François Bayrou a dévoilé le plan « Mayotte debout », une réponse d’urgence à la crise qui secoue le 101ᵉ département français. Sécurité, économie, infrastructures : le gouvernement promet des mesures « concrètes et précises » pour remettre l’île sur pied et répondre à des décennies de fragilités structurelles.
En déplacement à Mayotte, François Bayrou a présenté un plan d’urgence pour répondre à l’impact dévastateur du cyclone Chido, qui a frappé le 14 décembre dernier. Ce projet mêle des mesures immédiates et des réformes structurelles visant à relever un territoire marqué par des fragilités socio-économiques profondes.
Avec des annonces touchant à l’éducation, la santé, l’économie et la sécurité, le Premier ministre veut faire du plan « Mayotte debout » un tournant pour un département bout de souffle. Que retenir ?
Garantir la continuité des soins
Face à la crise sanitaire, aggravée par le cyclone, François Bayrou a annoncé la « mobilisation de la réserve sanitaire de Santé publique France » pour maintenir « la continuité des soins ».
Le gouvernement compte également renforcer les capacités locales avec un dispositif inédit : un « parrainage de l’hôpital de Mayotte par les centres hospitaliers volontaires dans l’Hexagone ». Par ailleurs, une soixantaine d’équipes santé-secours, incluant des infirmiers libéraux, interviendront « au plus près des besoins de la population ».
Des mesures financières accompagneront cet effort, comme des « avances de trésorerie » pour soutenir le personnel hospitalier.
Protéger les écoles et assurer la rentrée
François Bayrou a dévoilé un « plan vigilance », associant armée et gendarmerie, pour sécuriser les établissements scolaires face aux pillages et incendies. « On ne peut pas laisser les écoles, les collèges et les lycées être chaque jour pillés ou pire encore, brûlés », a-t-il déclaré. Cette initiative répond aux actes de vandalisme récents, dont l’incendie d’une école utilisée comme centre d’hébergement d’urgence, dénoncé par le maire de Mamoudzou, Ambdilwahedou Soumaila.
La rentrée scolaire, prévue à partir du 13 janvier, se fera de manière progressive, avec une attention particulière pour les élèves en classe d’examen. Pour les familles en difficulté, le gouvernement propose une scolarisation temporaire dans l’Hexagone. « On l’a fait pour l’Ukraine, on peut le faire pour les enfants maorais », a rappelé le nouveau chef du gouvernement.
Sur place, les Mahorais estiment que 70 à 75% des enseignants ont quitté l’archipel et ne reviendront pas pour assurer l’enseignement.
Interdiction de reconstruire les bidonvilles
François Bayrou a affirmé que l’État et les pouvoirs publics locaux se sont engagés à « empêcher la reconstruction des bidonvilles », précisant que cette interdiction sera « inscrite dans la loi ».
Une « loi d’urgence » sera présentée en Conseil des ministres ce vendredi et inscrira ces mesures dans le droit. En parallèle, une « loi programme de refondation », élaborée en concertation avec les élus mahorais, sera finalisée dans les trois mois pour structurer un développement urbain durable.
Un soutien économique pour la reconstruction
Pour relancer l’économie, le gouvernement va mettre en place un prêt garanti par l’État (PGE) exceptionnel. « Ces prêts seront sur 30 ans, et les cinq premières années seront gratuites. Il n’y aura pas de remboursement, il y aura 0 € par mois pendant les cinq premières années », a expliqué François Bayrou.
Ces prêts, « assumés par la Banque des territoires, dans des conditions exceptionnelles réservées aux catastrophes naturelles de grande ampleur comme Chido », permettront aux familles et entreprises de reconstruire leurs habitations et activités. Un fonds d’épargne spécifique sera créé par la Caisse des dépôts pour financer des projets de reconstruction à moyen terme.
En complément, l’État suspendra les cotisations sociales jusqu’au 31 mars 2024 et proposera une aide d’urgence couvrant 20 % du chiffre d’affaires moyen des entreprises sinistrées, plafonnée à 20 000 €.
Le secteur agricole bénéficiera aussi d’un soutien direct : bâches pour protéger les cultures, alimentation pour le bétail et simplification des procédures d’importation des semences.
Électricité, eau et télécommunications
Pour rétablir l’électricité, François Bayrou a promis que « chaque foyer sera reconnecté d’ici fin janvier ». L’effort sera coordonné par les maires avec l’aide de 200 agents et 20 techniciens EDF. En attendant, 200 groupes électrogènes fournis par EDF alimenteront les zones critiques.
En matière d’eau, l’objectif est de revenir à une production de 38 000 m³ par jour avant la fin de la semaine, puis d’atteindre 40 000 m³ d’ici juin 2025. Les XIIIᵉ et XIXᵉ régiments du génie interviendront pour réparer les réseaux hydrauliques et restaurer les infrastructures endommagées.
Pour pallier les difficultés de communication, 200 antennes Starlink, fournies par SpaceX, seront déployées pour connecter rapidement les zones isolées et renforcer les capacités numériques.
L’aéroport de Mayotte rouvrira aux vols commerciaux dès le 1er janvier. Des rapatriements commenceront ce mardi pour les habitants bloqués hors de France.
Un établissement public pour « refonder » Mayotte
Pour piloter ces efforts, un établissement public de refondation, inspiré de celui de Notre-Dame de Paris, sera créé. « Une personnalité sera nommée à sa tête », a précisé le Premier ministre.
Un recensement général de la population sera organisé pour établir un diagnostic précis. « Ce sera une opération vérité qui permettra de sortir des ambiguïtés », a-t-il expliqué, soulignant que ce travail est indispensable pour adapter les infrastructures et les services aux besoins réels.
« Ce plan est une réponse aux préoccupations exprimées par les élus », a affirmé François Bayrou. Mais pour les Mahorais, confrontés à des promesses souvent non tenues, le succès de « Mayotte debout » dépendra de sa mise en œuvre concrète.
N.K.
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