[Vox Méridional]Polémique autour du film Sacré-Cœur : la laïcité mise à l’épreuve à Marseille

Marseille, ville de contrastes et de dialogues, se retrouve au cœur d’une tempête politico-culturelle. L’annulation de la projection du film Sacré-Cœur au Château de la Buzine, décidée par la municipalité, a suscité une vive émotion parmi les marseillais et relancé le débat sur la laïcité et la liberté d’expression artistique.


Une décision municipale controversée

Selon la ville de Marseille, la décision d’interdire la projection repose sur un principe simple : « la loi ne permet pas qu’un film de nature confessionnelle soit projeté dans un équipement municipal ». Pour le maire Benoît Payan, il s’agit de défendre une laïcité stricte et de garantir la neutralité des lieux publics.
Mais cette justification ne convainc pas tout le monde.
« Le maire de Marseille multiplie les erreurs au Château de la Buzine, le Château de ma Mère », dénoncent Sylvain Souvestre ainsi que plusieurs élus d’opposition. « Après avoir chassé Marcel Pagnol, il censure le film Sacré-Cœur au nom d’une laïcité idéologique. Incompréhensible pour les Marseillais ! »

Le diocèse appelle à l’apaisement


À La Ciotat, la nouvelle a provoqué une onde de choc. Une cellule de crise a été ouverte en mairie pour accompagner les familles des victimes. La ville s’incline devant la douleur des familles et des proches des victimes de la ville, de France et du Bénin. « La Ciotat se place d’ores et déjà aux côtés des familles pour apporter toute l’aide qu’elle jugera nécessaire », a déclaré le maire, Alexandre Doriol, dans un communiqué. Le ministère français des Affaires étrangères n’avait pas encore publié de réaction officielle mardi matin.

Des bénévoles exemplaires

Face à la polémique, le diocèse de Marseille a publié un communiqué apaisant : « Le diocèse de Marseille a été interpellé par de nombreux fidèles quant à l’annulation de la projection du film Sacré-Cœur à la Buzine. Face à l’émotion suscitée, nous rappelons que le film reste à l’affiche du Pathé Madeleine, où il rencontre un large public. Tous les fidèles qui le souhaitent peuvent donc s’y rendre. » Le diocèse remercie par ailleurs le maire « pour son honnêteté et la constance de ses idées », tout en soulignant que Marseille demeure la première ville au monde consacrée au Sacré-Cœur un symbole fort de son histoire spirituelle.

Le réalisateur dénonce une censure idéologique

De son côté, le réalisateur du film n’a pas mâché ses mots. Selon lui, la décision municipale traduit « une volonté d’effacer notre histoire judéo-chrétienne » et relèverait davantage d’une stratégie politique que d’un principe républicain.
Sur les réseaux sociaux, il accuse le maire de céder « à un électorat d’extrême gauche immigrationniste et musulman radical », et appelle les électeurs à « défendre les racines et la culture de la France ».

Une ville habituée au dialogue interreligieux

Dans un contexte où Marseille s’est toujours distinguée par sa capacité à faire cohabiter les religions et les cultures, cette affaire divise. Faut-il y voir une application rigoureuse du principe de laïcité, ou une dérive vers une forme d’exclusion symbolique ? La question mérite d’être posée, tant la cité phocéenne a souvent su conjuguer foi, liberté et tolérance.
Entre laïcité et liberté culturelle : un équilibre fragile.
L’affaire Sacré-Cœur illustre la difficulté, pour les collectivités locales, de tracer la frontière entre neutralité républicaine et censure. Marseille, ville des noyaux villageois et des clochers, du Mucem et des « cités monde », reste un laboratoire vivant du « vivre ensemble ». Mais dans ce débat, une chose est sûre : la laïcité, loin d’être une arme, devrait rester un pont celui du respect mutuel et du dialogue, valeurs que Marseille a toujours su porter avec fierté.

Philippe Arcamone