[Actualisation du 13 juillet : l’ouverture des Grandes Halles est décalée au lundi 18 juillet]
Il n’y a pas un siècle, ce qu’on appelle aujourd’hui le cours Honoré d’Estienne d’Orves avait des airs de Venise provençale : un « canal en u » prolongé du côté de la place aux Huiles et du cours Jean Ballard, qui laissera la place à un parking géant dans les années 1970. L’endroit, de nos jours très apprécié des Marseillais, a vu se succéder les siècles, et avec eux, leurs modes et leurs manies. C’est au 30 A du fameux cours, en face de l’ancien arsenal des galères, que veut s’écrire une nouvelle page de cette histoire. Gastronomique, en l’occurrence.
« Grande gueule, fine bouche » : une devise plutôt éloquente que Julien Fabre, l’un des fondateurs du projet des Grandes Halles du Vieux-Port, se plaît à souligner. « Un projet un peu fou, quand on y pense : développé en pleine crise du Covid, et peaufiné pendant deux ans et demi ! » Mais ça y est, après plusieurs reports de date, le lieu ouvrira ses portes ce 15 juillet.
Gastronomie et entrepreneuriat
Les trois fondateurs des Grandes Halles du Vieux-Port, Julien Fabre, Laurent Battisti et Reza Zographos, ont en commun l’amour de Marseille, de la gastronomie, et un passé d’entrepreneurs explicite. « On s’est payé le luxe d’imaginer nos halles idéales, répond le premier, quand on lui fait remarquer que les Halles de la Major occupent déjà le terrain de la Cité phocéenne. On a voulu s’installer ici, dans le cœur battant de la ville, au plus proche du Vieux-Port. »
Les fondateurs, comme les restaurateurs (pour une quinzaine d’échoppes), tiennent difficilement en place. Il faut dire qu’avec le soleil qui cogne et les bruits de verre, les éclats de voix sont un peu rehaussés, histoire de montrer à la presse « parisienne » qu’à Marseille, on sait travailler tout en profitant de la vie.
Que trouvera-t-on aux Halles ?
Ce 6 juillet, un petit travail d’imagination est encore nécessaire pour visualiser ce que seront les Halles à l’ouverture officielle. Mais on observe avec envie le four « à la napolitaine » de la future pizzeria.
Fruits et légumes frais, épices, charcuteries et viandes, fromages… « On entre, on achète ce qu’on veut, on mange debout, ou assis sur des grandes ou des petites tables… », explique Julien Fabre en ponctuant ses explications de gestes animés. « L’idée est de faire ses courses et de manger un bout », renchérit l’architecte d’intérieur Olympe Zographos. Cette dernière a conçu l’endroit avec cet objectif, faisant alterner les grandes tables avec les petites échoppes – la plus petite étant celle de notre ami Tobias, qui revisite les classiques des sandwiches français. Les habitués marseillais de la bonne chère ne seront pas dépaysés, puisqu’on retrouve par exemple « La Cave à jambon » ou encore « La Minotte » ; d’autres échoppes se lanceront pour la première fois.
Les commerces des Halles se concentreront au rez-de-chaussée (et en face, l’arsenal accueillera bientôt un marché paysan) – l’étage étant réservé aux bureaux et aux sanitaires. Mais le clou du spectacle reste sans doute la grande terrasse extérieure et le bar (synonyme de mixologie), qui feraient envie à n’importe quel Nordiste.
Un projet ambitieux
Plus d’une centaine de personnes au total s’activeront autour du projet, qui a représenté plus de 6 millions d’euros d’investissement. Les Grandes Halles du Vieux-Port attendent entre 500 000 et 1 million de visiteurs par an (la comparaison a été faite en observant les halles de Toulon par exemple), pour un chiffre d’affaires de 10 millions d’euros par an en « fourchette basse ». Mais les fondateurs, qui aiment à se définir comme « épicuriens dans l’âme » tiennent surtout à résumer l’aventure comme « 2 000 m2 dédiés à la bonne chère ».
Quels seront les curieux qui investiront la place ? « On n’a pas fait un lieu pour les touristes : mais quand les Marseillais aiment un lieu, les touristes viennent voir ! », conclut Olympe Zographos avec un fin sourire. Il ne reste plus qu’à remplir la cave à vin, pour accueillir dignement les premiers visiteurs estivaux dans une poignée de jours.
Jeanne RIVIERE