[Vox Méridional] Accords franco-algériens : une adoption symbolique qui résonne jusqu’à Marseille

30 octobre 2025, par 185 voix contre 184, l’Assemblée nationale a adopté ce jeudi une proposition de résolution du Rassemblement national visant à « dénoncer » les accords franco-algériens du 27 décembre 1968, qui encadrent depuis plus d’un demi-siècle la circulation, le séjour et l’emploi des ressortissants algériens en France. Un texte avant tout symbolique, sans effet juridique immédiat, mais qui constitue la première victoire parlementaire du groupe dirigé par Marine Le Pen, acquise grâce à quelques ralliements venus d’autres bancs.


Un symbole politique fort, un contexte explosif

Cette adoption survient dans un climat diplomatique déjà fragile entre Paris et Alger. Si de nombreux responsables politiques, y compris au sein de la majorité, reconnaissent la nécessité d’une révision ou d’une actualisation des accords, la démarche du RN portée par un discours de « rupture » soulève autant d’applaudissements que d’inquiétudes.
Car les accords de 1968, signés à une époque où la France et l’Algérie cherchaient à reconstruire un lien post-colonial, ont longtemps constitué un socle de coopération et de reconnaissance mutuelle. Leur remise en question, même symbolique, interroge : faut-il y voir un simple signal politique ou le prélude à un changement plus profond dans les relations bilatérales ?

Marseille, au cœur d’une histoire partagée.

La cité phocéenne entretient avec l’Algérie des liens humains, économiques et culturels indissolubles. Des milliers de familles, de part et d’autre de la Méditerranée, partagent ici une histoire commune, faite de mémoire, de labeur et d’attachement à deux rives. Remettre en cause, même symboliquement, le cadre juridique issu de 1968 revient donc à toucher un équilibre sensible. Beaucoup de marseillais d’origine algérienne où pas, voient dans ces accords non pas un privilège, mais une reconnaissance historique. D’autres, au contraire, estiment qu’ils ne correspondent plus à la réalité contemporaine des flux migratoires et appellent à une mise à jour équitable, respectueuse des deux nations.

Entre mémoire et avenir

S’il est vrai que la révision des accords était depuis longtemps évoquée et même consentie par les deux parties, le contexte politique actuel, marqué par les crispations identitaires et les tensions diplomatiques, liées à l’incarcération de l’écrivain franco algérien Boualem Sansal rend cette question d’autant plus délicate.
La France et l’Algérie, plus que jamais, ont besoin de dialogue et de lucidité, loin des postures et des symboles électoraux. Pour Marseille, ville-monde, porte ouverte sur la Méditerranée, cette actualité rappelle combien son identité demeure liée à cette histoire commune complexe, douloureuse parfois, mais aussi féconde et indissociable de son âme.

Philippe Arcamone