Marseille face à ses défis budgétaires

Entre explosion des dépenses, recettes en berne et investissement nécessaire, la mairie de Marseille navigue à vue dans un contexte économique qui n’épargne personne.

À Marseille, la gestion des finances publiques ressemble de plus en plus à un exercice d’équilibriste pour l’équipe municipale. Contrainte par une augmentation exponentielle des dépenses de fonctionnement, la majorité dirigée par Benoît Payan fait face à des choix difficiles.

Avec une hausse de 8,5 % des dépenses en 2023, la Ville voit son budget alourdi par les frais de personnel, qui représentent désormais près de 60 % des dépenses réelles de fonctionnement. La réévaluation des salaires, décidée pour faire face à la crise du pouvoir d’achat, pèse lourdement sur les comptes, malgré les efforts de sobriété énergétique mis en place par la municipalité.

Pour l’équipe en place, ces dépenses sont justifiées par la volonté de maintenir des services publics accessibles et de renforcer la justice sociale. Mais dans un contexte de resserrement budgétaire, les marges de manÅ“uvre s’amenuisent rapidement.

Recettes : une dynamique à bout de souffle

En parallèle, les recettes de la ville ne suivent pas la même dynamique. Avec une baisse de 4 % des recettes fiscales en 2024 et un marché immobilier en berne, la Ville est privée de marges de manœuvre.

Les droits de mutation liés au marché immobilier, sont en chute libre, avec une baisse de 15 % prévue cette année, alors qu’ils représentent une source essentielle de revenus. La taxe foncière, revalorisée de 2,1 %, reste insuffisante pour combler les besoins croissants.

Des investissements ambitieux, mais coûteux

Alors que la municipalité avait réussi à réduire sa dette de 300 millions d’euros en quatre ans, les efforts de rigueur budgétaire risquent d’être balayés par les récentes décisions du gouvernement.

Avec la suppression de 27 millions d’euros de dotations de l’État, la Ville voit son équilibre financier fragilisé. Joël Canicave, adjoint aux Finances, a profité d’une conférence de presse pour tirer la sonnette d’alarme : « Les collectivités territoriales, comme Marseille, sont aujourd’hui en première ligne des politiques d’austérité », a-t-il averti.

Selon le chef de file du Printemps marseillais, la suppression des dotations constitue une « injustice budgétaire » envers une ville qui s’est engagée dans un processus de « redressement financier exemplaire ».

Cette coupe associée à la baisse des recettes fiscales fragilisent les projets, menaçant de ralentir le rythme des transformations attendues pour la ville. Le plus inquiétant, selon Joël Canicave, est l’impact potentiel sur les services publics et les agents territoriaux, en première ligne face à ces restrictions budgétaires. « Si nous réduisons encore nos investissements, ce sont les Marseillais qui en souffriront directement », a-t-il averti.

Il espère que la situation de Marseille sera entendue à Matignon, afin de permettre à la ville de maintenir le cap sans compromettre ses projets. Car malgré ce contexte tendu, la municipalité continue de défendre une stratégie d’investissements.

En 2024, plus de 270 millions d’euros seront alloués à des projets structurants, notamment la rénovation des écoles (via le plan Marseille en grand) et d’autres infrastructures clés.

La Mairie devra trouver le bon équilibre entre ambition et pragmatisme, sous peine de voir ces projets ralentis ou reportés faute de financements suffisants.

Benoît Payan alerte sur des coupes « violentes »

Dans ce climat sous-tension, Benoît Payan était justement à Paris ce lundi pour plaider la cause de la deuxième ville de France. Le maire divers gauche a profité de son passage sur franceinfo pour dénoncer les économies drastiques imposées par l’État. « Marseille, deuxième ville de France, va être très violemment impactée », a-t-il déclaré, en référence à l’effort de 5 milliards d’euros d’économies demandé aux collectivités locales pour 2025.

L’édile a mis en avant l’impact direct de ces mesures sur les services publics locaux, se demandant s’il devrait « choisir entre embaucher des policiers municipaux ou des personnels dans les écoles ? Arrêter de construire des gymnases ou des bibliothèques ? Fermer des musées ? ».

Le nouvel appel à la solidarité nationale

Benoît Payan ne cache pas son amertume face aux mesures prises par le gouvernement, évoquant notamment « un coup de massue » porté aux collectivités par Michel Barnier. Il critique une approche qui « tape partout », affectant aussi bien les enseignants, les retraités que la santé publique.

Benoît Payan, tout comme Joël Canicave, espère encore que le Parlement ajustera ces mesures, mais redoute un recours au 49.3 pour forcer le passage du budget.

Malgré ce contexte, le maire garde espoir en misant sur le plan « Marseille en Grand », ce projet d’investissement de 5 milliards d’euros lancé par Emmanuel Macron en 2021 pour moderniser la ville. Le maire a assuré que la sanctuarisation de ce plan est « quasiment actée », tout en soulignant l’immensité des besoins d’une ville aussi vaste que Marseille.

N.K.