Benoît Payan : le maire cata-plasme de Marseille

Certains élus de la ville évoquent sous le manteau « une fraternelle intrusive » qui n’a rien de maçonnique. D’autres se contentent de citer un chiffre ahurissant : celui du nombre d’agents municipaux de la ville de Marseille qui atteint désormais 17 000 ! Benoît Payan n’en fait pas mystère puisqu’il a félicité les « 17 000 agents qui tiennent la ville sur leurs épaules ». Certes. Mais pour faire quoi ?

Les compétences légales de la municipalité sont squelettiques au regard de ce qu’elles étaient jadis : cantines scolaires, état-civil, entretien des écoles, fonctionnement des musées et des cimetières. Le reste est à la charge de la Métropole. La gestion de ce personnel pléthorique est d’autant moins aisée que Benoît Payan, fervent adepte de la chasse aux sorcières, a viré une grande partie des cadres de la mairie pour y placer des fonctionnaires à sa dévotion. Cette éviction de techniciens compétents et expérimentés au profit d’idéologues sectaires de gauche a pour conséquence fâcheuse une administration délirante de la ville.

Payan est un maire « cataplasme » parce qu’il est obligé d’être une bonne pâte entre des individus que tout sépare dans sa majorité hétéroclite : les socialo-communistes installés et accommodants et, d’autre part, les écolo-gauchistes « qui veulent du passé faire table rase ». C’est lui, Payan, fils de Roger, le menuisier des « Platanes » à Saint-Giniez, qui s’épuise à faire le lien entre toutes ces composantes pour soulager les inflammations idéologiques et les prurits personnels. Il passe des heures et des heures dans des palabres interminables pour prendre une décision qui emporte l’adhésion de tous. Et quand c’est fini, ça recommence…

Le maire-potiche 

Payan n’est pas le patron. C’est un maire-potiche qui recolle les morceaux d’une majorité de bric et de broc. « Il est aspiré par sa gauche, il ne peut rien faire seul, commente le conseiller municipal LR Didier Réault, quand il croit enfin être parvenu à un consensus, un de ses adjoints revient à la charge et c’est reparti pour un tour. Le maître-mot de sa politique, c’est la procrastination : on remet tout au lendemain et il se perd en palinodies pour masquer son impuissance ». Payan a beau être le principe actif qui traverse le tissu politique marseillais pour agir sur les zones endolories, il se transforme souvent en maire-couleuvre pour avaler toutes les sornettes et se complaire au final dans les sinuosités improbables de l’immobilisme.

Le maire mascarade 

« L’accession au pouvoir municipal de Payan est le fruit d’une abstention record liée à l’appréhension du Covid et aux divisions de la Droite », commente sobrement Guy Teissier, le seul qui avait l’expérience et l’envergure nécessaires pour gouverner Marseille, mais qui n’a pas été franchement aidé par Gaudin. Les électeurs ont voté majoritairement pour une femme écologiste qui leur semblait incarner la fraîcheur d’un renouvellement politique et ils se retrouvent avec un apparatchik du parti socialiste nourri depuis le berceau aux roueries des frères Guérini…

Cette arnaque électorale, d’autres ont évoqué un « hold-up démocratique », aurait donné lieu à un retentissant scandale national si des hommes de droite s’étaient permis le quart de la moitié d’une telle escroquerie !

Le maire-sucre d’orge 

Payan n’a pas son pareil pour apaiser les dissensions au sein de sa majorité baroque. C’est un équilibriste qui joue les funambules en permanence pour concilier les points de vue inconciliables des socialistes, des communistes, des Mélenchonistes, des Fauristes, des écolos et des gauchistes. Il promet des sucres d’orge aux uns et aux autres dans un climat d’ambiguïté permanent.

Le maire de l’incantation 

Payan, c’est le maire des formules magiques et des hameçons démagogiques destinés à séduire ses alliés et à faire taire l’opposition. C’est un beau parleur qui jubile lui-même de sa propre éloquence. Il est malin comme un singe et rusé comme un renard. Il veut faire de Marseille le premier port des immigrés clandestins en Europe : les gauchistes se pâment. Il débaptise l’école Thomas-Robert Bugeaud située au cœur de son fief électoral cantonal pour la rebaptiser du nom de Ahmed Litim, du nom d’un vaillant tirailleur algérien mort en août 1944 lors de la libération de Notre Dame de la Garde. C’est une faute politique majeure et un nouveau clin d’œil aux fans de l’immigration de sa majorité qui veulent transformer Marseille en Beyrouth. Le général Bugeaud est un authentique héros de guerre français qui ne méritait pas une telle dégradation et le nom d’Ahmed Litim aurait pu être donné à une autre école inaugurée récemment dans les quartiers sud.

