Marseille, un tribunal en mutation face aux défis économiques

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Rentrée solennelle 2025 du Tribunal des Activités Economiques de Marseille. Crédit photo -Kilian Abisror

Entre bilan contrasté et nouvelles ambitions, le Tribunal des Activités Économiques, héritier du Tribunal de commerce de Marseille, amorce un tournant en 2025. L’institution réaffirme son rôle clé dans la gestion des défis économiques du territoire.

En janvier 2025, le Tribunal de commerce de Marseille est officiellement devenu le Tribunal des Activités Économiques (TAE). Une transformation qui reflète les mutations économiques et judiciaires d’un territoire en pleine évolution.

Lors de la rentrée solennelle, Patrick Lesbros, président de cette institution, a dressé un bilan précis de l’année 2024. Avec 14 951 nouvelles immatriculations, soit une augmentation de 10% par rapport à 2023, le registre du commerce et des sociétés a poursuivi sa croissance pour atteindre 157 358 entreprises inscrites au 31 décembre 2024.

Le solde net des immatriculations et des radiations s’établit à 9 948, marquant une progression de 5%. « Le registre reste un baromètre essentiel de l’activité économique », a souligné Patrick Lesbros, tout en mettant en garde sur les défis persistants.

Les tensions économiques sont particulièrement visibles dans la hausse des injonctions de payer, qui atteignent 4 218 dossiers. Ces chiffres témoignent de la fragilité de nombreuses entreprises, confrontées à des difficultés de trésorerie croissantes.

Le rôle clé de la conciliation

Le Tribunal a connu une augmentation significative des procédures collectives, avec 1 326 cas ouverts, soit une hausse de 23%. Parmi celles-ci, la liquidation judiciaire du groupe HOPPS, affectant 11 000 salariés, a marqué un triste record dans l’histoire locale.

« L’année 2024 aura enregistré une inflexion de conjoncture, avec des entreprises arrivant dans un état plus dégradé et des chances de rebond plus faibles », a noté Patrick Lesbros, insistant sur la nécessité d’agir en prévention pour anticiper ces situations.

Face à ces difficultés, les procédures amiables continuent de se développer. En 2024, 52 conciliations ont été engagées, presque le double de l’année précédente, avec un taux de réussite de 73%. Cette montée en puissance s’explique par un avenant signé en juillet 2024 avec le Barreau de Marseille, visant à encourager le recours aux solutions amiables.

Pour Patrick Lesbros, ces procédures jouent un rôle clé dans la préservation des entreprises et des emplois, en évitant d’aboutir à des liquidations. « La conciliation judiciarisée est gratuite et supervisée par des juges formés spécifiquement », a-t-il précisé.

Rentrée solennelle 2025 du Tribunal des Activités Economiques de Marseille. Crédit photo – Kilian Abisror

Plus d’une centaine de signalements à « Tracfin »

2024 a également été marquée par une accélération de la digitalisation. Avec 8 000 décisions signées électroniquement, le Tribunal des Activités Économiques franchit un cap important vers une justice plus rapide et plus transparente.

Les efforts se poursuivent pour élargir ces avancées à d’autres domaines, comme les échanges avec les administrateurs et mandataires judiciaires.

En parallèle, la lutte contre la criminalité économique s’intensifie. Le greffe a transmis plus de 100 déclarations à « Tracfin » et 50 signalements au parquet, contribuant à l’assainissement du tissu économique. « La criminalité organisée prospère en créant des structures juridiques frauduleuses. Nous resserrons les maillons de la chaîne », a affirmé le président du tribunal.

Faire de Marseille une « place forte du droit maritime »

Patrick Lesbros a également souligné son souhait de faire de Marseille une « place forte du droit maritime ». Les affaires liées aux transports maritimes, aux contrats d’affrètement ou encore aux litiges de responsabilité entre armateurs et chargeurs constituent des opportunités pour renforcer l’expertise juridique locale.

« Nous souhaitons développer cette spécialisation pour répondre aux besoins des acteurs maritimes et renforcer notre attractivité », a-t-il précisé. Ce positionnement pourrait aussi s’accompagner d’une meilleure collaboration avec les institutions portuaires et les entreprises maritimes locales.

N.K. et R.G.