Dans l’enceinte historique du Château Forbin, la droite marseillaise a rassemblé ses troupes pour reprendre la ville en 2026. Une nouvelle génération, convaincue que l’actuelle majorité est déconnectée et inefficace, se voit en Avengers prêts à sauver la cité phocéenne. Leur mission ? Renverser Benoît Payan, restaurer l’ordre, et redonner à Marseille l’élan qu’elle mérite.
L’ambiance est décontractée. Le décor est à la hauteur de l’ambition : le Château Forbin, joyau architectural du 11e arrondissement. Ce lieu chargé d’histoire, cher à Marcel Pagnol, devient le symbole d’un avenir à conquérir. Sous un ciel d’été déclinant, les jeunes loups de la droite marseillaise affûtent leurs griffes, prêts à en découdre.
Les Universités d’été, orchestrées par « Cap sur l’Avenir », « Marseille Provence Unie » et « Une Génération pour Marseille », ont attisé les esprits. Désormais, l’heure est à l’action.
L’objectif est clair : déloger Benoît Payan de l’Hôtel de Ville en 2026. La bataille commence ici, dans cette bâtisse où se tisse déjà le scénario du renversement.
Le diagnostic brutal
« Si nous sommes là aujourd’hui c’est clairement et de manière assumée pour lancer 2026 d’une seule et même voix, tout en continuant à travailler au quotidien pour vous dans les responsabilités qui sont les nôtres », lance sans détour Sylvain Souvestre maire (LR) des 11-12, devant les quelque 400 personnes présentes.
Ludovic Perney ne perd pas de temps. « Marseille souffre de la maladie de l’insécurité », déclare le vice-président (LR) de la Région, les yeux fixés sur les chiffres : 49 assassinats en 2023. Une ville prise en otage par la peur et les trafics. Puis vient le coup de grâce : « Le maire socialiste ferait bien de quitter sa tour d’ivoire, de descendre de sa voiture avec chauffeur et gyrophare pour affronter la réalité. » Boum. Les mots claquent comme une gifle.
Le jeune politicien accuse un Benoît Payan déconnecté, loin des souffrances d’une ville qui suffoque. « Il ne pense qu’à son élection, car ce n’est pas une réélection », ajoute-t-il, déclenchant des rires complices parmi ses partisans.
Mais l’insécurité n’est que le symptôme d’un mal plus profond. Romain Simmarano, un autre jeune loup, décrit une ville « embourbée dans l’immobilisme » depuis que les « wokistes » ont pris les commandes.
Le ton est donné : ici, on veut de l’action, on veut du concret, on veut voir Marseille briller à nouveau. « Nous devons mettre fin à cette inertie, proposer une alternative solide, fondée sur l’unité et le travail collectif », insiste le directeur de cabinet de Renaud Muselier, à la tête du collectif Génération pour Marseille.
Un début de feuille de route pour 2026
Personne n’est venu faire de la figuration. Tous entendent jouer un rôle. « Les Marseillais attendent une alternative crédible », martèle Aurore Bruna. La conseillère régionale (DVD) refuse les « beaux discours » qui n’engagent à rien.
La sécurité, oui, mais aussi l’économie, le logement, la qualité de vie. « Il est inadmissible qu’à Marseille, tant de gens peinent à se loger décemment », martèle-t-elle, au risque de réveiller les fantômes des effondrements de la rue d’Aubagne, souvenirs douloureux que beaucoup attribuent à l’ère Gaudin. Qu’importe les responsabilités passées, la jeune femme veut du concret. Et vite.
Cette bataille résonne comme une opportunité unique pour la cofondatrice d’une Génération pour Marseille, Sandra Blanchard. « Marseille, c’est la ville de tous les possibles, un laboratoire d’innovation et de créativité », s’enthousiasme l’ex-directrice de campagne de Sabrina Agresti-Roubache. « Il est temps de sortir Marseille de l’ornière », martèle-t-elle, portée par une vision claire : « une ville où il fait bon vivre, où chacun a sa place ». « Une ville où il fait bon entreprendre », ajoute Romain Simmarano, les yeux fixés sur un avenir à façonner.
Pour lui, Marseille est comme une plaie béante, nécessitant une intervention chirurgicale urgente. « Marseille mérite mieux, elle mérite une équipe capable de la porter vers l’avenir, de lui redonner l’élan qu’elle a perdu », affirme celui qui mène Génération pour Marseille avec une détermination sans faille.
Le vent du renouveau souffle sur le Château Forbin, où semble naître une équipe d’« Avengers » appelés à sauver une ville en perdition. Leur mission ? Transformer « ce déclin » en renaissance. « Nous avons des adversaires redoutables. Aucun cadeau ne nous sera fait. Nous devons chasser en meute », insiste Romain Simmarano : « La balle est dans notre camp ».
