Dans les Bouches-du-Rhône, les Républicains en quête d’un nouveau souffle

Laure-Agnès Caradec, présidente de la fédération Les Républicains des Bouches-du-Rhône. © N.K.

Laure-Agnès Caradec, présidente de la fédération LR des Bouches-du-Rhône, revient sur les défis politiques de la droite dans le département et à Marseille. Entre reconstruction locale et stratégie nationale, la droite républicaine cherche à se réinventer. Un chantier de longue haleine pour renouer avec un électorat désorienté.

Dans un paysage politique fragmenté, où les extrêmes saturent l’espace médiatique, Laure-Agnès Caradec s’efforce de réaffirmer les valeurs d’une droite républicaine à la fois ferme et rassembleuse.

À 52 ans, la présidente de la fédération LR des Bouches-du-Rhône n’a pas l’intention de laisser sa ville, ni son parti, sombrer dans l’indifférence ou la résignation.

Pour elle, Marseille, comme les Bouches-du-Rhône, a encore tout à gagner d’une droite gaulliste solide, ancrée dans les valeurs du travail, de la sécurité, de la cohésion sociale, du respect de l’ordre et de la loi, tout en trouvant un équilibre entre renouvellement et expérience.

Une nouvelle dynamique freinée

En janvier dernier, fraîchement élue à la tête de l’instance du 13, Laure-Agnès Caradec souhaitait insuffler une nouvelle dynamique en vue de 2026. Avec un leitmotiv : réveiller la fédération.

C’était sans compter sur la dissolution surprise de l’Assemblée nationale, le ralliement au RN de l’ex-patron de la droite, Éric Ciotti, et la longue, très longue attente pour la composition d’un nouveau gouvernement. « Emmanuel Macron a explosé les partis traditionnels », lance-t-elle, dressant un constat sans appel sur la recomposition actuelle, au sein de laquelle Les Républicains peinent à se (re)positionner.

Barnier, une figure de stabilité, mais…

Dans ce contexte, le retour de Michel Barnier dans l’arène politique, à 73 ans, incarne toutefois pour elle une figure de stabilité : « Avec son âge et son expérience », le négociateur du Brexit est « un homme de dossiers », capable de « ramener une certaine stabilité » dans un pays en quête d’autorité et de sagesse. Et au passage, sans être éclaboussé par les affaires.

Si Laure-Agnès Caradec se retrouve en accord avec le chef du gouvernement sur plusieurs aspects, elle marque une différence notable sur la question du pouvoir d’achat. « Pour moi, ce n’est pas un marqueur de droite. Nous devons avant tout faire des économies. Il existe des centaines d’agences dans lesquelles on peut réduire les dépenses. Je pense qu’il faut explorer ces pistes plutôt que d’alourdir encore la charge fiscale des Français, déjà parmi les plus taxés au monde. »

Elle le dira haut et fort lors de la prochaine réunion publique prévue le 15 octobre, histoire de remobiliser les troupes, sans éluder les défis que la droite doit relever.

Marseille, l’urgence sécuritaire

L’un des grands marqueurs de ce renouveau, c’est de réaffirmer les valeurs historiques du parti. La présidente le voit dans un discours ferme sur la sécurité, la lutte contre l’immigration clandestine et l’islamisme radical.

Ce discours, porté par Bruno Retailleau, ministre (LR) de l’Intérieur, est pour elle un moyen de reconnecter la droite avec son électorat traditionnel, déçu par des années de demi-mesures. « Cela correspond à la volonté de 90% des Français qui se sont exprimés dans les urnes lors des dernières législatives. »

À Marseille, la droite doit retrouver un visage capable de mobiliser les électeurs et de répondre aux préoccupations immédiates comme la sécurité. La ville est gangrenée par la délinquance et l’insécurité, illustration même, pour elle, d’une gouvernance marseillaise laxiste. « Aujourd’hui, des personnes âgées n’osent plus sortir le soir, et les jeunes se font voler leurs affaires dans les transports. »

La ville a besoin d’un « retour à l’ordre et au respect de l’espace public ». La solution passe « par une coordination renforcée entre la police nationale et la police municipale, et un usage accru de la vidéoprotection ». Elle déplore notamment le manque d’arrêtés municipaux, essentiels pour permettre à la police d’agir efficacement. « Sans arrêté anti-vente à la sauvette, par exemple, les forces de police ne peuvent ni saisir le matériel ni verbaliser », explique-t-elle.

Pour l’élue d’opposition au conseil municipal, le maire de Marseille est pris au piège d’une majorité disparate, dominée par des sensibilités écologistes, qui freinent les décisions majeures en matière de sécurité et d’urbanisme. « Il est bloqué par des compromis internes qui l’empêchent d’agir efficacement. »

Se préparer pour les municipales de 2026

Si Marseille reste une priorité, Laure-Agnès Caradec entend préparer l’avenir à l’échelle départementale dans la perspective des futures échéances électorales. « Nous avons encore un certain nombre de maires de droite dans le département », pose-t-elle au préalable, « mais il faut aussi se préparer pour les municipales. Dans certaines mairies où les maires ne se représentent pas, il faudra trouver une relève. Il ne faut pas que ces communes tombent dans d’autres mains, nous devons être prêts. »

Pour remédier à cela, elle prévoit de relancer des groupes de réflexion et d’inciter les militants à s’impliquer dans la construction du programme. Elle souhaite que les militants jouent un rôle actif dans l’élaboration des propositions, mais autour de qui ?

Un besoin d’incarnation pour la droite

La présidente de la fédération n’est pas de celles qui souhaitent jouer la montre autour de l’incarnation.

Ce besoin est urgent, que ce soit à Paris ou à Marseille. « Il faudra rapidement s’accorder sur une personnalité », souligne-t-elle, « car c’est elle qui pourra fédérer autour d’un projet. »

Des figures comme Laurent Wauquiez et David Lisnard, déjà perçues comme des incarnations possibles du renouveau, pourraient jouer ce rôle. Mais pour Caradec, il y a un préalable incontournable : revoir les statuts. « Tant que tout va bien, les statuts actuels fonctionnent, mais dès qu’un problème survient, tout se concentre entre les mains d’un seul. »

Elle plaide pour une gouvernance « plus collégiale » et met en garde contre les divisions internes : « Nous devons éviter de retomber dans un psychodrame des primaires », insiste-t-elle, plaidant pour un ralliement autour d’un candidat unique.

Renouvellement et alliances nécessaires

La droite ne pourra pas – de toute façon – se reconstruire sans un renouvellement générationnel, mais elle prévient : « Je suis convaincue que c’est une solution, mais ce n’est pas pour autant qu’il faut mettre tous les élus actuels à la poubelle. Il faut renouveler avec des personnes qui ont peut-être un prisme différent, des idées nouvelles. Il faut un équilibre entre le renouveau et l’expérience », estime-t-elle, rappelant que des figures historiques de la droite républicaine ont encore un rôle à jouer dans cette transition.

Lucide en vue des élections municipales de 2026, Laure-Agnès Caradec sait que la droite républicaine ne pourra pas conquérir Marseille seule. « Il faudra des alliances plus larges, c’est une évidence », reconnaît-elle. Mais ces alliances devront être faites avec soin. « Il ne s’agit pas de trahir nos valeurs pour former des coalitions artificielles », prévient-elle, soulignant la nécessité de rester fidèle aux fondamentaux de la droite.

Elle admet que certains électeurs pourraient percevoir ces alliances comme des trahisons, mais selon elle, elles sont indispensables pour battre la majorité actuelle. Un chantier ambitieux, pour une droite en quête de renaissance.

N.K.

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