L’ESS, moteur des transitions économiques et sociales en région Sud

La Région s’inspire de modèles comme celui de la filière « Arômes, Saveurs, Senteurs » dans le Pays de Grasse pour structurer et renforcer l’économie locale. Ici, Domaine de Manon, ramassage des roses.

La Région Provence-Alpes-Côte d’Azur dévoile un plan stratégique pour l’économie sociale et solidaire (ESS) visant à placer les entreprises locales en première ligne des transitions économiques, sociales et environnementales jusqu’en 2030.

La Région Provence-Alpes-Côte d’Azur présente ce mardi 5 novembre une stratégie ambitieuse pour l’économie sociale et solidaire (ESS), secteur clé représentant 13,1 % de l’emploi privé régional. Une feuille de route votée à l’occasion de la séance plénière le vendredi 25 octobre 2024.

Ce plan, élaboré en concertation avec plus de 300 acteurs, s’articule autour de trois axes principaux : renforcer l’ESS pour maximiser son impact, intégrer ses pratiques dans les filières stratégiques régionales, et répondre aux besoins spécifiques des territoires, notamment en milieu rural et face au vieillissement de la population.

Pas question de laisser l’ESS végéter en périphérie : l’objectif est clair, elle doit être au cœur de l’économie régionale, avec trois axes de développement décisifs qui visent à en amplifier l’impact, à tisser des liens avec les filières classiques et à s’implanter encore plus solidement dans les territoires qui en ont besoin.

Pour concrétiser cette vision, une enveloppe de près de 100 millions d’euros, pour faire de Provence-Alpes-Côte d’Azur une région plus résiliente et solidaire.

Soutenir les champions de l’ESS

L’ambition affichée par la Région repose d’abord sur l’intensification de l’ESS pour décupler son impact. L’idée est de transformer des projets en entreprises solides, de soutenir des initiatives de terrain et de repérer ceux qu’elle appelle désormais les « champions de l’ESS » : des entreprises sociales et solidaires porteuses de projets à haut potentiel, capables de devenir les locomotives de leur secteur.

La Région souhaite les faire éclore à grande échelle, surtout dans les secteurs d’avenir que sont la silver économie, les industries culturelles et les circuits courts. Un accélérateur régional devrait voir le jour, destiné à ces champions et calibré pour booster leur croissance grâce à un soutien financier et des conseils sur mesure.

Pour que l’ESS prospère et s’émancipe, elle doit aussi avoir sa part dans la commande publique, et la Région compte bien mettre en place les moyens nécessaires pour faciliter cet accès. Avec un Schéma de Promotion des Achats Responsables, elle veut ouvrir aux entreprises de l’ESS les marchés publics régionaux, jusqu’à créer une plateforme unique pour les achats responsables.

Cette dernière permettrait aux établissements régionaux, dont les 180 lycées, de privilégier les circuits courts et de renforcer leurs liens avec les entreprises locales.

La Région prévoit aussi de développer le modèle coopératif par une bourse émergence, dédiée aux SCOP et SCIC, ces sociétés coopératives souvent exemplaires dans la gestion solidaire et les transmissions intergénérationnelles.

Faire tomber les frontières entre l’ESS et l’économie classique

Le deuxième axe de cette stratégie vise à rapprocher l’ESS et l’économie classique, pour que les frontières entre les deux se fondent peu à peu en une collaboration mutuellement bénéfique.

Ce n’est pas qu’une question de valeurs partagées, mais de pragmatisme économique : l’ESS a déjà prouvé sa capacité à produire des solutions innovantes, et le secteur classique pourrait tirer parti de ce savoir-faire.

La Région prévoit ainsi des rendez-vous Achats responsables pour valoriser les services de l’ESS et encourager les grandes entreprises locales à s’engager avec des partenaires ESS, notamment lors de salons et d’événements économiques. En s’intégrant aux chaînes de valeur classiques, l’ESS pourra se solidifier et créer des synergies avec les entreprises régionales.

Pour cela, la Région ne ménage pas ses efforts : elle ouvre l’accès aux Opérations d’Intérêt Régional, permettant aux entreprises de l’ESS d’intégrer des projets d’envergure en économie circulaire, recyclage, énergie renouvelable, et même dans des domaines plus récents comme les ressourceries et les circuits alimentaires courts.

Une stratégie pour les territoires ruraux et les QPV

C’est dans ce troisième axe que l’ESS prend toute son ampleur en répondant aux besoins spécifiques des territoires et à un défi de taille : le vieillissement de la population. Avec une moyenne d’âge toujours plus élevée – un habitant sur trois aura plus de 60 ans d’ici 2040 – le besoin en services de proximité et en aides à la mobilité se fait pressant, surtout dans les zones rurales et périurbaines.

La Région compte bien mobiliser l’ESS pour accompagner cette transition démographique. Elle veut développer des initiatives sociales et innovantes qui permettent de répondre à la dépendance croissante, de renforcer les services à la personne, de favoriser la mobilité douce et d’assurer aux habitants un environnement de qualité.

Dans les territoires éloignés des grands centres, l’ESS reste souvent la seule source de services de proximité, de mobilités durables, et de soutien aux initiatives sociales locales.

Au-delà des services aux personnes âgées, ce sont les territoires ruraux eux-mêmes qui bénéficient de cette attention portée à l’ESS. La Région s’inspire de modèles comme celui de la filière « Arômes, Saveurs, Senteurs » dans le Pays de Grasse pour structurer et renforcer l’économie locale.

Ce type de filière démontre qu’en ancrant les entreprises sur place et en répondant aux besoins spécifiques, il est possible de créer des emplois non délocalisables, de maintenir des services essentiels et de revitaliser des zones en perte de vitesse.

Une gouvernance à la hauteur des ambitions

Mais pour orchestrer ce vaste projet, il faut une gouvernance adaptée. La Région mise sur la création d’un Conseil régional de l’ESS pour centraliser les efforts et coordonner les initiatives.

Ce conseil réunira les principaux réseaux d’accompagnement et opérateurs institutionnels de l’ESS, pour garantir une visibilité et une cohérence maximale dans les actions régionales.

Pour compléter ce dispositif, une plateforme d’information unique permettra aux porteurs de projets d’avoir un accès simplifié à toutes les informations, financements et services disponibles.

Enfin, pour consolider le financement des projets, la Région rassemble les différents financeurs dans une « communauté des financeurs solidaires ». Ce groupement visera à coordonner les fonds publics et privés, à simplifier l’accès aux aides pour les porteurs de projet, et à maximiser l’efficacité des investissements, surtout dans les phases cruciales d’amorçage.

L’idée est de créer un écosystème ESS fluide, où les synergies entre financeurs, porteurs de projets et institutions publiques se tissent naturellement.