millions de tonnes d’acier standard produits chaque année dans un four à arc électrique, alimenté en ferraille recyclée et en préréduits d’origine bas-carbone, que doit fournir son voisin GravitHy, avec lequel le groupe dit travailler « très, très près » souligne le PDG qui s’apprête à entrer au capital, « en tant que petit actionnaire, mais surtout cliente majeure« .

« C’est une synergie naturelle, comme on pourrait en avoir avec d’autres projets comme NeoCarb, parce qu’on va générer très peu de CO₂ », poursuit-il. La chaleur fatale pourrait y être valorisée pour d’autres usages industriels.

À cela s’ajoutent 150 000 tonnes d’aciers spéciaux, issus des installations déjà présentes. La technologie est connue, éprouvée, mais rarement poussée à ce niveau de production en France. L’ensemble du site, pensé comme un dispositif intégré, devrait permettre de réduire de 80% les émissions de gaz à effet de serre, par rapport à un site classique intégrant hauts fourneaux et convertisseurs.

Voie ferrée à relancer, canal à mobiliser

Ce nouveau cycle sidérurgique impose une logistique millimétrée : deux millions de tonnes de matières premières à faire entrer, autant de produit fini à évacuer. Le port minéralier de Fos, situé à trois kilomètres, pourrait reprendre du service.

Une voie ferrée interne, aujourd’hui inutilisée, devrait être remise en service. L’approvisionnement se fera aussi par la route et peut-être par le canal, dans une logique d’intermodalité assumée.

Pour porter ce projet ambitieux, le groupe, qui emploie 7 800 salariés dans le monde et a réalisé 4,9 milliards d’euros de chiffre d’affaires en 2023, prévoit d’investir 750 millions d’euros en fonds propres. Aucun partenaire extérieur, aucune aide publique. Une rareté, dans un secteur habitué aux financements mixtes.

En matière d’emplois, Marcegaglia entend passer de 320 à 700 salariés en l’espace de trois ans. Le plan intègre une montée en charge progressive, avec des besoins en formation et un accompagnement à la mobilité, pour limiter l’usage systématique de la voiture.

À ce jour, il s’agirait du plus gros investissement jamais réalisé par le groupe.

Au centre, le ministre de l’Industrie, Marc Ferracci aux côtés du PDG Antonio Marcegaglia. © Alain Robert

Les conditions du feu vert

Jacques-Yves Floch, ancien directeur de l’usine à chaud d’ArcelorMittal à Dunkerque, a été nommé pour piloter le site. Recruté à l’automne, le polytechnicien connaît le terrain. « Si tout va bien, les travaux démarreront fin 2027, pour une mise en production fin 2028 », indique-t-il.

« Encore faut-il que les conditions soient réunies. » Et « ce ne sera pas avant plusieurs mois », reconnaît Antonio Marcegaglia. Plusieurs éléments restent à éclaircir.  Plusieurs éléments restent à éclaircir. En premier lieu : le prix de l’électricité, ressource vitale pour faire tourner le four. Le groupe attend des garanties sur la stabilité et le niveau des tarifs à long terme. Ce facteur sera déterminant dans la viabilité économique du projet.

« Il faut fournir à nos industriels des prix de l’électricité compétitifs et pérennes  », insiste Marc Ferracci, ministre délégué à l’Industrie. Une phrase adressée à EDF, mais aussi à tous ceux qui suivent avec attention le projet de ligne à très haute tension (THT) entre Fos et Jonquières (Gard).

Longue de 65 km, cette liaison 400 000 volts est censée répondre au doublement attendu de la demande dans la zone. Le fuseau de moindre impact a été acté fin 2024 mais le projet suscite une opposition farouche, notamment en Camargue et chez les agriculteurs.

Autre passage obligé : le débat public, qui s’ouvre dans le cadre de la réindustrialisation du territoire Fos-Étang de Berre. Marcegaglia doit également déposer une demande d’autorisation environnementale pour le projet, avec enquête publique et instruction ICPE à la clé.

