[Vox Méridional]La justice contraint la Ville de Marseille à reprogrammer le film catholique Sacré-Cœur : un revers pour la municipalité

Marseille : Le tribunal administratif a ordonné à la mairie de reprogrammer les projections du film catholique “Sacré-Cœur, son règne n’a pas de fin”, annulées par la Ville au nom de la laïcité. Une décision judiciaire qui relance le débat sur la liberté culturelle et la neutralité des institutions publiques


Quelques jours après l’annulation par la municipalité de la diffusion du film Sacré-Cœur au Château de La Buzine, la justice a tranché. Dans une ordonnance rendue ce samedi 25 octobre, le tribunal administratif de Marseille a estimé que la Ville avait enfreint la loi en interdisant la projection d’un film pour des motifs idéologiques. Le juge a donc contraint la mairie à reprogrammer les séances initialement prévues jusqu’au 28 octobre dans ce cinéma municipal du 11ᵉ arrondissement.

Une annulation jugée « illégale »

Saisie en urgence la justice a reconnu une atteinte « grave et manifestement illégale » à la liberté d’expression et de création artistique. Dans son ordonnance, le juge rappelle que « la loi de 1905 sur la séparation des Églises et de l’État ne saurait être invoquée pour interdire une œuvre cinématographique, dès lors qu’elle ne constitue pas un acte de culte ». En d’autres termes, un film à thématique religieuse ne saurait être assimilé à une manifestation confessionnelle.

La mairie embarrassée, l’opposition triomphante

La mairie embarrassée, l’opposition triomphante
Du côté de la mairie, dirigée par Benoît Payan (divers gauche), la décision tombe comme un revers cinglant. La municipalité se retranche derrière une interprétation stricte de la laïcité : « Nous avons voulu éviter toute confusion entre expression religieuse et programmation municipale », explique l’entourage du maire, tout en affirmant « respecter la décision du tribunal ».
Mais pour l’opposition, c’est une victoire symbolique. « Marseille n’a pas à être le laboratoire d’une laïcité punitive »
Les réalisateurs saluent « la victoire du bon sens »
Les réalisateurs, présents à l’audience, ont salué « une victoire du bon sens et de la liberté artistique ». Selon eux, le film, qui retrace l’histoire du Sacré-Cœur à travers le regard de plusieurs témoins contemporains, « n’est pas une œuvre prosélyte, mais un hommage à une tradition spirituelle qui a marqué l’histoire de France ». Ils ont également remercié les nombreux Marseillais qui les ont soutenus sur les réseaux sociaux, où la polémique n’a cessé d’enfler depuis une semaine.

La laïcité, un principe en tension

Cette affaire, au-delà de son aspect juridique, remet une fois encore sur le devant de la scène la question de la laïcité à Marseille. Dans une ville où les trois grandes religions monothéistes se côtoient dans tous les quartiers, la frontière entre neutralité publique et diversité culturelle demeure fragile. Pour plusieurs observateurs, la décision du tribunal vient rappeler que la laïcité n’est pas une interdiction des religions, mais une garantie de leur coexistence pacifique dans l’espace public.

Un épilogue judiciaire, mais un débat ouvert

Les projections de Sacré-Cœur reprendront donc au Château de La Buzine, conformément à la décision de justice. Mais au-delà du film, c’est toute une réflexion sur l’interprétation du principe républicain de laïcité qui se trouve relancée. Marseille, fidèle à son histoire et à sa diversité, devra une fois de plus trouver l’équilibre entre ses racines spirituelles et sa vocation d’ouverture. Le débat, lui, ne fait que commencer.


Philippe Arcamone