Les Galeries Lafayette fermeront leurs deux magasins marseillais, Centre Bourse et Prado Shopping, d’ici fin 2025. Tandis que le départ du Prado illustre les limites d’un centre commercial en périphérie, des pistes sont envisagées au Centre Bourse : cité judiciaire ou locomotive commerciale.
C’est une page qui se tourne à Marseille. Les Galeries Lafayette du Centre Bourse et Prado Shopping s’apprêtent à baisser le rideau. Une fermeture prévue d’ici à la fin de l’année 2025, actée ce jour en CES extraordinaire, conséquence des difficultés financières, les mutations économiques et la montée en puissance du e-commerce.
Dès 2023, la question du maintien ou non de l’une des deux enseignes marseillaises – celle du Prado (8e) ou celle du Centre Bourse – avait été évoquée lors d’une réunion du personnel.
145 employés concernés
L’enseigne du Prado, installée dans le centre commercial éponyme, avait déjà quitté la rue Saint-Ferréol, privant cette artère autrefois bouillonnante de l’une de ses locomotives historiques. Un départ qui avait marqué un tournant dans la dynamique commerciale du centre-ville.
145 employés sont directement menacés par la fermeture des deux enseignes pour lesquels la direction prévoit un plan d’accompagnement « au cas par cas » et de mobilité.
La piste de la cité judiciaire au centre Bourse
Avec le départ des Galeries Lafayette, l’espace déserté du Prado Shopping devra rapidement trouver preneur. Au Centre Bourse, le défi est encore plus ambitieux : repenser l’avenir des 22 000 m² laissés vacants au cœur de la ville.
Parmi les scénarios envisagés, l’installation de la future cité judiciaire de Marseille revient régulièrement dans les discussions.
Porté par plusieurs acteurs économiques locaux, ce projet s’inscrirait dans une double ambition : redonner un souffle au centre-ville tout en répondant aux besoins d’une institution judiciaire vouée à déménager à l’horizon 2031 sur Euroméditerranée.
Avec sa localisation centrale, sa proximité avec les transports en commun et ses parkings, le Centre Bourse semble avoir de solides atouts sur le papier pour accueillir une telle infrastructure.
Un projet porté avec détermination par Jean-Luc Chauvin, le président de la Chambre de commerce et d’industrie Aix-Marseille-Provence, qui y voit une opportunité majeure pour renforcer l’attractivité du centre-ville.
L’installation de la cité judiciaire au Centre Bourse s’inscrirait dans une dynamique globale, aux côtés de projets tels que Grand Central, nouveau siège des titres du groupe CMA Média (La Provence, La Tribune, BFM…), ou encore la transformation du Palais Monthyon, appelé à devenir le futur siège de la Métropole après l’expiration du bail dans la tour La Marseillaise en 2028.
Ce dernier projet annoncé par la présidente de la Métropole Aix-Marseille Provence, Martine Vassal, lundi 20 janvier, vise également à compenser le départ de la cité judiciaire et à maintenir une activité institutionnelle forte dans le cœur de Marseille.
Cette proposition représente aussi une alternative budgétaire crédible face au projet initialement prévu sur Euroméditerranée, dont le coût, estimé à 350 millions d’euros, reste à confirmer, mais dont les études menées par l’Agence publique pour l’immobilier de la justice (Apij) se poursuivent sur le périmètre acté par l’ex-garde des Sceaux, Éric Dupond-Moretti.
Toutefois, si l’option du Centre Bourse séduit par son potentiel stratégique, elle suscite également des interrogations sur l’adéquation du bâtiment à une telle vocation.
L’ancien préfet de région Christophe Mirmand émettait des réserves à ce sujet : « C’est un site d’une grande largeur, avec peu de visibilité sur la rue. Je ne suis pas certain qu’il réponde aux besoins des juridictions appelées à s’y installer ». Le bâtiment, par ses caractéristiques architecturales, soulève des questions sur sa capacité à répondre aux exigences fonctionnelles et logistiques d’une telle structure.
Un dossier sur lequel va se pencher son successeur Georges-François Leclerc, installé officiellement dans ses fonctions lundi 20 janvier 2025.
Primark ou d’autres enseignes pour revitaliser le site ?
Ce départ intervient alors qu’au Centre Bourse, la machine semble repartir. Lidl, arrivé en mai dernier, a boosté la fréquentation de 27% entre juin et octobre 2024 par rapport à la même période l’année précédente, nous indique le centre commercial. L’ouverture prochaine de l’enseigne Normal et des discussions avancées avec d’autres acteurs laissent entrevoir un potentiel rebond.
Parmi les pistes évoquées pour renforcer l’attractivité du Centre Bourse, le nom de Primark revient régulièrement. Avec un chiffre d’affaires de plus de 9 milliards de livres sterling en 2023, l’enseigne irlandaise pourrait jouer un rôle clé dans la revitalisation commerciale.
Si son éventuelle installation venait à se concrétiser, elle ne manquerait pas de susciter des débats. Symbole d’un modèle économique souvent critiqué pour son impact environnemental et social, l’enseigne pourrait faire face à une opposition locale des défenseurs du made in France, à une époque où les préoccupations écologiques et éthiques prennent de plus en plus d’ampleur.
Si son arrivée au Centre Bourse reste une hypothèse non confirmée, l’enseigne nous a toutefois annoncé l’ouverture prochaine d’un nouveau magasin à Plan-de-Campagne, renforçant ainsi sa présence dans la région marseillaise. « Primark est heureux de poursuivre son aventure à Marseille, ville où l’enseigne a inauguré son tout premier magasin en 2013. Nous sommes ravis de constater que notre offre, basée sur la promesse de qualité et de durabilité à des prix imbattables, continue de séduire un large public », a déclaré un porte-parole.
Entre projets institutionnels et ambitions commerciales, le site du Centre Bourse cristallise les espoirs d’une revitalisation nécessaire pour un centre-ville en quête de renouveau.
Narjasse Kerboua (avec R.G.)