À quelques jours de la décision du CIO sur l’accueil des Jeux olympiques d’hiver 2030, les Alpes françaises naviguent entre espoir et incertitude. Renaud Muselier, président de la région Sud, partage ses sentiments ambivalents à l’approche de cette annonce prévue le 24 juillet.
Tic, tac. L’heure approche. Le 24 juillet prochain, à deux jours de la cérémonie d’ouverture de Paris 2024, le Comité international olympique (CIO) devrait révéler son choix pour les Jeux olympiques et paralympiques d’hiver 2030. Les régions Sud et Auvergne-Rhône-Alpes, unies dans une candidature commune, visent à allier compétition sportive et enjeux environnementaux.
Après plusieurs mois de dialogue exclusif avec les Alpes françaises, le CIO « a écarté les candidatures suisses et suédoises, jugées moins performantes, estime le président de la Région Sud, qui oscille entre « un double sentiment de confiance et d’inquiétude. Confiant, car des engagements ont été pris par l’État français, les deux régions, le Comité national olympique, et toutes les fédérations sportives pour soutenir notre candidature, » confie Renaud Muselier au Méridional, en marge de la présentation de deux navettes maritimes destinées à sécuriser les JO dans la rade marseillaise.
Un soutien institutionnel solide mais une garantie financière manquante
Cette confiance est renforcée par le soutien explicite du CIO, mais l’absence d’une lettre de garantie financière du gouvernement reste une ombre au tableau. « Nous n’avons pas cette lettre d’engagement du gouvernement » réaffirme Renaud Muselier, « mais sans garantie, nous ne pourrons pas avancer. Mais, je ne peux pas imaginer que nous n’obtenions pas cette garantie. »
La situation politique actuelle dans le pays, marquée par la dissolution de l’Assemblée et la récente démission du gouvernement de Gabriel Attal, complique les choses. Emmanuel Macron, fervent partisan de la candidature, cherche activement une solution avec Thomas Bach, président du CIO.
Le budget prévu s’élève à 1,9 milliard d’euros pour l’organisation et 600 millions d’euros pour la livraison des infrastructures, financé à parts égales par l’État et les régions. La gouvernance du projet demeure incertaine, notamment avec le départ de Laurent Wauquiez et les refus de Tony Estanguet et Martin Fourcade pour la présidence du comité d’organisation.
Parlant d’une potentielle fin de carrière avec les Jeux de Paris 2024, Cédric Dufoix, directeur des sites Sud pour les JO 2024, n’a pas exclu l’éventualité de faire partie de l’aventure. « Quand on aime ce secteur, qu’on aime y travailler, on ne peut pas ne pas penser qu’on va essayer de faire une petite pige sur les Alpes 2030 en espérant que le CIO va bien voter le 24 juillet l’attribution de ce site magnifique que sont nos montagnes pour les Jeux d’hiver 2030, » a t-il déclaré lors de la visite du parc olympique de la Marina, cette semaine.
Des opportunités pour Provence-Alpes-Côte d’Azur
Si le CIO approuve la candidature le 24 juillet, les Alpes françaises auront cinq mois pour établir le Comité d’organisation des JO. La semaine prochaine, une carte des sites sera dévoilée, incluant potentiellement deux patinoires à l’Allianz Riviera de Nice, nécessitant la couverture du stade, ainsi qu’une nouvelle patinoire pour le patinage artistique et le short track.
Pour Renaud Muselier, l’accueil des Jeux représente une opportunité pour la région Provence-Alpes-Côte d’Azur, notamment pour les Hautes-Alpes, souvent confrontées à des défis de connectivité. Le 1er décembre dernier, le contrat de Plan État-Région (CPER) a été acté, incluant une annexe olympique qui prévoit de débloquer des moyens supplémentaires pour accélérer les projets d’infrastructure nécessaires en vue des Jeux olympiques. Cette loi d’exception vise la modernisation des axes routiers, la sécurisation des agglomérations et l’amélioration de la desserte ferroviaire.
Parmi les projets prioritaires du CPER figurent le contournement de Gap, l’aménagement de la RN 85, et des liaisons potentielles entre Gap, Grenoble, et Briançon.
La candidature des Alpes françaises bénéficie d’un soutien massif de la part de l’État, du monde sportif et économique, ainsi que de nombreux athlètes renommés. Le Medef Sud et le Medef Auvergne-Rhône-Alpes, ainsi que Domaines Skiables de France, se sont également engagés à soutenir cette initiative, mettant en avant les opportunités économiques et touristiques qu’elle représente.
Malgré ce soutien important, la candidature fait face à des critiques, notamment de la part du collectif « No JO » qui soulève des préoccupations environnementales et économiques. Les militants écologistes dénoncent le coût élevé et l’impact climatique des Jeux, appelant à une consultation citoyenne pour garantir la transparence et la légitimité du projet. Une demande que Renaud Muselier rejette fermement.
Une stratégie de développement régional malgré les oppositions
« En tant qu’élu, j’ai une stratégie de développement pour les Alpes. La réalisation de projets essentiels comme le train de nuit entre Marseille et Briançon ou la réduction des points noirs routiers dépend de l’obtention des JO, » poursuit Renaud Muselier. « 50% de mon territoire est constitué des Alpes, et je ne peux pas abandonner cette région sous prétexte qu’elle est moins peuplée,” poursuit-il, insistant sur les avantages à long terme que les Jeux apporteront à la région.
« Lors de la crise du COVID, nous avons aidé sans demander de référendum, et je prends mes responsabilités. Pour l’avenir, il est indispensable d’obtenir ces Jeux. Ceux qui s’opposent systématiquement doivent comprendre que ces projets peuvent résoudre de nombreux problèmes de manière intelligente. »
Les présidents régionaux restent combatifs. « On est à 5 mètres de la ligne d’arrivée, » conclut Renaud Muselier.
Héléna Darine et Rudy Bourianne