Ouvert en 2022, Olab est devenu un lieu incontournable pour les amateurs de photographie argentique à Marseille. Fondé par Damien Chamcirkan, le laboratoire ne cesse de croître, avec un projet de deuxième boutique à l’horizon 2025. Entre développement, expositions et ateliers, Olab fédère une véritable communauté autour de la pellicule dans la cité phocéenne.
« Photographier, c’est aligner la tête, l’œil et le cœur », disait Henri Cartier-Bresson. Une citation qui résonne particulièrement dans l’histoire d’Olab, né de cette union entre passion et technique.
Installé au 2, rue de la Bibliothèque, à deux pas de la Plaine, le laboratoire se distingue par sa façade rouge ornée de grandes lettres jaunes, un repère pour les photographes de la cité phocéenne.
Le projet a pris forme au Couvent Levat, dans le quartier de la Belle de Mai, avant de s’étendre pour répondre à l’engouement grandissant autour de la photographie argentique. « Je voulais créer un lieu fédérateur autour de l’argentique », explique Damien Chamcirkan, qui s’inspire de ses débuts dans le graffiti.
Originaire de Marseille, Damien Chamcirkan s’est lancé dans la photographie en 2006, après avoir documenté la street culture marseillaise. « À l’époque, il y avait un magasin, Comasound Kartel, où j’achetais mes bombes de graff. C’était un lieu de rencontres, un espace d’échange. Il n’existait rien de tel pour la photographie à Marseille, alors j’ai voulu créer ce lieu », raconte-t-il.
De la street culture à la chambre noire
Son premier appareil, un Pentax ME Super offert par sa mère, lui permet de découvrir la magie de la pellicule. « J’ai commencé en numérique, mais rapidement, je me suis lassé. Venant du dessin et du graffiti, qui sont des pratiques organiques, en 2016, je me suis tourné vers l’argentique. Je voulais retrouver ce contact avec la matière, loin de l’écran de Photoshop et des cartes mémoire », confie-t-il.
« J’ai commencé à bosser avec le numérique. Mais au bout d’un moment, j’ai commencé à m’ennuyer. Venant du dessin et du graff’ qui est quelque chose d’organique, en 2016, j’ai décidé de tester la photo argentique pour retrouver le côté palpable de la photographie. J’étais frustré de rester devant Photoshop et Lightroom avec ma carte mémoire », raconte-t-il.
De l’atelier personnel à une communauté créative
Damien cherche rapidement à approfondir sa pratique de la photographie. En 2017, il se rend à la Maison pour tous du Panier, où il rencontre Jean-Marie Plume, responsable du laboratoire sur place, qui l’initie aux techniques de développement argentique.
Cette découverte marque un tournant : « L’argentique est devenu une obsession. Je voulais un atelier à moi, une chambre noire où je pourrais développer mes propres tirages. »
En 2018, le photographe rejoint la résidence artistique du Couvent Levat. Pendant quatre ans, il y installe son laboratoire avec l’aide d’un ami, consacrant tout son temps à sa passion.
C’est là qu’Olab prend forme. « J’avais besoin de donner une identité à cet atelier, de créer un espace qui ne serait pas seulement pour moi. Mon objectif était déjà de fonder un lieu fédérateur autour de la photographie argentique », se souvient-il.
En moins d’un an, le projet prend de l’ampleur. Toujours au Couvent Levat, Olab déménage dans un espace plus grand, passant de 10 à 70 m². De laboratoire personnel, il devient une association ouverte, réunissant 14 passionnés.
Un studio photo, un bureau, et un laboratoire prennent vie grâce à une mutualisation des ressources et des compétences. Ensemble, ils organisent des expositions collectives et font vivre le lieu.
C’est également à cette époque que Damien commence à donner ses premiers cours de développement et de tirage noir et blanc à la main.
En 2020, comme une évolution naturelle, il décide de se lancer dans le développement couleur : « C’est une toute autre chimie, avec beaucoup plus de contraintes, notamment sur la température », explique-t-il, en évoquant ce nouveau défi. Une étape de plus dans la croissance d’Olab.
L’adaptation d’Olab en temps de pandémie
Avec la fin de plusieurs baux au Couvent Levat, une partie des membres d’Olab quitte l’aventure. Damien, quant à lui, commence à envisager une approche plus commerciale.