© Alain Robert

L’acier, une affaire d’État (et d’Europe)

Sur place, Marc Ferracci, ministre délégué à l’Industrie, coche les cases : souveraineté, compétitivité, écologie. « Ce projet est au cœur de notre stratégie industrielle, lance-t-il devant les micros. Un levier de compétitivité, créateur d’emplois, et un atout face aux concurrents étrangers. »

L’acier ? « Une matière stratégique, tout comme la chimie. Elle alimente nos chaînes de valeur, de l’automobile à la défense, dont les besoins vont aller croissant dans le contexte géopolitique troublé que nous connaissons. »

Justement la défense ! Antonio Marcegaglia reste prudent, mais affirme que son groupe « a déjà les compétences techniques » pour répondre aux besoins européens, y compris militaires. L’intérêt stratégique du projet, lui, ne fait pas débat.

Le ministre enfonce le clou : efforts de décarbonation à saluer, ligne haute tension à raccorder, clause de sauvegarde européenne à muscler. « Il faut faire en sorte que des activités comme celle de cette usine soient préservées de la concurrence, notamment chinoise », insiste-t-il.

Bruxelles bouge, dit-il. Paris pousse, assure-t-il, se félicitant que la Commission européenne ait récemment annoncé « une évolution de la clause de sauvegarde dès 2025 », ainsi qu’une révision du mécanisme d’ajustement carbone aux frontières (CBAM), qui devrait entrer en vigueur en 2026.

Dans ce paysage en mutation, au croisement d’un passé lourd et d’un avenir bas-carbone, nul doute que le « Mistral » de Marcegaglia insuffle déjà à Fos un nouvel élan sidérurgique.

Narjasse Kerboua

Foot US – Les Blue Stars de Marseille, bien plus que des « amateurs »

Blue Stars
Tous les mardis et jeudis soirs, les Blue Stars de Marseille investissent le stade de Saint-Jérôme, au pied des immeubles du Merlan, pour leurs entraînement de football américain. Photo Benoît Gilles

Parmi les meilleurs clubs français depuis trois ans, les Blue Stars de Marseille et ses 500 licenciés restent un club amateur, aux moyens limités. Plongée dans le quotidien de ses joueurs Élite qui jonglent entre sport, travail et vie de famille, réunis par la passion et beaucoup de débrouille.

Notre-Dame-de-la-Garde veille sur Marseille. Sur toute la cité phocéenne. « De Bonneveine jusqu’aux Aygalades », chantait Massilia Sound System. Justement, l’emblème de la ville se retrouve niché jusqu’au cœur du 13e arrondissement.

À Saint-Jérôme, sur le stade coincé entre les immeubles du Merlan et l’avenue hyper fréquentée menant à l’IUT, la Bonne Mère est brodée sur le torse et imprimée sur le casque des Blue Stars. Elle orne le logo du club de football américain marseillais, entouré d’une étoile évoquant les mythiques Cowboys de Dallas.

Ainsi placés sous la protection divine, ces gladiateurs sportifs des temps modernes constituent la troisième force de France depuis trois saisons, en plus de s’appuyer sur l’un des centres de formation les plus efficaces d’Europe.

Tout ce que nous réalisons, c’est grâce à de l’expertise, de l’engagement, du bénévolat et des partenaires

Didier Della Guardia, le président

Créés en 1994, au bord de la faillite en 2014, les Blue Stars jouent certes dans le championnat Élite pour la 6e année consécutive, et ils sont peu à Marseille à pouvoir se targuer d’évoluer au plus haut niveau national d’un sport collectif (l’OM, le CNM en water-polo et les Spartiates au hockey sur glace).

Mais ils sont loin, très loin, de prétendre au statut professionnel. Même en plein essor, le club de foot US reste totalement amateur. Il affiche un budget riquiqui ne dépassant pas les 300 000 euros, composé pour un tiers par du financement public. Une somme utilisée à destination de ses quelque 500 licenciés, ses six équipes de foot US, sa formation de flag football (discipline olympique en 2028) et son escouade de cheerleading.

