En marge de la visite d’Emmanuel Macron à Marseille, plusieurs collectifs ont manifesté devant la préfecture pour dénoncer l’engagement de Christophe Castaner auprès de Shein et réclamer l’adoption de la loi anti-fast fashion.
En marge de la visite d’Emmanuel Macron et du Premier ministre indien Narendra Modi à Marseille, un autre dossier sensible s’est invité dans le débat public.
Devant la préfecture, plusieurs collectifs – Altavista, Zero Waste, Greenpeace et FASK, 1 déchet par jour, Alternatiba Marseille – ont organisé un petit rassemblement pour réclamer l’adoption de la loi anti-fast fashion et interpeller le président sur l’engagement de Christophe Castaner auprès de Shein. Le président, attendu ailleurs, n’a jamais été en position d’entendre leurs revendications.
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Un recrutement qui fait scandale
Depuis que l’ancien ministre de l’Intérieur a rejoint le comité stratégique Europe, Afrique et Moyen-Orient de Shein, tout en conservant son poste de président du Grand Port Maritime de Marseille, la contestation ne faiblit pas. Mode in Sud, syndicat représentant les entreprises de mode en Provence-Alpes-Côte d’Azur, avait déjà dénoncé un « choc » pour la filière.
« En tant que président du Grand Port Maritime de Marseille, ses fonctions devraient être exemptes de toute association avec une entreprise aux pratiques controversées », dénonçait-il en décembre dernier.
Pour ses détracteurs, Shein incarne un modèle de production ultra-intensif à bas coût, mettant en péril les entreprises locales et posant des problèmes en matière d’éthique et de conditions de travail. « Ce recrutement démontre une fois de plus les moyens colossaux dont Shein dispose et les méthodes qu’il emploie », fustige Jocelyn Meire, président de Mode in Sud.
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Christophe Castaner défend une transformation du secteur
Face aux critiques, Christophe Castaner s’était déjà expliqué fin janvier, lors du bilan 2024 du Grand Port Maritime de Marseille. Il réfute tout conflit d’intérêts et insiste sur la nécessité d’adapter les réglementations au marché mondial plutôt que de s’acharner sur un acteur en particulier : « Shein est arrivée sur le marché français en 2023 (Shein est implanté en France depuis 2020, ndlr). C’est une entreprise jeune qui ne connaît pas forcément tous les standards et qui a décidé de s’adapter aux standards français et européens. Ils font appel à des gens comme moi pour les conseiller en matière de RSE, mais aussi à d’autres acteurs pour améliorer leur façon d’être sur le marché français. »
Il pointe également du doigt l’état du secteur textile en France, qu’il considère comme un problème bien plus profond que l’existence de Shein : « La part de l’industrie made in France dans le textile aujourd’hui, c’est 3,3 % dans la consommation de nos concitoyens. Ça n’est pas suffisant. Mais ce n’est pas en interdisant ou en taxant que nous allons résoudre le problème. Nous devons transformer nos modèles. »
Enfin, le nouveau responsable RSE dénonce la logique punitive qui, selon lui, pèse avant tout sur les consommateurs aux revenus modestes.
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Le Sénat freiné dans son élan sur la loi anti-fast fashion
Une ligne de défense qui ne convainc pas les militants. Devant la préfecture, ils ont réitéré leur mécontentement, dénonçant un manque de cohérence entre ses fonctions portuaires et son rôle chez Shein, mais surtout appelant à faire voter au plus vite la loi anti-fast fashion.
Mais le texte visant à encadrer la fast fashion en France ne sera finalement pas débattu au Sénat le 26 mars, contrairement aux attentes. La conférence des présidents du Sénat ce 12 février, qui fixe le programme des séances, n’a pas inscrit cette loi à l’ordre du jour. Une décision qui a pris de court les sénateurs engagés sur ce dossier, dont Sylvie Valente-Le Hir (LR) et Jean-François Longeot (centriste), qui dénoncent un revirement du gouvernement.
Le texte, voté à l’unanimité à l’Assemblée nationale, est pourtant attendu avec impatience par les acteurs de la seconde main et de l’économie circulaire. Alors que plusieurs solutions existent pour relancer son examen, aucune nouvelle date n’a été fixée pour l’instant, alimentant la frustration des défenseurs d’une régulation de l’industrie textile. « Selon nous, c’est un manque de priorisation par le gouvernement », défendent les militants qui vont continuer à « maintenir la pression. »
N.K.