Municipales 2026 : l’Assemblée nationale vote pour un changement du mode de scrutin à Marseille

L’Assemblée nationale a adopté en première lecture la réforme du mode de scrutin municipal dans les trois plus grandes villes françaises. Une nouvelle étape pour ce texte controversé, qui prévoit deux scrutins distincts et remet en cause le système instauré par la loi PLM de 1982. Le Sénat pourrait encore tout enrayer.

La proposition de loi visant à réformer le scrutin municipal à Paris, Lyon et Marseille a passé le cap de l’Assemblée nationale. Votée à 183 voix contre 53, elle entérine un tournant démocratique majeur.

À l’avenir, les électeurs ne voteront plus seulement pour des listes dans leur arrondissement ou leur secteur, mais également pour des listes à l’échelle de toute la ville, désignant les conseillers municipaux qui éliront ensuite le maire. Deux urnes, un même jour, pour deux élections distinctes : c’est la grande nouveauté.

Un vote transpartisan… mais loin du consensus

Le texte, porté par les députés parisiens Renaissance Sylvain Maillard et David Amiel, a obtenu le soutien d’une majorité de la Macronie, mais aussi de députés LFI et RN.

Une alliance inattendue qui n’a pas suffi à masquer les divisions profondes. Chez Les Républicains comme au PS, les voix se sont éparpillées. Écologistes et communistes ont voté contre en bloc.

L’argument central des promoteurs : rétablir une équité démocratique. « Un électeur, une voix », martèle Sylvain Maillard, pointant un système hérité de la loi PLM qui dilue la légitimité du maire dans des arrangements de majorité sectorielle. Pour ses opposants, cette réforme menace un équilibre local subtil et mine la démocratie de proximité.

Proximité contre lisibilité : la fracture

Dans l’Hémicycle, les critiques ont fusé. À gauche, Emmanuel Grégoire, socialiste et prétendant à l’Hôtel de Ville de Paris, accuse le texte de vouloir « euthanasier les arrondissements ». Même tonalité chez Céline Hervieu (PS), qui dénonce une « loi improvisée » au service d’intérêts électoraux. Olivier Marleix (LR) y voit une « attaque frontale » contre la représentation locale.

Pour les soutiens de la réforme, ces réactions relèvent du réflexe conservateur. « Le système est à bout de souffle », rétorque Maillard, dénonçant des villes « divisées » par des découpages électoraux absurdes. Du côté de LFI, Nathalie Oziol soutient une démarche qui vise à clarifier la responsabilité démocratique à la tête des grandes villes.

Même son de cloche à Marseille, où le député PS Laurent Lhardit estime que « faire élire directement le conseil municipal par les citoyens permettrait de créer des majorités claires et stables, renforçant ainsi la gouvernance locale. C’est le moment de donner aux Marseillais une voix plus forte dans les décisions politiques ! »

La droite marseillaise qui s’oppose à cette modification dénonce toujours un scrutin complexe et inutile. Martine Vassal ne cache pas ses réserves. Pour la présidente (DVD) du Département et de la Métropole Aix-Marseille-Provence « changer le mode de scrutin à quelques mois d’une échéance aussi importante n’est jamais un signe de sérénité démocratique. L’empressement est toujours un mauvais conseiller. Parler de simplification alors qu’on passe d’une urne à deux, que le nombre d’élus augmente, doit certainement cacher d’autres motivations. Chaque changement de mode de scrutin entraîne des conséquences aujourd’hui non palpables. »

Une inquiétude partagée par le collectif Une Génération pour Marseille, qui y voit une source supplémentaire de confusion : « Ce vote ne change rien à une triste réalité : cette loi ne simplifie pas le mode de scrutin, elle le complique et ajoute de la confusion démocratique, souligne Romain Simmarano, cofondateur du mouvement. À présent, le Sénat va se prononcer et nous verrons bien s’il cautionne cette parodie de démocratie. Mais ce qui compte, c’est de préparer un projet d’alternance au service des Marseillais, donner de l’espoir à tous ceux qui croient dans Marseille. Et ce, quel que soit le mode de scrutin. »

Un texte qui devra convaincre le Sénat

Après un passage discret en commission en mars, le texte entre, en effet, dans sa phase la plus délicate. L’examen par le Sénat. Et la partie s’annonce rude. Majoritairement opposée à la réforme, la chambre haute avait rejeté une version similaire en 2023, redoutant une recentralisation rampante et un affaiblissement des arrondissements.

Si le texte est rejeté à nouveau, une commission mixte paritaire devra tenter de trouver un compromis. Mais les lignes politiques restent mouvantes, et le temps presse. Le gouvernement vise une mise en œuvre pour les municipales de 2026, un calendrier serré pour une réforme aussi structurante. Pour l’instant, rien n’est gravé dans le marbre. La bataille politique, elle, ne fait que commencer.

L-.R.M.