Difficile d’exister à l’ombre d’un mastodonte comme l’OM qui phagocyte les esprits, les énergies et l’écosystème financier de la 2e ville de France, malgré la meilleure volonté du monde…

« Cela veut dire que tout ce que nous réalisons, c’est grâce à de l’expertise, de l’engagement, du bénévolat et des partenaires », résume le président Didier Della Guardia.

Blue Stars Gwinner
Le quarterback américain des Blue Stars Brandon Gwinner. Photo Benoît Gilles

Aucun joueur professionnel, un seul salarié pour la partie sportive

Sur les plus de soixante joueurs composant le roster (l’effectif) de l’équipe première, aucun n’est professionnel. Le directeur sportif et head coach Bavuong Souphanthavong est le seul salarié de la partie sportive, bien aidé par des alternants Armel Saïz et Maé Georges, en charge de la communication et de l’événementiel.

Les autres entraîneurs sont défrayés, tout comme les « imports », les deux recrues américaines (Brandon Gwinner et Dejion Lynch cette saison). La très grande majorité des joueurs payent leur licence (290€ pour les seniors, cotisation au club comprise), participent même aux frais de déplacement pour les matchs à l’extérieur (5€) et ne bénéficient d’aucune rémunération en contrepartie. Sans oublier les frais pour l’achat ou la location du matériel, obligatoire : casque, épaulières, crampons, gants…

« On reste un sport amateur », confirme Bavuong Souphanthavong. D’ailleurs, une seule formation est semi-professionnelle dans l’Hexagone, puisque les joueurs ne sont recrutés que pour six mois de l’année : les Mousquetaires de Paris, qui évoluent dans la Ligue européenne ELF.

« Les joueurs travaillent à côté, ils jouent au foot sur leur temps libre et rognent sur leur vie de famille, ils ont parfois un enfant à faire garder, poursuit celui que tout le monde appelle « Bav ». On doit prendre en compte cela. »

Ils sont étudiants, agents de sécurité ou immobiliers, comptables…

Étudiants, agents de sécurité ou immobiliers, commerçants, comptables, policiers, logisticiens… À l’image des gabarits très variés, toutes les catégories socio-professionnelles sont représentées au sein de l’effectif marseillais.

Alors, les soirs d’entraînement (deux par semaine) rythmés par du rap joué en permanence par une puissante enceinte, les joueurs arrivent au compte-goutte, certains même après le début de l’échauffement. La plupart se changent dehors, sur le bord du terrain, alors que le bâtiment municipal est pour le moins vétuste.

À 19 ans, le beau bébé Youssef Nettar, international U20, n’a pas de raison d’arriver en retard : après avoir quitté en janvier son BTS analyses de biologie médicale, l’offensive linemen (rempart principal pour bloquer l’accès à son quarterback) intervient dans le périscolaire à la pause méridienne et l’après-midi, ce qui lui permet également d’aller chaque matin à la salle de sport.

De son côté, Lionnel Zahariou fait « parfois » partie des retardataires cette saison, en raison de ses « nouvelles responsabilités » (team manager chez Nike aux Terrasses du Port) et du fait qu’il a encore loupé l’examen du permis de conduire. « L’an dernier, j’étais à l’heure ! Là, c’est plus difficile. Si ça ne tenait qu’à moi, je serais ponctuel », explique le wide receiver, qui réussit toutefois à se libérer le week-end pour les matchs.

Photo B.G.

On essaie de fixer un cadre, mais il faut aussi s’adapter au rythme de chacun. Nous faisons un sport très exigeant pratiqué par des passionnés

Bavuong Souphanthavong, le directeur sportif du club et head coach de l’équipe Élite

« On essaie de fixer un cadre, mais il faut aussi s’adapter au rythme de chacun. Nous faisons un sport très exigeant pratiqué par des passionnés », résume Bavuong Souphanthavong, arrivé en 2016 quand le club végétait en Division 3.

La passion pour leur sport, voilà certainement ce qui lie profondément les Blue Stars. Et leur permet d’accepter plus facilement toutes les concessions, familiales et/ou sociales, et les efforts à fournir jusqu’au mois de juin. Le 28 précisément, date de la finale du Casque du Diamant, organisée à Chambéry.

