La présentation des aménagements transitoires de la place Sébastopol, prévus au printemps 2025, a relancé le débat sur la réduction des places de stationnement. Une expérimentation grandeur nature qui questionne l’avenir de la voiture dans ce quartier emblématique de Marseille.
Tantôt voitures, tantôt étals du marché, la place Sébastopol est aujourd’hui un carrefour d’usages dans ce quartier emblématique de Marseille. Depuis près de deux ans, la Ville réfléchit à une transformation de cet espace public pour mieux répondre aux attentes des habitants.
La Mission Espace Public, pilotée par la mairie, a permis d’identifier plusieurs enjeux pour ce projet. Les riverains souhaitent une place plus accueillante et fonctionnelle, capable de concilier les besoins de tous. « Il faut trouver un point d’équilibre entre tous les usagers », souligne David Chiousse, directeur de cabinet du maire des 4ᵉ et 5ᵉ arrondissements, Didier Jau (EELV).
Présenté aux habitants mardi 14 janvier, le projet prévoit des aménagements transitoires dès le printemps 2025, conçus pour observer les usages et ajuster les propositions avant leur mise en œuvre définitive. Il inclut la transformation d’environ un tiers du site en zone piétonne, entraînant la suppression de 22 places de stationnement.
Cheminements, végétation et convivialité
Porté par l’équipe Atelier Co-Co, ce projet vise à favoriser les rencontres et les activités sur la place grâce à des cheminements piétons, du mobilier urbain modulable et une végétation méditerranéenne (oliviers, jasmin étoilé, romarin). Le marché, véritable cœur de la vie de quartier, sera préservé tout en libérant certains espaces pour d’autres usages.
Mais c’est précisément sur ces ajustements que les débats s’intensifient. « Il faut trouver un point d’équilibre entre les forains, les commerçants, les piétons et les automobilistes », résume David Chiousse.
Agrandissement ou surélévation du parking Vallier ?
Les scénarios évoqués, notamment la réduction des places de stationnement, ont rapidement suscité des réactions. « Nous sommes tous d’accord sur le principe, nous sommes contre la voiture, mais en même temps, nous en avons tous une. Comment faire alors ? », interroge une habitante.
Pour répondre à cette problématique, la mairie envisage des solutions comme l’agrandissement ou la surélévation du parking du stade Vallier, sans toutefois garantir leur faisabilité. « Tant que les axes reliant Marseille à ses villes périphériques ne seront pas améliorés, les habitants ne pourront pas se passer de leur voiture. Il est essentiel de développer des parkings relais, comme celui en construction à La Boiseraie, afin de permettre le stationnement en entrée de ville », avertit David Chiousse.
Une solution complexe
La création d’un parking dans les 4ᵉ et 5ᵉ arrondissements de Marseille remonte à plusieurs années, sans que le projet ait été acté ni qu’il soit en cours à ce jour.
Bruno Gilles (ex-LR, aujourd’hui Horizons), président du groupe majoritaire à la Métropole, se montre sceptique quant à la faisabilité technique de l’agrandissement ou de la surélévation du parking Vallier, évoquée par la mairie. « Pour agrandir le parking, il faudrait que la Ville de Marseille cède soit le jardin à côté, soit le stade ou son entrée adjacente. Quant à une surélévation, cela demande des études techniques poussées, car la structure actuelle n’est pas forcément conçue pour supporter une telle charge », nous explique-t-il.
Il rappelle également qu’un accord passé avec les riverains limitait la hauteur du parking à trois niveaux. « Si la mairie de secteur souhaite rajouter un étage, elle devra concerter les riverains et obtenir leur accord. »
1 200 places supprimées dans ce quartier
L’ancien maire de secteur (de 1995 à 2017) pointe également la suppression de 1 200 places de stationnement en un an et demi. « Ce chiffre, communiqué par la Métropole, reflète l’impact des décisions prises par la mairie. Cela rend les habitants fous, surtout dans un quartier pourtant bien desservi par les transports en commun », souligne-t-il.
Bruno Gilles est aussi critique quant au retard pris dans le projet. Selon lui, la Métropole n’a reçu aucune esquisse concrète. « Cela fait deux ans qu’ils sont en concertation. Si la mairie transmet un projet à la dernière minute, juste avant les élections, il sera impossible de le réaliser dans les temps. Les études et les appels d’offres prennent au moins trois ans. »
Alors que la Ville envisage l’achèvement des travaux définitifs d’ici la fin de l’année 2026, il prévient qu’un calendrier aussi serré pourrait repousser les travaux à bien après 2026. « Rien n’est clair : où seront les arbres ? Les places de stationnement ? Comment seront gérés les travaux ? Rien de tout cela n’est résolu », dit-il, regrettant de ne pas avoir été invité aux réunions ou aux concertations en tant qu’élu d’opposition, tout en restant disponible pour étudier tout projet définitif. La réussite de ce projet dépendra une fois encore d’un dialogue approfondi entre la Ville, la Métropole et les riverains.
Rania Gabel (avec N.K)