SOS Méditerranée : Marseille maintient son soutien malgré les tensions politiques

Marseille s’apprête à renouveler son soutien à SOS Méditerranée, mais la droite locale conteste le financement. Entre devoir humanitaire et gestion des flux migratoires, le contrat territorial d’accueil et d’intégration est aussi à l’ordre du jour du conseil municipal.

Ce 20 septembre 2024, le Conseil municipal de Marseille se prononcera sur la reconduction de son soutien à SOS Méditerranée. L’ONG, dont le siège est à Marseille, est essentielle au sauvetage en mer Méditerranée.

Alors que plus de 3 000 migrants ont péri dans ces eaux en 2023, cette subvention de 130 000 euros (dont 30 000 pour corriger une annulation partielle de 2021) suscite des tensions.

Marseille est l’un des premiers contributeurs parmi les 128 collectivités soutenant SOS Méditerranée.

Des personnalités comme Lionel Royer-Perreaut (ex-LR, Renaissance) et la sénatrice Valérie Boyer (LR) accusent Marseille d’encourager l’immigration clandestine.

Selon eux, ce soutien pourrait favoriser des migrations incontrôlées, ce qui, dans le contexte actuel, serait dangereux pour l’équilibre local. La sénatrice avait entre autres dénoncé en 2021 une « complicité avec le trafic d’êtres humains ».

Le soutien à l’humanitaire, une question d’identité pour la Ville

Pour Audrey Garino, adjointe aux solidarités (PCF), le soutien à SOS Méditerranée est « un choix d’humanité », et non une décision politique.

Cette position est renforcée par un arrêt du Conseil d’État de mai 2024, qui a clarifié les conditions légales permettant aux collectivités de soutenir des actions humanitaires internationales comme celles de SOS Méditerranée

L’ONG, avec son navire Ocean Viking, continue de porter secours aux migrants, malgré les restrictions imposées, notamment par l’Italie via le décret Piantedosi, qui limite les actions des ONG humanitaires​.

Le contrat territorial d’accueil et d’intégration : un sujet brûlant

Au-delà de SOS Méditerranée, le contrat territorial d’accueil et d’intégration devrait aussi faire des vagues dans l’hémicycle municipal. Ce dispositif, cofinancé par l’État, mobilise 540 000 euros pour aider les exilés à accéder au droit, à l’emploi et au logement.

Si la majorité défend ce contrat, la droite y voit une incitation à une immigration incontrôlée, aggravant la précarité locale. Valérie Boyer estime qu’il s’agit d’ouvrir la porte à des flux migratoires difficiles à gérer. Pour la majorité, il s’agit d’accompagner des populations vulnérables tout en préservant l’équilibre social de la ville.

Marseille, carrefour migratoire et acteur humanitaire majeur

Lors de sa visite à Marseille en septembre, le Pape François a dénoncé la transformation de la Méditerranée en « immense cimetière », appelant à redonner à cette mer son rôle de carrefour de paix et de solidarité. Un message qui trouve un écho dans les actions de SOS Méditerranée, mais qui révèle aussi la complexité de la situation.

Si sauver des vies est un impératif légal et moral, la question de l’accueil est plus floue. Les pays européens rechignent à trouver un accord sur une répartition équitable des migrants, créant ainsi une tension permanente entre le devoir humanitaire et les politiques migratoires restrictives.

Le vote de la nouvelle délibération marseillaise, bien que local, s’inscrit dans un débat bien plus large. Car au-delà du soutien financier à SOS Méditerranée, se cache une vérité difficile à ignorer : tant que les États européens ne s’accorderont pas sur une politique commune d’accueil, l’humanitaire restera pris en étau entre des devoirs légaux et des réalités politiques complexes.

Pour Marseille, l’engagement est clair. Mais la ville, aussi symbolique soit-elle, ne pourra pas à elle seule résoudre les divisions qui fracturent l’Europe sur la question migratoire.

ECLAIRAGE.
Un enjeu humanitaire et légal : le droit maritime international. Le soutien à SOS Méditerranée repose sur des bases légales et morales solides. Le droit maritime international impose en effet un devoir de secours en mer : tout navire doit porter assistance à des personnes en détresse, qu’elles soient migrantes ou non. Cet impératif est inscrit dans les conventions internationales que la France et de nombreux autres États ont ratifiées. Ce devoir de sauver des vies transcende les considérations politiques locales et nationales, ce qui rend encore plus aigu le débat autour du financement public.