Une routine pour éviter « de faire n’importe quoi »

« Je vais à la salle de muscu à 5 h du mat’, puis je file au travail jusqu’à 17h45, avant d’enchaîner sur l’entraînement, détaille Emmanuel Ntoumtoum, running back sur le terrain et conseiller bancaire au Crédit agricole à la ville. Comme j’ai toujours fait du foot US, ça fait partie de ma routine. Depuis le lycée, ça n’a jamais changé. »

« On est amateurs, donc cela nécessite une vraie gestion de l’agenda au quotidien. Ça permet d’avoir une vie structurée, au lieu de faire n’importe quoi », appuie-t-il.

L’humain, la formation des éducateurs et l’accompagnement des jeunes

Faute de tribunes à Saint-Jérôme, l’équipe Élite investit le stade Delort pour disputer ses matchs à domicile, à deux pas du Vélodrome. Les spectateurs viennent en masse, assistant à un vrai show, signe d’un véritable capital sympathie de la part du public marseillais.

Pour rester attractifs, malgré l’important turn-over de joueurs au gré des mutations professionnelles ou changement de vie, les dirigeants des Blue Stars misent sur l’humain, un tropisme indéniable pour Marseille ou encore la formation des éducateurs. Mais le club installé dans les quartiers Nord se fait fort d’une vocation sociale en ne lésinant pas sur l’accompagnement des jeunes.

« Quand on constitue notre effectif, on est dépendant des bonnes volontés de chacun, alors on met en avant le projet sportif, les installations, la qualité du coaching et les résultats sportifs pour attirer, précise Bavuong Souphanthavong. Et après, on essaie de faire au mieux avec ce qu’on a, ce qui est déjà très bien. »

Photo B.G.

Victoire impérative samedi face aux Argonautes d’Aix au stade Delort

Finaliste du championnat de D1 en 2023, stoppé en demie l’an passé, le club marseillais nourrit encore de grandes ambitions pour 2025, même si le début de saison n’est pas parfait. Après deux victoires, un nul et deux revers, il reçoit ce samedi son voisin aixois des Argonautes (20h), au stade Delort, à l’occasion de la 7e journée du championnat (*). La victoire sera impérative pour continuer à croire à l’objectif d’atteindre le dernier carré.

« On veut essayer de rattraper petit à petit notre retard sur les meilleurs clubs (Thonon, La Courneuve, Ndlr), explique Bavuong Souphanthavong. Il ne faut pas mettre la charrue avant les bœufs, travailler sereinement, sérieusement. Ça reste du sport ; au soccer, le PSG ne gagne pas chaque année mais il le fait huit fois sur dix. C’est à peu près la même chose pour nous avec les Black Panthers et le Flash. Par rapport à nos capacités, finir tout le temps de deuxième serait déjà pas mal. »

Benoît Gilles

* Prévu le 1er février dernier, le derby entre Argonautes d’Aix et Blue Stars de Marseille comptant pour la 2e journée du championnat Élite n’avait pu se tenir, le terrain du stade Carcassonne étant impraticable. Reporté au 26 avril, le match aller se jouera donc après la rencontre retour.

SUR LE MÊME SUJET


Basket – Pro B : Fos Provence casse ses prix pour ses trois matchs à Marseille

Fos Provence
Le 27 dernier dernier, Rob Turner III avait inscrit 30 points face à Caen au Palais des sports de Marseille. Il ne fait plus partie de l'effectif depuis deux semaines. Photo B.G.

En difficulté en Pro B, le club de Fos Provence propose un pack de billets pour ses trois rencontres délocalisées à Marseille, contre Orléans, Vichy et Poitiers. Les BYers auront besoin du public pour se sauver.

Depuis douze ans, Fos Provence a pris l’habitude de se délocaliser à Marseille pour disputer ses rencontres au Palais des sports. Fers de lance du basket régional, les BYers y ont écrit certaines belles pages de leur histoire et fait le plein notamment en janvier 2023 pour affronter Boulogne-Levallois de celui qui n’était alors qu’un ovni en devenir, Victor Wembanyama.

