Aix-Marseille-Provence renforce son positionnement international. Avec la signature d’un partenariat entre Provence Promotion et CCI France International, le territoire entend capter de nouveaux investissements étrangers, en particulier en provenance d’Inde, et s’affirmer comme une plateforme stratégique entre l’Asie, l’Europe et l’Afrique.
C’est une signature discrète, mais lourde de conséquences pour l’avenir économique de la Provence. Ce lundi 28 avril, à Marseille, Provence Promotion et la CCI France International (CCIFI) ont paraphé un protocole d’accord destiné à renforcer l’attractivité du territoire sur la scène mondiale.
Cette convention permettra de mobiliser le réseau des 120 Chambres de commerce françaises présentes dans 95 pays, afin de promouvoir le territoire provençal auprès des investisseurs étrangers.
Dans cette stratégie, l’Inde occupe une place centrale, renforcée par l’inauguration en février dernier, du tout premier consulat général d’Inde en France hors Paris, par le Premier ministre indien Narendra Modi et Emmanuel Macron, signe d’une reconnaissance politique forte.
Un travail de longue haleine pour bâtir la confiance
La dynamique actuelle trouve ses racines dans une rencontre décisive. Il y a quatre ans, Bernard Deflesselles, ancien député (LR) et faisait la connaissance d’un ambassadeur indien « très pro-business », un profil rare selon le vice-président de la commission Stratégie de développement économique de la Métropole.
Rapidement invité à Marseille, le diplomate ouvrait les portes du patronat indien aux acteurs économiques provençaux. Une première mission économique organisée sur place, il y a environ deux ans, posait les bases d’une collaboration durable.
Depuis, la stratégie s’est affinée. Chaque année, Provence Promotion organise entre 600 et 700 rendez-vous d’affaires, dont 30 à 60 en face-à-face avec des décideurs économiques indiens.
« Ce qui compte aujourd’hui, ce n’est pas d’annoncer des chiffres spectaculaires en matière d’emplois créés, mais de construire patiemment un tissu relationnel solide », souligne Christophe Perez, responsable de la promotion économique. L’approche est pragmatique : la volumétrie d’investissements suivra naturellement une fois les réseaux installés.
Un écosystème calibré pour séduire l’Inde
Marseille avance aujourd’hui des arguments tangibles pour attirer l’attention des industriels indiens. Le port Marseille-Fos, capable d’absorber 1,5 million de conteneurs supplémentaires sans modification majeure des infrastructures existantes, représente un atout stratégique. Dans un contexte où l’Inde prévoit de porter ses échanges maritimes à 20 millions de conteneurs par an d’ici quatre ans. Cette capacité est observée avec intérêt.
La filière numérique constitue un second levier. Reliance Jio Infocomm, numéro 3 dans le secteur des télécommunications, a choisi Marseille pour l’arrivée de ses nouveaux câbles sous-marins transcontinentaux (India-Europe-Xpress (IEX). Des discussions sont également en cours pour développer des projets conjoints dans le domaine de l’intelligence artificielle, au-delà de l’infrastructure numérique.
Cette capacité à connecter les marchés n’est pas seulement technique. Le territoire joue aussi sur sa situation méditerranéenne pour se proposer comme une tête de pont vers l’Afrique, un continent que l’Inde souhaite mieux pénétrer. « Passer directement de l’Inde à l’Afrique est compliqué culturellement et économiquement. À Marseille, nous avons les réseaux et les codes pour faciliter cette transition », insiste Bernard Deflesselles.
L’effet d’entraînement du projet IMEC
La signature du partenariat s’inscrit aussi dans un contexte international plus large. Lors de leur visite en février, Emmanuel Macron et Narendra Modi ont acté l’importance stratégique du projet IMEC (India-Middle East-Europe Economic Corridor), qui doit relier Bombay à l’Europe via le Moyen-Orient, avec Marseille comme l’une des portes d’entrée principales.
Le président de la République n’a pas caché ses ambitions : faire de Marseille un hub majeur des nouveaux flux commerciaux mondiaux. Le port de Marseille – Fos, mais aussi la connectivité numérique, les projets énergétiques euro-méditerranéens et le développement du fret ferroviaire Marseille-Lyon s’intègrent dans cette vision d’ensemble.
En visio, Payal Kanwar, directrice générale de la CCI France-Inde, a tenu à saluer le partenariat signé ce lundi matin. En juillet dernier, lors d’une learning expedition en Provence, elle avait pu constater « la richesse de l’écosystème économique régional et les opportunités qu’il offre aux investisseurs indiens ».
Elle a également annoncé l’organisation, dès décembre prochain, d’une délégation économique indienne à Marseille pour poursuivre l’exploration des synergies possibles. « Avec l’ouverture du Consulat général et le projet IMEC, nous avons devant nous une dynamique formidable portée par une volonté commune de bâtir des ponts économiques solides entre l’Inde et Marseille », a-t-elle déclaré.
Une stratégie d’internationalisation méthodique
Au-delà de l’Inde, la signature de ce partenariat traduit une volonté plus large de systématiser l’action internationale de la métropole. Provence Promotion participera aux Learning Expeditions internationales, organisera des missions de prospection ciblées au Moyen-Orient et en Chine, et s’appuiera sur le réseau mondial des CCI FI pour toucher de nouveaux investisseurs.
Six filières prioritaires ont été identifiées : le numérique, l’énergie, l’aéronautique/défense, la logistique maritime, la santé et le tourisme.
Avec l’Inde en partenaire dans cette dynamique, Aix-Marseille-Provence entend consolider son rôle de carrefour stratégique entre l’Europe, l’Asie et l’Afrique. Un positionnement qui s’inscrit dans les grandes manœuvres internationales pour redessiner les routes du commerce mondial.
Narjasse Kerboua