L’Autorité environnementale étrille le projet de zone logistique du port Marseille-Fos mais propose des issues

© GPMM

L’extension de la Zone de Services Portuaires (ZSP2) du Grand Port Maritime de Marseille est sous le feu des critiques de l’Autorité environnementale. L’avis rendu le 25 juillet 2024 pointe les failles du projet, tout en ouvrant la voie à des améliorations possibles pour limiter les dégâts écologiques.

Le Grand Port Maritime de Marseille (GPMM) ambitionne de renforcer sa position de premier port français en étendant sa Zone de Services Portuaires (ZSP2) à Fos-sur-Mer et Port-Saint-Louis-du-Rhône.

Mais cette stratégie de développement n’a pas échappé à l’œil critique de l’Autorité environnementale (Ae). Réuni en visioconférence, le 25 juillet 2024, le collège d’experts a rendu un avis qui épingle sévèrement le projet, tout en proposant des mesures correctrices.

Le projet ZSP2, prévu pour s’étendre sur environ 36 hectares, vise à accroître la capacité du port en matière de stockage, de lavage, d’entretien et de réparation de conteneurs vides. Située entre les terminaux conteneurs de la darse n°2 et la zone logistique Distriport, cette nouvelle infrastructure s’étalera sur les communes de Port-Saint-Louis-du-Rhône et Fos-sur-Mer.

Elle comprend également une cour ferroviaire de 5,3 hectares destinée à faciliter l’expédition de conteneurs par train, réduisant ainsi la dépendance au transport routier et les émissions de gaz à effet de serre.

Avec un coût estimé à 36,6 millions d’euros, l’extension s’inscrit dans une stratégie de développement ambitieux du GPMM. Mais derrière cette vision de modernité se cachent des lacunes environnementales que l’Ae n’a pas manqué de souligner.

SUR LE MÊME SUJET



Absence de scénario de référence : une faille majeure

Premier grief de l’Ae : l’absence de scénario de référence. « Cette omission fragilise les évaluations présentées », déplore l’autorité. Sans ce point de comparaison, impossible de juger les réels effets du projet par rapport à l’évolution naturelle du site.

Les préoccupations écologiques sont tout aussi pressantes. Le site de l’extension, riche en biodiversité, présente des enjeux environnementaux majeurs. L’Ae considère que les mesures compensatoires actuelles sont « insuffisantes ». Elle recommande une protection réglementaire renforcée des milieux naturels épargnés par le projet.

Émissions de gaz à effet de serre : des calculs à réviser

Les risques d’inondation par débordement du Rhône ou submersion marine constituent une autre source d’inquiétude. Le site, exposé aux débordements du Rhône et aux submersions marines, n’a pas fait l’objet d’une analyse complète et détaillée. L’Ae appelle à une étude approfondie, prenant en compte les dernières projections climatiques, pour éviter des erreurs coûteuses à l’avenir.

L’évaluation des émissions de gaz à effet de serre (GES) est un autre point noir. L’Ae critique l’utilisation d’outils de calcul obsolètes et demande une mise à jour des méthodes. « Les hypothèses doivent être solides et cohérentes », insiste le rapport, afin de fournir une estimation plus précise des impacts.

L’analyse des effets cumulés avec d’autres projets portuaires est jugée insuffisante, ce qui inquiète particulièrement dans un contexte de développement rapide du port. L’Ae préconise une définition plus claire des mesures d’évitement, de réduction et de compensation proportionnées aux incidences cumulées.

Des recommandations pour un projet plus vert

Malgré ces critiques sévères, l’Ae ne ferme pas la porte à des améliorations. Parmi celles-ci, la mise en place de mesures de protection renforcées pour les milieux naturels, l’intégration d’une analyse complète des risques d’inondation, et l’adoption de dispositifs de suivi environnemental rigoureux, assortis de mesures correctives.

Pour réduire l’impact sur le trafic routier et les émissions de gaz à effet de serre, l’Ae insiste sur l’importance de réaliser rapidement les infrastructures ferroviaires prévues.

Elle soutient que le développement du trafic ferroviaire de conteneurs pourrait significativement atténuer les émissions liées au projet. En facilitant l’expédition par train, le port pourrait économiser jusqu’à 16 millions de kilomètres poids lourds par an, contribuant ainsi à une réduction significative des émissions de CO2.

L’avis de l’Ae est un rappel des défis environnementaux que pose le développement portuaire. Pour le GPMM, il s’agit désormais d’équilibrer ses ambitions économiques avec une nécessaire préservation de l’environnement. Le port de Marseille-Fos, moteur économique régional, est donc invité à prouver qu’il peut concilier croissance et écologie.