La saison 2024-2025 ne déroge pas à la règle. Les hommes de Rémi Giuitta se sont déjà produits dans la cité phocéenne entre Noël et le jour de l’An, concédant la défaite face à Caen (73-79) sur la fin, dans un scénario qui s’est très souvent répété.

Fos Provence s’apprête à revenir à Marseille, avec trois rencontres programmées dans les six prochaines semaines :

Samedi 29 mars, 30e journée : Fos Provence – Orléans (20h)
Samedi 12 avril, 33e journée : Fos Provence – Vichy (20h)
Samedi 3 mai, 36e journée : Fos Provence – Poitiers (20h).

À partir de 30 euros pour trois matchs

À l’occasion des « Marseille Basket Series », un pack billetterie à prix cassés est proposé : 10 euros par match pour une place en catégorie 2 (milieu de tribune latérale) ou 15 euros en catégorie 1, ce qui permet notamment d’être placé juste derrière le banc dirigé par Rémi Giuitta.

Soit 30 ou 45 euros au total, pour voir évoluer des joueurs de Pro B. Il existe aussi un offre VIP à 100 euros par rencontre. Et c’est gratuit pour les enfants de moins de cinq ans.

En grande difficulté (neuf revers consécutifs, série en cours), les BYers pointent en 19e et avant-dernière place du championnat, repassant devant Chartes qui s’est incliné ce dimanche face à Poitiers, mais restent en position de relégables.

Alors, Fos Provence aura plus que jamais besoin du soutien du public, dans cette opération maintien, au moment d’aborder les neuf derniers matchs de la saison de Pro B.

Marseille Basket Series
Pack pour les trois rencontres de Fos Provence disputées au Palais des sports de Marseille.
Catégorie 2 : 10 euros.
Catégorie 1 : 15 euros.
VIP : 100 euros.

La billetterie.
Toutes les informations du club.

SUR LE MÊME SUJET


À Fos, l’industrie attend encore des garanties

Le ministre de l'Indusrie, Marc Ferracci, en visite dans l'aciérie Marcegaglia, à Fos-sur-Mer. © Alain Robert

En visite ce lundi 24 mars sur les sites de Marcegaglia et Kem One, le ministre de l’Industrie Marc Ferracci a défendu une réindustrialisation fondée sur la décarbonation. Mais entre prix de l’électricité, concurrence mondiale et raccordement à la ligne à haute tension, les industriels du bassin de Fos attendent encore des engagements concrets.

Le décor a de quoi faire rougir un roman de Zola rechargé aux électrons. Fos-sur-Mer, ses vapeurs industrielles, ses convois d’acier, son électrolyse géante. Ce lundi 24 mars, Marc Ferracci, ministre délégué à l’Industrie, a enchaîné les casques sur deux sites stratégiques : Marcegaglia, sidérurgiste italien décidé à produire de l’acier bas-carbone, et Kem One, chimiste français qui électrolyse le sel pour fabriquer du PVC. Deux haltes, une même partition : la souveraineté industrielle, version décarbonée. Et surtout, un territoire sous haute tension, au sens propre comme au figuré.

Chez Marcegaglia, c’est un projet à 750 millions d’euros qui s’annonce. Mistral, c’est son nom, promet deux millions de tonnes d’acier par an d’ici 2028. Exit les hauts-fourneaux et le charbon, place aux fours électriques et à la ferraille recyclée.

Le ministre, en visite dans la halle de l’ancienne Ascometal, aujourd’hui reconvertie, salue un projet « emblématique de la stratégie de souveraineté industrielle ». Et insiste : « L’acier, tout comme la chimie, sont des industries de base qui alimentent l’ensemble des chaînes de valeur, de l’automobile à la défense. »

Le groupe italien veut doubler les effectifs d’ici la mise en service, moderniser l’usine existante et construire une nouvelle unité. L’entreprise mise sur son autonomie financière, mais aussi sur les synergies du territoire : logistique fluviale, accès au rail, canal, proximité de GravitHy et NeoCarb.

Le ministre, lui, parle « d’alignement de tous les acteurs du territoire » et ne cache pas sa satisfaction de voir « les lignes bouger » au niveau européen sur la clause de sauvegarde et la taxation carbone aux frontières. En creux, une mise en garde : les industriels engagés dans la transition ne peuvent pas être les seuls à payer.