En pleine pandémie de Covid-19, alors que la plupart des laboratoires ferment leurs portes, il collabore avec le photographe marseillais Jean Kader pour proposer des services de développement et de numérisation, profitant de leur atelier non soumis aux restrictions de fermeture.
Ils trouvent un moyen ingénieux de maintenir leur activité : fixer des rendez-vous à La Plaine, là où les Marseillais profitaient de leur heure de sortie durant le confinement, prétextant des motifs soigneusement préparés. « Olab a alors amorcé sa transformation vers un projet plus commercial, » explique Damien Chamcirkan. « L’idée était de générer des revenus tout en continuant nos activités freelance. »
Après un an, Damien se retrouve seul à poursuivre l’aventure. Il rapatrie tout son matériel chez lui et met en place un système de dépôt, en utilisant la boutique d’un ami spécialisée dans les bombes de graffiti, située boulevard de la Libération.
Ce système fonctionne bien, et fort de ce succès, Damien décide de chercher un local pour ouvrir sa propre boutique.
La nouvelle vague de la photo argentique
En juin 2022, Damien trouve enfin l’endroit idéal pour son projet. Après quelques travaux, il ouvre Olab avec une alternante, Faty Morghati, qui est aujourd’hui manageuse à ses côtés. « Dès l’ouverture, on a été submergés de commandes. Le pari était gagné. J’avais déjà une communauté fidèle, et à Marseille, il y avait peu de concurrence. J’avais l’impression d’incarner une nouvelle vague de la photo argentique. »
L’objectif du business plan est atteint en seulement 15 jours, propulsant l’aventure d’Olab vers un succès inattendu. Aujourd’hui, le laboratoire compte cinq employés en plus de son fondateur.
Olab propose à ses clients, qu’ils soient de passage ou habitués, de développer et numériser leurs pellicules, en couleur ou en noir et blanc, en utilisant différentes techniques de scan et procédés de tirage. Les clichés peuvent être imprimés en formats 10×15 ou 20×30, avec un délai de traitement de 3 à 5 jours.
Deux types de scanners sont disponibles : le Fuji SP-500 et SP-3000, ainsi que le Noritsu HS-1800. Chaque option offre un rendu distinct, avec des variations dans la colorimétrie et le grainage, permettant aux clients de choisir le style qui correspond le mieux à leurs attentes.
Une communauté autour de l’argentique
En période de forte activité, Olab développe plus de 100 films par jour, en couleur et en noir et blanc. Le laboratoire propose aussi un service de réparation pour les appareils argentiques, souvent âgés de plusieurs décennies. Tommy, passionné d’argentique, s’occupe de la maintenance de ces bijoux mécaniques.
En boutique, Olab vend des appareils photo, principalement d’occasion, mais aussi des modèles neufs comme le Pentax 17. On y trouve aussi un large choix de pellicules : Portra 400, Fujifilm, Ilford, adaptées à chaque style.
Olab va au-delà du simple laboratoire : il organise des expositions, partage les clichés de ses clients (avec leur accord) sur les réseaux sociaux et propose des présentations de matériel. « Les photos sont faites pour être exposées, pas enfermées dans des disques durs », affirme Damien Chamcirkan.
Un samedi par mois, des ateliers permettent de s’initier aux techniques de développement et de tirage en noir et blanc. Dans une démarche durable, Olab fait appel à Chimirec pour collecter et retraiter les produits chimiques utilisés, respectant ainsi l’environnement.
Vers une deuxième boutique ?
Pour poursuivre sa mission de rassembler les passionnés d’argentique, Damien Chamcirkan envisage l’ouverture d’une deuxième boutique dans le même quartier d’ici 2025.
À l’étroit dans l’espace actuel, il souhaite séparer le laboratoire de la partie vente et disposer d’un espace plus grand pour organiser des expositions de plus grande envergure, tout en créant un lieu dédié à l’échange et au partage.
En octobre, Olab célébrera ses deux ans avec un événement festif : DJ invité, apéro, et une exposition des clichés des clients. Chaque participant repartira avec un tirage offert de sa photo sélectionnée.
> Olab, 2, rue de la Bibliothèque, 13001 Marseille
Rudy Bourianne
Rudy Bourianne est journaliste.