Et « il n’y aura comme on dit ici « pas d’arrangement » avec cette municipalité printano-nupo-NFP quelle que soit la configuration politique, tance Sylvain Souvestre. Donc pendant que lui (Benoît Payan) ne pense qu’à son élection, et non sa réelection je le rappelle, qu’il n’attende rien de notre part après cette trahison des Marseillais non pas uniquement avec son jeu de chaise musicale, mais par leur inaction !«
L’unité ou rien, les vieux briscards en observateurs… pour l’instant
En arrière-plan, les vieux briscards de la droite observent. Renaud Muselier, fin stratège, sait que l’unité sera décisive. « Ma génération n’a pas le bon profil. Nous portons les travers du passé et devons assumer le bilan Gaudin. Nous devons pousser une jeune génération que nous avons aidée, des gens compétents, qui savent s’exprimer, qui savent travailler, admet-il sans détour. L’unité ne garantit pas la victoire, mais son absence est une garantie de défaite. »
Pas de place pour les ego démesurés : ici, c’est l’unité ou rien. L’ex-LR, désormais chez Renaissance est inflexible : « Le premier qui tentera une aventure personnelle sera immédiatement exclu du dispositif. »
Un avertissement à peine voilé à Frédéric Collart, absent ce soir-là. Le chirurgien marseillais et figure de la droite lancera son mouvement « Marseille à cœur » le 26 septembre prochain.
Renaud Muselier reste pragmatique : « Pas de réforme de la loi PLM, cela veut dire qu’on peut gagner. » Mais il ne se berce pas d’illusions.
La bataille s’annonce rude. Alors, la règle des additions des bonnes volontés refait surface : « C’est la convergence de nos compétences, de nos sensibilités, qui fera notre force. On a besoin de tout le monde, de la droite républicaine aux centristes, en passant par les libéraux. »
Martine Vassal, gardienne d’un cap
Martine Vassal ne laisse rien au hasard. La présidente (DVD) du Département des Bouches-du-Rhône et de la Métropole Aix-Marseille Provence a d’abord salué la fougue de cette jeunesse, avant de mettre en garde contre les pièges tendus par les médias et les adversaires : « Ils essaieront de vous imposer leur timing, mais nous devons rester maîtres du nôtre », prévient-elle, avec l’assurance de celle qui a déjà vu défiler bien des tempêtes. Pour l’élue, la clé, c’est une stratégie solide, taillée pour le long terme.
Mais la patronne ne s’arrête pas là. Elle liste les maux de Marseille : un logement en crise, une sécurité en berne, une fracture sociale qui s’élargit chaque jour. Et si elle entend garder son emprise sur les deux institutions qu’elle préside, elle entretient le flou sur ses ambitions pour la mairie. « Vouloir être élu ne suffit pas, encore faut-il savoir pour quoi faire », lâche-t-elle.
Et d’insister sur l’importance de l’unité et de la cohésion pour surmonter ces obstacles et redonner à Marseille son statut de grande ville méditerranéenne. « Seul, on va plus vite, mais ensemble, nous irons beaucoup plus loin », conclut-elle, comme un mot d’ordre pour la suite.
Le mystère du leadership
Les « lignes rouges » de cette nouvelle dynamique sont désormais tracées. « Il n’y aura aucune compromission avec la majorité actuelle, aucune, jamais. C’est une ligne rouge absolue et infranchissable. » Le renouveau de Marseille passe aussi par un rejet sans appel des extrêmes, qui sont « de toute façon et par nature, un poison pour toute forme de projet politique. »
Ce rassemblement, en tout cas, a eu le mérite de resserrer les rangs de la droite marseillaise.
Les figures historiques et les centristes, tous (ou presque) étaient présents. De Valérie Boyer à Laure-Agnès Caradec, des élus de la Métropole, du Département, de la Région, sans oublier Bruno Gilles, ex-LR désormais chez Horizons, qui avait fait dissidence en 2020.
Même l’ancien ministre macroniste Christophe Castaner, président du conseil de surveillance du port Marseille-Fos, a jugé bon de faire acte de présence. À leurs côtés, Grégory Alione, fraîchement élu député européen, et Patrick De Carolis, maire (Horizons) d’Arles, ont eux aussi répondu à l’appel, renforçant ce nouvel élan collectif.
Mais la question brûlante reste en suspens : derrière quel leader cette droite disparate se rangera-t-elle pour 2026 ? Les spéculations vont bon train, mais aucun nom ne s’impose encore. Pour l’instant, le Château Forbin résonne des échos de cette ambition collective et de « Nous sommes Marseille » comme un cri de ralliement.
On disait autrefois d’un homme qu’il était Marseille. La droite marseillaise, enfin guérie de ses plaies de 2020, se relève, déterminée à « chasser en meute » pour reprendre Marseille. Prête à ne laisser aucune prise à ceux qui voudraient la voir sombrer.