Chlore, soude et CO₂ en moins

Un peu plus loin, toujours dans la zone industrialo-portuaire, changement de décor mais même cap. Chez Kem One, on électrolyse du sel pour produire chlore, soude et hydrogène. Et on vient d’investir 200 millions d’euros dans une nouvelle salle d’électrolyse, baptisée Elyse, pour remplacer un procédé vieillissant au diaphragme par une technologie à membrane bipolaire. Résultat attendu : 35% d’économie d’électricité, près de 50 000 tonnes de CO₂ en moins, et une efficacité démultipliée.

« C’est un projet historique pour Kem One », affirme Alain Consonni, directeur du site. Il faut dire que l’entreprise consomme, à elle seule, autant d’électricité qu’une ville comme Aix-en-Provence : deux térawattheures par an.

Les deux industriels partagent une même attente : de l’électricité en quantité, à prix stable. Et vite. « Il faut fournir à nos industriels des prix de l’électricité compétitifs et pérennes », martèle Marc Ferracci. Une phrase adressée à EDF, mais aussi à tous ceux qui suivent avec attention le projet de ligne à très haute tension (THT) entre Fos et Jonquières (Gard).

Longue de 65 kilomètres, cette liaison 400 000 volts est censée répondre au doublement attendu de la demande dans la zone. Le tracé de moindre impact a été validé fin 2024, mais le projet suscite une opposition farouche, notamment en Camargue et chez les agriculteurs. « Il faut faire atterrir les projets vite, et sans casser le lien avec les territoires », ajoute le ministre.

Un centre de gravité d’une réindustrialisation

Mais la compétitivité passe aussi par des règles du jeu équitables. Sur la sidérurgie, Marc Ferracci ne cache plus son impatience : « Il faut faire en sorte que des activités comme celle de cette usine soient préservées de la concurrence, notamment chinoise », insiste-t-il. L’acier importé, produit à bas coût avec de l’électricité issue du charbon, n’a pas les mêmes contraintes.

La France presse Bruxelles d’agir. Et le ministre se félicite que « la Commission européenne ait récemment annoncé une évolution de la clause de sauvegarde dès 2025 », ainsi qu’une révision du mécanisme d’ajustement carbone aux frontières (CBAM), prévue pour 2026. Des mesures destinées à éviter que les industriels européens ne soient les seuls à payer le prix de la transition.

Entre deux transfos, le ministre n’oublie pas de parler d’Europe. Le dialogue stratégique sur la chimie débute, les textes européens sur les matières premières critiques (Critical Raw Materials Act) se précisent, et la France joue des coudes pour défendre ses filières lourdes. « Nous avons construit une alliance des industries lourdes avec plusieurs pays », rappelle-t-il. Une manière de poser Fos comme le centre de gravité d’une réindustrialisation qui s’invente sous tension.

Dans ce contexte, un débat public inédit s’ouvrira le 2 avril 2025, organisé par la Commission nationale du débat public (CNDP). Il couvrira une quarantaine de projets industriels ou d’infrastructures à horizon huit ans, pour tenter de construire une vision d’ensemble sur les besoins en énergie, transport, logement, emploi ou environnement dans le bassin de Fos-Étang de Berre.

L.-R.M.

À Fos, l’État cherche encore la bonne gouvernance pour piloter l’industrialisation

Site de Kem One à Fos-sur-Mer. © N.K.

De Marcegaglia à Kem One, Marc Ferracci a pu mesurer l’ampleur des mutations industrielles à l’œuvre dans le Golfe de Fos. Mais à l’heure où les projets se multiplient, la gouvernance, elle, se cehrche encore. GIP, OIN… ? Le ministre reconnaît qu’il faudra trancher, alors qu’un débat public inédit s’ouvrira en avril 2025 pour éclairer l’avenir du bassin.