De même lorsque Payan organise une pétition pour protester contre l’accostage des bateaux de croisière à Marseille, c’est pour donner des gages anti-pollution atmosphérique à ses alliés écolos.

Et pourquoi croyez-vous qu’il ait tant ralenti les autorisations de permis de construire après avoir voté toutes celles proposées par Jean-Claude Gaudin ? Parce qu’il faut bien calmer les ardeurs révolutionnaires de son aile gauchiste, ce qui inquiète la filière du bâtiment, pourtant grosse pourvoyeuse d’emplois, et indigne les promoteurs qui connaissent les carences de la ville en matière de logements sociaux.

Le maire-Dalida 

Quand on a vu Samia Ghali être à tu et à toi avec le président de la République alors que Benoît Payan, lui, prenait ses distances avec Emmanuel Macron pour ne pas offusquer ses alliés gauchistes, on s’est dit que la pasionaria des quartiers nord était la nouvelle favorite de Macron et qu’elle pourrait damer le pion à Payan. « On discute avec Payan, on ne contredit pas Samia. La patronne, c’est elle », confirme un promoteur.

Il est vrai que Payan a l’habileté d’anticiper les disgrâces présidentielles et qu’il a un talent fou pour marcher sur des œufs, à l’instar de son célèbre mentor, Gaudin, qui savait maîtriser ses turbulents alliés RPR avec la seule magie du verbe.

 « Il fait des promesses mais n’en tient aucune, constate Guy Teissier, il ménage la chèvre et le chou alors que les caisses de la ville sont vides et que sa marge de manœuvre est quasiment nulle. Il a promis qu’il n’y aurait pas d’augmentation des impôts et il n’a rien trouvé de mieux que d’augmenter sans le moindre scrupule la taxe foncière de 14 % ! »

Des mots, toujours des mots, rien que des mots : Payan est un maire-Dalida. Le président de la République a lancé en grande pompe le plan « Marseille en grand » de rénovation des écoles insalubres avec des centaines de millions d’euros à la clef. Savez-vous comment ce programme de rénovation se traduit concrètement pour l’instant ? Par l’inauguration spectaculaire d’écoles où l’on s’est contenté d’ôter la croûte de goudron pour permettre une meilleure perméabilité des sols…Peut-être faudrait-il rebaptiser ce plan « Marseille en petit », ou bien « Marseille au ras du sol » ?

Le maire-manœuvrier 

Il reste trois ans à Benoît Payan pour écarter de sa majorité les écolos-dingos qui le harcèlent et les remplacer par des centristes, seuls garants d’une éventuelle réélection. Dans cet objectif, il pourrait imiter Gaston Defferre en construisant une majorité socialo-centriste qui le débarrasserait enfin de ses encombrants alliés et de leurs chimères. C’est un habile manœuvrier et un séducteur de souche napolitaine, donc il peut y parvenir sans trop paraître se renier ni compromettre ce qu’il est : un petit prince de l’ambiguïté.

Cette version d’un retour vers le futur est démentie par certains adjoints de Payan qui « reste un maire très attaché à l’union de la Gauche » et n’est pas près de composer avec la droite. Les diverses facettes de ce maire protéiforme suscitent de nombreuses interrogations et la déception gagne du terrain, forcément : « Je crois en Benoît Payan mais pour l’instant je suis déçu, renâcle un entrepreneur proche du Printemps marseillais. Avec l’intelligence et le talent qu’il a, il faut qu’il fasse tout péter. J’aimerais revoir la fougue du premier opposant qu’il a été. On croyait voir un tribun, on hérite d’un Hollande… »

C’est mal barré pour cet histrion politique qui a trouvé dans la politique un exutoire idéal au divorce de ses parents et au déchirement qu’il suscite parfois dans un cœur d’enfant. Le PS c’est sa famille. Il le prouve quand il refuse obstinément d’expulser des immigrés clandestins qui squattent des bâtiments industriels dans les quartiers nord, comme si pour lui le droit de propriété (inscrit dans la Déclaration des Droits de l’Homme) n’existait pas. « Ils sont chez eux chez nous », estime Payan.

En attendant une meilleure conjoncture politique, Payan tourne en rond dans son bureau en discutant avec son alter ego, Arnaud Drouot, son directeur de cabinet et confident, le nouveau Claude Bertrand de la mairie de Marseille. Ils échafaudent ensemble leurs plans de communication, le seul domaine où ils excellent .

José D’Arrigo

Rédacteur en Chef du « Méridional »