L’Hôpital Militaire de Laveran s’apprête à quitter son site historique du 13ᵉ arrondissement pour s’installer à Sainte-Marthe. Un pôle de santé de nouvelle génération, pensé pour soigner militaires et civils, et conçu pour répondre aux défis médicaux des prochaines décennies. Medhi Ould-Ahmed, médecin-chef de l’Hôpital d’Instruction des Armées (HIA) Laveran, détaille l’évolution des prises en charge, le retour de spécialités essentielles et les innovations qui feront du futur hôpital un acteur clé du territoire.
« C’est un projet révolutionnaire. » Medhi Ould-Ahmed, médecin-chef de l’Hôpital d’Instruction des Armées (HIA) Laveran, l’affirme sans détour. Le futur hôpital militaire qui s’implantera sur un site militaire à Sainte-Marthe (13e) ne sera pas seulement une infrastructure modernisée, mais un établissement entièrement repensé dans son offre médicale.
Un hôpital qui ne soignera pas que les soldats, mais qui prendra en charge Marseille, ses AVC, ses cancers, ses détresses invisibles. Une place forte médicale avec des spécialités renforcées, des services réintroduits, une capacité d’adaptation aux crises sanitaires…
Les chiffres parlent d’eux-mêmes. « Aujourd’hui, entre 70 et 80% des patients que nous soignons n’ont aucun lien avec le ministère des Armées », rappelle Medhi Ould-Ahmed. Le futur établissement de Sainte-Marthe conservera cette dynamique. Ouvert aux militaires comme aux civils, il continuera d’assurer des soins de premier plan avec une offre médicale renforcée.
Oncologie, neurologie… Le retour de spécialités essentielles
On y retrouvera les bases. « Ça, ce sera préservé, assure le clinicien. Des salles d’urgence, de la radiologie, de la chirurgie, de la réanimation, de l’anesthésie. » Un socle commun, mais avec une ambition plus large : certaines spécialités réapparaîtront pour répondre aux besoins du territoire.
« Les personnes qui ont connu Laveran autrefois savent qu’il y avait un service de neurologie. Il va revenir. » Un renfort de premier plan à Marseille, où les AVC sont un enjeu de santé publique majeur. « Avec la prévalence des accidents vasculaires cérébraux, on sait que les services de la Timone, les urgences vasculaires, peuvent être débordés sur la prise en charge initiale. »
L’oncologie fera aussi son retour, avec une volonté claire de s’inscrire dans un maillage territorial efficace. « Nous allons articuler notre prise en charge avec des experts du cancer, notamment l’Institut Paoli-Calmettes, qui est le centre de référence dans la région. On ne va pas être un hôpital isolé, on travaille en réseau. »
L’armée soigne ses soldats, mais ses médecins ne s’arrêtent pas aux treillis. « Les armées ont besoin d’une expertise en infectiologie, en pneumologie, en cardiologie. » Une nécessité militaire qui résonne dans la médecine civile.

A lire notre premier volet
L’armée prépare le terrain pour son futur hôpital dans le nord de Marseille
Un hôpital conçu pour gérer les crises
L’équipement de nouvelle génération accueillera naturellement un pôle dédié aux blessures invisibles. « Les psychiatres militaires ont une compétence, une expertise sur le stress post-traumatique. On en parle beaucoup en temps de guerre, mais ce type de traumatisme touche aussi les policiers, les pompiers, les victimes d’accidents. Le traumatisme psychique, c’est la confrontation à sa propre mort. »
Le futur Laveran sera aussi un hôpital de crise. « C’est un hôpital qui fera 300 lits, avec la possibilité d’aller jusqu’à 400 en quelques jours si nécessaire. » Un atout stratégique pour le territoire, qui a connu des tensions hospitalières majeures ces dernières années. « On l’a encore vu cet hiver, du 29 décembre au 14 février, avec la crise, tous les hôpitaux étaient en tension. Ces 100 lits supplémentaires, immédiatement mobilisables, seront une plus-value majeure pour le territoire. »
Épidémies, catastrophes sanitaires, afflux massifs de blessés… L’hôpital militaire de Sainte-Marthe se prépare à toutes les éventualités.
Une révolution technologique
« Quand on se lance dans un tel projet, on innove. C’est-à-dire qu’on essaie d’imaginer quels seront les scanners 20 ans plus tard. On ne peut pas acheter un scanner sans essayer d’avoir un coup d’avance. »
La nouvelle infrastructure sera dotée d’équipements de haute performance. « Le scanner et l’IRM seront accessibles en ambulatoire. Vous venez, vous prenez rendez-vous, on vous envoie le résultat directement sur votre espace santé. » La chirurgie robotisée occupera une place importante, avec des équipements de haute précision.
Même la logistique sera optimisée. « Il y aura des flux automatisés, des robots pour déplacer le matériel. On aura des flux avec des automates qui déplaceront les charges. C’est un projet révolutionnaire, pensé pour durer. »
L’innovation concernera aussi la rééducation.Les blessures physiques des soldats blessés au combat seront aussi prises en charge avec des technologies de pointe. « On a tous vu ces images de militaires amputés, équipés de prothèses articulées, de dispositifs de restitution d’énergie. Ce qui a été développé pour le combat servira aussi aux civils. »
À son ouverture, le futur Laveran comptera 1 030 personnels, avec un objectif de 1 300 à terme. 150 praticiens, 800 paramédicaux, des administratifs et des logisticiens feront vivre l’hôpital. Aujourd’hui déjà, 300 étudiants en médecine de la faculté de Marseille font leurs armes au sein de l’hôpital actuel.
Laveran change d’adresse, mais surtout de dimension. Un hôpital militaire, certes, mais conçu pour répondre aux besoins de tout un territoire. « On ne construit pas un hôpital en 2025 comme dans les années 60. Nous devons anticiper les besoins des 20 prochaines années. » Une machine de guerre contre la maladie.
N.K.