En visite à Fos-sur-Mer ce mercredi, Marc Ferracci, ministre délégué chargé de l’Industrie, a enchaîné deux haltes symboliques : Kem One, où il a assisté au lancement du projet Elyse, et Marcegaglia, sidérurgiste italien bien implanté dans la zone industrialo-portuaire. Deux sites emblématiques des mutations en cours dans le Golfe de Fos, et une même question posée avec insistance : qui pilote vraiment la dynamique industrielle du territoire ?

Interrogé par Le Méridional sur la création d’un GIP (Groupement d’intérêt public) ou d’une OIN (Opération d’intérêt national), le ministre n’a pas fermé la porte. « Une réunion interministérielle se tient en ce moment même à Paris sur ce sujet, preuve que l’État prend la question à bras-le-corps. Je ne préempte pas la forme juridique, mais il faudra bien une structure claire pour mettre en œuvre la feuille de route industrielle que nous avons signée à Marseille [signée jeudi 27 février à l’Hôtel de Région, ndlr] », a-t-il répondu. Les acteurs économiques du territoire penchent, quant à eux, pour un Groupement d’intérêt public.

L’enjeu de la ligne THT 400 000 volts

Pour le ministre, cette structuration devra aller de pair avec l’acceptabilité sociale. Il a évoqué le débat public qui s’ouvrira en avril sur les futurs projets de la zone, dont la ligne à très haute tension, comme un outil essentiel pour informer et associer les habitants et les élus locaux.

Le projet de ligne THT porté par RTE prévoit une liaison aérienne de 400 000 volts sur 65 km entre Fos (poste de Feuillane) et Jonquières (Gard), pour accompagner le doublement de la demande électrique dans la zone. Fin septembre 2024, le préfet coordinateur l’ancien préfet de région, Christophe Mirmand a validé un « fuseau de moindre impact », contournant Arles et Beaucaire par l’ouest, avec passage par une portion du parc naturel de Camargue.

Pour le ministre, il faudra aussi répondre aux besoins fondamentaux des industriels. Et en premier lieu, l’énergie. « Comment fournir à nos industriels des prix de l’électricité compétitifs ? Comment leur faire parvenir une source de consommation électrique de manière stable, de manière pérenne ? » a-t-il évoqué, rappelant que la future ligne THT devait précisément répondre à cette exigence.

Mais la contestation reste vive. Plusieurs maires (Arles, Beaucaire), syndicats agricoles et collectifs citoyens dénoncent un manque de transparence, des impacts mal évalués, et une concertation jugée superficielle. Des recours juridiques sont déjà envisagés. Le fuseau validé a ouvert néanmoins une nouvelle phase : étude sur l’enfouissement, concertation agricole, évaluation de la demande future… et surtout, débat public global à venir.

Un débat public global inédit à l’échelle du bassin de Fos

En effet, à partir du 2 avril 2025, un débat public inédit en France s’ouvrira à l’échelle du bassin de Fos-étang de Berre. Organisé par la Commission nationale du débat public (CNDP), il portera sur une quarantaine de projets à l’horizon des huit prochaines années. Il s’agit de permettre une vision d’ensemble des besoins en énergie, emploi, transport, logement, risques, environnement ou encore formation. Et éviter l’émiettement des concertations au cas par cas.

Le territoire de Fos résume à lui seul l’équation nationale : souveraineté industrielle, urgence climatique, accélération énergétique et pression démocratique. L’enjeu, désormais, est de créer la structure capable de faire atterrir tous ces projets dans un calendrier resserré, sans casser le lien avec les élus, les habitants et les industriels.

> Plus d’informations à venir sur Le Méridional dans notre article complet sur la visite ministérielle.

N.K.

À Fos, l’État vient mesurer l’avancée de la décarbonation industrielle

Marseille, France -27-02-2025: Marc Ferracci, French Minister for Industry and Energy, visits the H 160 and H 175 helicopter production and assembly lines at Airbus Helicopters Marignane
Marc Ferracci en visite, ici en visite, à Airbus Helicopters Marignane.

Le ministre de l’Industrie, Marc Ferracci, est attendu ce lundi sur la zone industrialo-portuaire de Fos-sur-Mer, où se joue une partie essentielle de la transition écologique française. Hydrogène, e-carburants, acier bas carbone… la décarbonation du site est lancée, mais reste semée d’incertitudes.

