À Fos, l’État vient mesurer l’avancée de la décarbonation industrielle

Marseille, France -27-02-2025: Marc Ferracci, French Minister for Industry and Energy, visits the H 160 and H 175 helicopter production and assembly lines at Airbus Helicopters Marignane
Marc Ferracci en visite, ici en visite, à Airbus Helicopters Marignane.

Le ministre de l’Industrie, Marc Ferracci, est attendu ce lundi sur la zone industrialo-portuaire de Fos-sur-Mer, où se joue une partie essentielle de la transition écologique française. Hydrogène, e-carburants, acier bas carbone… la décarbonation du site est lancée, mais reste semée d’incertitudes.

La carte postale industrielle de Fos-sur-Mer a longtemps été marquée par ses panaches de fumée, ses hauts-fourneaux et ses convois de matières premières. À l’heure du dérèglement climatique, cette image appartient peu à peu au passé.

La décarbonation s’invite désormais dans tous les discours, et l’État entend le démontrer à travers la visite du ministre de l’Industrie, Marc Ferracci, ce lundi 24 mars. Car entre la Méditerranée et la Crau, se joue l’un des plus grands défis de la politique industrielle française.

Fos-sur-Mer concentre à elle seule plus de 10 % des émissions de gaz à effet de serre de l’industrie nationale. Réduire cette empreinte, sans délocaliser l’activité ni sacrifier l’emploi, suppose une réinvention en profondeur du modèle. Et plusieurs projets d’envergure sont déjà à l’œuvre.

Acier vert, chimie bas carbone…

Le déplacement du ministre se veut une démonstration de soutien aux industriels qui amorcent ce virage. Il visitera l’aciérie Marcegaglia, anciennement Ascométal, rachetée en 2024 par le groupe italien avec l’aide de l’État. Plus de 300 emplois ont été sauvés. Le site s’inscrit dans une stratégie de revitalisation de la sidérurgie, en lien avec l’ambition européenne d’une industrie lourde plus verte.

L’après-midi, Marc Ferracci se rendra sur le site de Kem One, où la chimie lourde tente, elle aussi, de verdir ses procédés. L’usine a récemment investi pour moderniser ses installations dans une logique de réduction d’émissions. En filigrane de cette visite, une volonté politique de conjuguer réindustrialisation et transition environnementale.

Hydrogène vert et carburants du futur

Mais Fos-sur-Mer n’en est qu’au début de sa mue. Plusieurs projets en cours dessinent les contours d’une zone industrialo-portuaire bas carbone, à l’instar de GravitHy. Une usine de production de fer réduit à partir d’hydrogène renouvelable, attendue à l’horizon 2027, qui doit permettre de fournir deux millions de tonnes par an de matière première décarbonée aux aciéristes européens. Une alternative aux hauts-fourneaux traditionnels, très émetteurs. Le projet est estimé à 2,2 milliards d’euros, avec 3 000 emplois à la clé (directs et indirects).

Dans le même élan, ArcelorMittal poursuit sa mutation. À Fos, le sidérurgiste a récemment mis en service un four-poche permettant d’intégrer davantage d’acier recyclé. Une première étape, avant un éventuel basculement vers des fours à arc électrique. Objectif affiché : réduire les émissions de CO₂ de 40 % d’ici 2030.

La ZIP de Fos veut aussi s’imposer comme une plateforme de production d’e-carburants. C’est le pari du consortium NeoCarb, qui prévoit deux unités de fabrication de méthanol et kérosène de synthèse à partir d’hydrogène vert et de CO₂ capté, destiné à verdir les transports maritimes et aériens. Ou encore le projet Deos, piloté par le Grand Port Maritime de Marseille, qui prépare l’accueil de la filière éolienne flottante en Méditerranée.

Autre chantier emblématique : la gigafactory de panneaux photovoltaïques portée par Carbon, qui prévoit une montée en puissance rapide sur le site de Fos pour soutenir la relocalisation de la filière solaire en France.

À ces projets industriels s’ajoute une volonté politique de structurer une filière locale, capable de produire, stocker et distribuer l’hydrogène, demain indispensable à l’industrie et à la logistique.

Autant d’initiatives qui convergeront dès le lendemain, mardi 25 mars, dans un événement régional consacré à l’hydrogène, organisé à Marseille, avec Meet4hydrogen. Chercheurs, industriels et élus y discuteront du rôle central de ce vecteur énergétique dans la décarbonation du tissu local.

Si Fos-sur-Mer devient lentement un laboratoire d’industrie post-carbone les obstacles restent nombreux : coûts élevés, complexité des raccordements, inertie administrative… Les syndicats, que les ministre va rencontrer à huis clos, alertent eux sur les risques de « transition punitive » pour les salariés.

N.K