Sécurité, précarité, mineurs non accompagnés… Dans l’hémicycle départemental, la présidente Martine Vassal charge l’État, qu’elle accuse de se désengager tout en laissant les collectivités locales en première ligne. La gauche grince, la majorité fait bloc.
Le ton est ferme. Dès l’ouverture de la séance plénière du Département des Bouches-du-Rhône, Martine Vassal multiplie les alertes : « L’insécurité n’est plus un sentiment, elle est une réalité. » Sur fond de tensions nationales, la présidente (DVD) déroule un inventaire appuyé : agressions, racisme, antisémitisme. Et pointe la responsabilité d’une immigration « irrégulière » qu’elle juge incontrôlée, notamment à Marseille.
Et si le Département n’a pas la compétence régalienne, il s’active. Vidéoprotection, casernes, soutien aux forces de l’ordre. Depuis 2015, dit-elle, l’engagement est là . Mais voilà , la pression monte et la ligne de crête se précise. La charge est directe : les mineurs non accompagnés (MNA), dit-elle, pèsent « très lourdement » sur les finances départementales. « Nos services sont surchargés par cette immigration irrégulière qui arrive, avec des MNA qui se déclarent mineurs alors qu’ils sont majeurs. »
Les chiffres tombent : 8 millions d’euros en 2015, 66 millions en 2024. Les services sont saturés, les budgets sous pression. Et l’État reste « spectateur. Nous ne pouvons plus accueillir toute la misère du monde », martèle-t-elle, évoquant un afflux incontrôlé et le rôle de certaines associations qui, selon elle, attirent ces publics vulnérables sur le territoire, « en leur disant : ici, vous allez voir, on rase gratis. C’est inacceptable. »
Sur l’immigration, la gauche marque sa distance
Le propos hérisse l’opposition. Sophie Camard, maire (GRS) des 1er et 7e arrondissements, ne partage pas le lien entre immigration et délinquance. Pas question de laisser croire que tout le monde dans l’hémicycle cautionne ce qu’elle considère comme un glissement. « Je ne veux pas qu’on pense ici que tout le monde est d’accord avec ce lien entre insécurité et migrant. »
Martine Vassal ne recule pas d’un mot et riposte car le fait est qu’elle n’a « pas parlé d’immigration, mais d’immigration irrégulière. Ce territoire est multiculturel, et c’est une fierté », dit-elle, revendiquant ses propres racines, tout en appuyant son propos avec les chiffres de la préfecture : « 67% de la délinquance sur la voie publique à Marseille serait le fait d’étrangers. »
Et de s’adresser frontalement à son opposante de gauche : « Que vous ne dénonciez pas cela en tant que maire du centre-ville de la deuxième ville de France, c’est inacceptable. Se voiler les yeux de cette façon-là , c’est dangereux pour Marseille. »

Une majorité solidaire, un État jugé défaillant
Martial Alvarez, maire de Port-Saint-Louis-du-Rhône, monte au créneau. Lui aussi tient à lever l’ambiguïté. Il ne s’agit pas d’un procès contre l’immigration, mais d’un constat sur l’immigration irrégulière. « La distinction est claire », insiste-t-il, pointant une forme d’aveuglement dans le camp d’en face. Pas question, non plus, de laisser douter de l’engagement départemental : « Nous n’avons pas à rougir de notre action. »
Et pour cause. Dans les Maisons de la solidarité, les agents font face à des situations qui dépassent largement leur champ d’intervention, confrontés à des cas psychiatriques, judiciaires, médicaux, sans moyens suffisants. Il pointe les trous béants dans la chaîne de prise en charge. L’insitution tient, mais jusqu’à quand ? Il appelle aussi à une reconnaissance du travail mené sur le terrain et à un soutien accru de l’État.
La question se glisse aussi dans un autre débat, celui des contrats de projet, accusés de précariser les agents. Martine Vassal défend l’outil. Pas idéal, mais fonctionnel. « Ce n’est pas parfait, mais c’est mieux que rien », tranche-t-elle, répondant aux critiques de ses détracteurs : « Je ne vous avais pas entendus contre ces contrats, il y a trois ans. »
PMI itinérante, bus de dépistage gynécologique, maintien des services publics jusque dans les petites communes… La présidente déroule ce que le Département assume. Et rappelle que les Maisons de la solidarité ont dû être sécurisées, car les agents y subissent des agressions. Mais elle insiste sur les inégalités territoriales, qui ne se résorbent pas avec des bonnes intentions. « On doit avoir le choix de vivre où l’on veut. Mais pour cela, il faut des services publics qui suivent. »
Derrière, ce sont les agents départementaux qui encaissent. Ceux que Martine Vassal remercie publiquement, tout en martelant que la coupe est pleine. « On nous demande de faire plus avec moins, mais l’État, lui, n’est pas tenu à l’équilibre budgétaire », glisse-t-elle. Le Département, dit-elle, fait sa part. Aux autres d’en faire autant.
N.K.