La carte postale industrielle de Fos-sur-Mer a longtemps été marquée par ses panaches de fumée, ses hauts-fourneaux et ses convois de matières premières. À l’heure du dérèglement climatique, cette image appartient peu à peu au passé.

La décarbonation s’invite désormais dans tous les discours, et l’État entend le démontrer à travers la visite du ministre de l’Industrie, Marc Ferracci, ce lundi 24 mars. Car entre la Méditerranée et la Crau, se joue l’un des plus grands défis de la politique industrielle française.

Fos-sur-Mer concentre à elle seule plus de 10 % des émissions de gaz à effet de serre de l’industrie nationale. Réduire cette empreinte, sans délocaliser l’activité ni sacrifier l’emploi, suppose une réinvention en profondeur du modèle. Et plusieurs projets d’envergure sont déjà à l’œuvre.

Acier vert, chimie bas carbone…

Le déplacement du ministre se veut une démonstration de soutien aux industriels qui amorcent ce virage. Il visitera l’aciérie Marcegaglia, anciennement Ascométal, rachetée en 2024 par le groupe italien avec l’aide de l’État. Plus de 300 emplois ont été sauvés. Le site s’inscrit dans une stratégie de revitalisation de la sidérurgie, en lien avec l’ambition européenne d’une industrie lourde plus verte.

L’après-midi, Marc Ferracci se rendra sur le site de Kem One, où la chimie lourde tente, elle aussi, de verdir ses procédés. L’usine a récemment investi pour moderniser ses installations dans une logique de réduction d’émissions. En filigrane de cette visite, une volonté politique de conjuguer réindustrialisation et transition environnementale.

Hydrogène vert et carburants du futur

Mais Fos-sur-Mer n’en est qu’au début de sa mue. Plusieurs projets en cours dessinent les contours d’une zone industrialo-portuaire bas carbone, à l’instar de GravitHy. Une usine de production de fer réduit à partir d’hydrogène renouvelable, attendue à l’horizon 2027, qui doit permettre de fournir deux millions de tonnes par an de matière première décarbonée aux aciéristes européens. Une alternative aux hauts-fourneaux traditionnels, très émetteurs. Le projet est estimé à 2,2 milliards d’euros, avec 3 000 emplois à la clé (directs et indirects).

Dans le même élan, ArcelorMittal poursuit sa mutation. À Fos, le sidérurgiste a récemment mis en service un four-poche permettant d’intégrer davantage d’acier recyclé. Une première étape, avant un éventuel basculement vers des fours à arc électrique. Objectif affiché : réduire les émissions de CO₂ de 40 % d’ici 2030.

La ZIP de Fos veut aussi s’imposer comme une plateforme de production d’e-carburants. C’est le pari du consortium NeoCarb, qui prévoit deux unités de fabrication de méthanol et kérosène de synthèse à partir d’hydrogène vert et de CO₂ capté, destiné à verdir les transports maritimes et aériens. Ou encore le projet Deos, piloté par le Grand Port Maritime de Marseille, qui prépare l’accueil de la filière éolienne flottante en Méditerranée.

Autre chantier emblématique : la gigafactory de panneaux photovoltaïques portée par Carbon, qui prévoit une montée en puissance rapide sur le site de Fos pour soutenir la relocalisation de la filière solaire en France.

À ces projets industriels s’ajoute une volonté politique de structurer une filière locale, capable de produire, stocker et distribuer l’hydrogène, demain indispensable à l’industrie et à la logistique.

Autant d’initiatives qui convergeront dès le lendemain, mardi 25 mars, dans un événement régional consacré à l’hydrogène, organisé à Marseille, avec Meet4hydrogen. Chercheurs, industriels et élus y discuteront du rôle central de ce vecteur énergétique dans la décarbonation du tissu local.

Si Fos-sur-Mer devient lentement un laboratoire d’industrie post-carbone les obstacles restent nombreux : coûts élevés, complexité des raccordements, inertie administrative… Les syndicats, que les ministre va rencontrer à huis clos, alertent eux sur les risques de « transition punitive » pour les salariés.

N.K