A l’occasion de la 31e édition de la Nuit des champions ce samedi 16 novembre à Marseille, rencontre avec son créateur, fringuant septuagénaire et pionnier du full contact en France.
Depuis quelques semaines, alors que l’échéance se rapproche, son téléphone ne cesse de sonner. La semaine dernière, Érick Roméas, parfaitement secondé dans la confection de la programmation par son fils Anthony, devait trouver un combattant pour suppléer Anthony Bayer, accidenté.
Un peu plus tôt, c’est l’illustre Louis Lavaly qui a gratifié le créateur et grand manitou de la Nuit des champions de félicitations : « Vous n’avez jamais monté un programme aussi chiadé ». Des mots qui ont du poids dans le monde des sports de combat.
« Le plateau est plus que sympa, apprécie Roméas, fondateur-président du Full Contact Academy en 1996, le club organisateur aux 150 adhérents. On proposera des oppositions entre des locaux et des étrangers, des matches qui pourraient faire le main event dans n’importe quelle autre organisation de France ou de Navarre. »
La force tranquille autant que celle de l’habitude
Avec un combat de pancrace en ouverture, un affrontement féminin (comprenant la Sisteronaise Louna Aubert) et un alléchant tournoi en -64,5 kg, le spectacle promet d’être au rendez-vous dans un Palais des sports de Marseille qui devrait encore faire le plein (5000 spectateurs attendus).
Le temps presse, le timing est serré. Mais dans ses nouveaux locaux entre Vallier et les Cinq-Avenues, alors que les cris des enfants de l’école primaire Michelet-Foch couvrent les tintements du tramway, Érick Roméas ne tremble pas. La force tranquille autant que celle de l’habitude pour ce tout jeune septuagénaire, 8e dan de full contact.
Il faut dire qu’il en est à sa 31e Nuit des champions ! « On est toujours là , c’est qu’il doit y avoir un réel intérêt. Ça veut dire que ça marche », apprécie l’homme qui sait pouvoir compter sur sa famille : son épouse Marie-France, leur fille Marina et leur fils Anthony, donc. Tous unis et soudés par la même passion.
« Ce n’est pas pour mon joli sourire que les gens viennent »
Le patriarche a su traverser les décennies, même s’il ne pensait pas qu’il serait toujours là aujourd’hui. « Jamais », répète-t-il quatre fois. Il a survécu aux générations des politiques et son événement a toujours su rassembler. « Ce n’est pas pour mon joli sourire que les gens viennent », glisse-t-il, même si son entregent et la qualité de son travail sont unanimement reconnus.
S’il « aimerai(t) remettre le kimono de karaté », qui reste sa « discipline de prédilection » (2e dan) après avoir été bercé par les images de Bruce Lee, Erick Roméas n’est pas peu fier d’avoir œuvré à la structuration du kick boxing. « J’ai essuyé les plâtres il y a quarante ans. C’était les prémices (à la fin des années 70), la jungle. On s’entraînait n’importe où, n’importe comment, ça renvoie aux calendes grecques », remarque-t-il.
Avec rien en poche mais des idées plein la tête et l’envie de déplacer des montagnes, Roméas monte à cette époque « des petits combats », pour fédérer un art martial naissant dans la région. La salle Vallier sert de point de ralliement, autour d’un simple ring. « Au début, on a eu 100 spectateurs, puis le double la fois d’après, et on est très vite monté en gamme, jusqu’à refuser du monde en 1985. On avait les autorisations, sans les avoir vraiment, comme le MMA aujourd’hui. On nous traitait de fous. »
La Nuit « casse la baraque » à partir de 1992
Par sa personnalité, son talent sur les tapis, le Marseillais à la solide carrure a creusé un sillon. Et acquis une notoriété certaine « dans ce petit microcosme du pieds-poings qui grandit ». La construction du Palais des Sports fera définitivement entrer la saga dans une autre dimension. « C’était assez impressionnant, on passait de 1500 à 6000 places », se souvient-il.
1992 marquera un tournant ô combien important : sous les caméras de TF1, la Nuit « casse la baraque avec un combat entré dans la légende entre Roufus et Hoost », pour le compte d’un championnat du monde. Deux ans plus tard, la revanche sera cette fois diffusée sur Canal+ et ne fera que confirmer le succès populaire du kick boxing.
Érick Roméas est aujourd’hui vice-président de la Ligue régionale Sud ainsi que de la Fédération française. Cette dernière compte 70 000 licenciés (30% de féminines), de vastes locaux à Bagnolet (Seine-Saint-Denis) et « a de l’argent en caisse, trois millions d’euros ».
Tous l’appellent « Senseï », « grand maître » ou « le grand »
Alors qu’il assure toujours « prendre plaisir » à animer des cours aux côtés de ses quatre moniteurs, Érick Roméas ne cesse d’impressionner les jeunes. Avec le temps, il a hérité de plusieurs surnoms. Pour tous, il est « Monsieur Roméas ». Certains l’appellent « Senseï » (maître), d’autres « grand maître ». Signe de sa réputation et du respect qu’il inspire, il est aussi parfois affublé du sobriquet « le grand », voire « la légende ».
N’en jetez plus, la coupe est pleine. « Ça me met mal à l’aise », balaie-t-il, avec la modestie qui le caractérise. « Je ne me prends pour personne. Je m’occupe de mon club, j’organise, tant mieux si ça plaît. Nous, ce qu’on veut, ce sont des sourires, de l’empathie, de tapes amicales dans le dos. »
Ce qui l’anime ? « Séduire le public », dit-il tout de go. Et apparemment, avec la Nuit des champions, ça marche. « Quand, en fin de soirée, on me dit ‘bravo’, ça me satisfait. »
Samedi soir, ne le cherchez pas dans la lumière ; les combattants et le speaker sont là pour ça. Erick Roméas sera près du ring, aux premières loges. Pour ne rien louper de son propre spectacle.
Benoît GILLES
Le programme
La pesée officielle des combattants aura lieu ce vendredi 15 novembre à 18h, au Palais des sports de Marseille. Elle sera aussi diffusée en direct sur le compte Instagram de la Nuit des champions.
Samedi 16 novembre, début du gala à 19h, au Palais des sports. Douze combats pros, trois ceintures mondiales « NDC ».
Tournoi à 4 (-64,5 kg), trois reprises de trois minutes :
Demi-finale 1: Eddy Naït-Slimani – Aitor Ibanez Currito. Demi-finale 2 : Rémi Parra – Lorenzo Sammartino. Puis finale entre les vainqueurs.
Billetterie : ticketmaster.fr, dès 27,50 €.