L’insupportable «ensauvagement» des «rageux» du football français

© OM English / Twitter

Le gouvernement a décidé de se saisir du problème de la violence dans les stades et autour des stades. Il est temps. « L’ensauvagement » ne touche pas que les banlieues hostiles, il touche aujourd’hui les stades de plein fouet.

Insupportable la vision de Dimitri Payet à terre et se tenant la tête après avoir reçu une bouteille d’eau lancée par un taré depuis la tribune des « Bad Gones » à Lyon.

Insupportable la pusillanimité des autorités préfectorales, arbitrales et de la Ligue de football qui se renvoient la patate chaude pour s’exonérer de toute responsabilité. On croirait avoir affaire à des enfants turbulents qui se chamaillent : « C’est pas moi, c’est l’autre ».

Insupportable l’idée d’en être réduit à protéger les tireurs de corners à l’aide de boucliers brandis par des gorilles autour du joueur.

Insupportables les palinodies grotesques du président lyonnais Jean-Michel Aulas, par ailleurs excellent gestionnaire, qui militait avant le match pour un retrait de points à l’encontre des clubs coupables d’éventuels débordements de leurs supporters et qui n’est plus du tout de cet avis dès lors que ce sont ses propres fans qui sont les fauteurs de troubles…

Insupportable la passivité délibérée des dirigeants du football français qui ferment les yeux sur l’ensauvagement des « rageux », ces pseudo-supporters enragés qui viennent se défouler au stade de leurs frustrations accumulées.

Faut-il rappeler aux instances du football que les actes délictueux se multiplient autour des stades et que les sanctions sont dérisoires ? Le 8 août, c’est Valentin Rongier qui a été atteint par un projectile à Montpellier alors qu’il célébrait un but de l’OM. Le club local n’a fait l’objet que d’une sanction minimale (fermeture de deux tribunes pour trois rencontres).

Le 22 août, bis repetita, c’est Dimitri Payet qui est touché à Nice par une bouteille d’eau puis agressé par un forcené alors qu’il s’apprêtait à tirer un corner. Là aussi, sanctions dérisoires à l’encontre de l’Olympique Gymnaste Club de Nice : retrait de deux points et un huis clos total. Pas de quoi dissuader l’écervelé qui déshonore les vrais supporters niçois.

Le 18 septembre, c’est le match Lens-Lille qui dégénère : les supporters lensois, d’ordinaire plus disciplinés et mieux inspirés, envahissent le terrain pour en découdre avec leurs homologues lillois. Là aussi, croit-on vraiment que les retraits de points avec sursis et les matches à huis clos peuvent empêcher les « rageux » nordistes de récidiver ?

Le 22 septembre à Angers, ce sont les supporters marseillais qui sont agressés par des Angevins et qui sortent du « parcage à bestiaux » dans lequel ils sont cantonnés pour répliquer. Sanction ridicule : un point de retrait avec sursis. Le 22 octobre, ce sont les supporters stéphanois scandalisés par le pitoyable classement de leur équipe, qui pénètrent sur le terrain pour mettre le feu et détruire les filets…

Le 24 octobre à Marseille pour la venue du Paris Saint-Germain, c’est un festival de fumigènes dans les tribunes et des projectiles sont lancés sur les joueurs. L’OM écope d’un match à huis clos total pour la venue de Troyes le 28 novembre. Insupportable crétinerie.

Insupportables les atermoiements des arbitres professionnels qui sont déjà très médiocres dans leurs appréciations des fautes et font preuve d’une incroyable clémence à l’égard des « charcleurs », « camphreurs » et autres tackleurs fous du championnat qui ne sont sanctionnés d’un carton qu’à la quatrième ou cinquième agression…

Insupportable le chauvinisme ébouriffant de certains journalistes qui, au lieu de commenter les matches avec l’impartialité liée à leur fonction, s’égosillent au micro comme des supporters acharnés de l’OM ou de Paris. Savent-ils au moins que les vrais supporters marseillais ont toujours encouragé l’équipe la plus faible sur le terrain ?

Insupportable le cinéma en technicolor de certains joueurs qui se livrent à des « Neymarades » en roulant sur eux-mêmes et en hurlant de douleur au moindre choc pour influencer l’arbitre et qui courent comme des lapins deux minutes plus tard.

Insupportables ces attaquants qui sont envoyés au charbon sur une ouverture trop longue ou mal dosée et qui remercient leur coéquipier fautif en levant le pouce à distance pour lui signifier leur gratitude alors qu’ils auraient plutôt envie de l’étrangler !

Insupportables ces hors-jeu sifflés pour un orteil qui dépasse alors que le mouvement de jeu collectif était magnifique et souvent ponctué par un but. Que fait-on du fairplay ? Que fait-on de l’esprit du jeu ?

Insupportables ces entrepreneurs de télévision qui monopolisent à prix d’or la diffusion des matches de Ligue 1 et imposent chaque année aux fans de foot un nouveau réabonnement… quand ils ne font pas faillite.

Insupportables les magouilles et autres rétro-commissions qui entourent certains transferts de joueurs et ces dirigeants voltigeurs qui passent sans encombres de Lille à Bordeaux après avoir laissé des ardoises astronomiques…

Insupportables les interventions arbitrales qui vont contre le cours du jeu : par exemple, lorsqu’un défenseur qui veut laisser sortir le ballon – acte d’antijeu – commet une obstruction grossière contre un attaquant qui veut récupérer la balle, il devrait être sanctionné et ce n’est jamais le cas. Lorsqu’un gardien de but dont l’équipe mène au score multiplie les gains de temps en s’allongeant sur le sol ou en conservant la balle dans les mains plus de six secondes – ce qui est interdit en principe – il n’est jamais sanctionné d’un coup-franc dans la surface.

Voilà pourquoi de nombreux passionnés sont lassés de toutes ces singeries et ne mettent plus les pieds au stade. Ils préfèrent aller voir jouer leurs enfants ou leurs petits-enfants et se régalent à les voir évoluer dans une ambiance familiale. Tel est mon cas au stade Jean-Bouin. Mon petit-fils Pierre est gardien de but de l’équipe 2 du Smuc en U 11 et je prends un plaisir fou à le voir s’amuser sur le terrain en respectant ses adversaires et ses partenaires… surtout lorsqu’ils gagnent et chantent à tue-tête le fameux « tchik-a-tchik-a-tchik-aïe-aïe-aïe » en se tenant par les épaules…

Le foot pro devrait s’inspirer de l’exemple de ces petits clubs amateurs qui font des merveilles avec des bouts de ficelles. Il est vrai que la section foot du Smuc est dirigée de main de maître par Romain Verron, Eric Touboul, Michel Khlat, Johann Piccamiglio entourés d’entraîneurs dévoués et compétents, de véritables éducateurs dans l’âme comme M’Baye Fall et Thomas Asinari – fils de l’ancien olympien Jean Louis Asinari – qui font honneur au football, à Marseille et à la France.

José D’Arrigo, rédacteur en chef du Méridional