Insatisfait du mercato effectué par l’Olympique de Marseille, Jorge Sampaoli a fait ses adieux officiels, le 1 juillet. Mais Pablo Longoria a vite réagi en nommant sur le banc Igor Tudor. Le technicien de 44 ans a signé pour un contrat de 2 ans.
Après le départ de Jorge Sampaoli le week-end dernier, l’Olympique de Marseille a officialisé l’arrivée de Igor Tudor pour 2 saisons. Une officialisation expresse, qui démontre que Longoria a anticipé le départ du coach argentin. Une prise de fonction expéditive pour se mettre au travail rapidement et déterminer les priorités du mercato tout en se concentrant sur le début de la préparation. On connaît le technicien croate en tant que joueur, mais moins en tant qu’entraîneur. L’occasion de revenir sur son parcours et de se demander si le choix est judicieux !
Qui est-il ?
Igor Tudor est un ancien défenseur central et international croate, qui a notamment porté les couleurs de la Juventus – avec qui il a remporté 2 championnats d’Italie.
il a sillonné l’Europe
Le technicien de 44 ans a été formé au Hajduk Split en tant que joueur et entraîneur par la suite, où il a pris en main toutes les équipes de jeunes avant de diriger les professionnels. Après avoir fait ses armes dans son club de coeur, il a sillonné l’Europe, passant par la Grèce avec le PAOK, la Turquie avec Karabükspor et Galatasaray, l’Italie et l’Udinese; il a ensuite été assistant de Pirlo à la Juventus avant d’atterrir à l’Hellas Vérone. Une saison avec les Gli Scaligeri qui l’a mené à la 9ème place de Serie A avec des matchs assez impressionnants contre de grosses écuries, comme les victoires face à l’AS Roma, 3-2, contre la Lazio, 4-1, et puis surtout un succès face aux Bianconeri, 2-1.
Le Croate avait été engagé par le club italien cette saison pour remplacer au pied levé Eusebio Di Francesco, qui avait été remercié après seulement 4 journées de Serie A. Un contrat d’1 an qu’Igor Tudor n’a pas voulu prolonger, sans doute pour attendre un banc un peu plus prestigieux : un choix qui s’est donc avéré payant.
Comment jouait Hellas Verone de Tudor ?
Cette saison, le club italien a quasiment joué exclusivement dans un système en 3-4-2-1. Il y avait deux zones clés : d’abord le trio offensif avec la paire Caprari et Barak, en pointe, Giovanni Simeone, avec une statistique pour signifier leur importance : lors de cet exercice, les 3 ont franchi la barre des 10 buts alors qu’aucun autre joueur de l’Hellas n’en avait marqué plus que 4. Un trio qui a véritablement flambé cette saison et qui en a fait la 6ème attaque de Serie A.
la caractéristique phare du collectif tudor : la pression
Deuxième zone clé : les flancs. La Gli Scaligeri s’est beaucoup reposée sur les mouvements de ses pistons avec Lazovic à gauche et Faraoni de l’autre côté. Très importants en phase de construction mais aussi pour finir dans les derniers mètres, les pistons n’hésitaient pas à déclencher des frappes.
Son équipe se distinguait dans sa philosophie de jeu de 3 manières principales. La caractéristique phare du collectif de Tudor était la pression. Un pressing acharné avec des joueurs avancés qui ne comptent pas leurs efforts, qui tentent de gratter le plus de ballons possible et qui sont soutenus par un bloc placé très haut.
Le deuxième trait de caractère du jeu d’Hella Verone « version Tudor » : ses phases de possession qui sont assez courtes et très verticales avec un jeu de préparation pas forcément élaboré qui comporte énormément de déchets. Un style très direct, très droit au but mais pas du tout axé sur le contrôle.
une vraie science de contrôle
Cela conduit l’équipe à ne pas avoir beaucoup de compétence en possession ainsi qu’une vraie science du contrôle. Ce collectif avait également du mal à ralentir le tempo d’un match, un tout qui peut expliquer pourquoi l’écurie a lâché de nombreux points alors qu’elle menait au score.
La dernière caractéristique est la difficulté défensive, surtout dans sa surface de réparation. Cette saison, le club italien a encaissé bon nombre de buts très largement évitables, le fruit d’un mauvais alignement, de zones mal occupées, d’un manque de communication… Des errements défensifs qui expliquent cette défense haute, l’équipe préférant être agressive à la perte de balle n’étant pas à l’aise lorsqu’elle défendait bas.Â
A quoi ressemblerait l’OM version Tudor ?
Si l’on calque le système de jeu de l’Hellas Verone en 3-4-2-1, cela pourrait donner un trio offensif composé de Payet, Gerson et Milik en pointe. Un trident qui fait resurgir une première question : est-ce que Milik et Payet peuvent fournir l’intensité sans ballon que fournissait le trio de l’Hellas ? Un gros point noir puisque si le club a choisi Tudor c’est pour presser. Il faut que l’OM soit capable de presser dans des zones avancées.
la question des blocs bas
La deuxième question est sur les côtés, qui sont les zones les moins fournies de l’effectif phocéen. Igor Tudor a l’habitude de faire jouer des pistons inversés, il ne serait donc pas impossible de voir Lirola à gauche par exemple. Under viendrait s’installer côté droit et pourrait rentrer dans l’axe sur son pied gauche. Reste à savoir qui amènerait la largeur et viendrait dédoubler sur la droite du Turc. Il y a forcément plusieurs interrogations même si celles du pressing et de l’animation sur les côtés semblent être les plus importantes.
Enfin une autre zone d’ombre doit être éclaircie, celle des blocs bas : Tudor n’a jamais été réellement confronté à cela et il faudra apporter rapidement des réponses.
Bon ou mauvais choix ?
La première chose qui saute aux yeux quand on se penche sur le parcours du technicien, c’est son absence d’expérience au plus haut niveau ainsi que son manque de stabilité. Il n’a par exemple jamais disputé une rencontre de Ligue des Champions, ce qui montre que l’OM fait forcément un saut dans l’inconnu avec Tudor : ce qui n’est pas le plus rassurant.
Quand on regarde ce qui a été produit par l’Hellas cette saison, une grande partie de la réussite de l’équipe dépend de la qualité individuelle de son trio offensif.
rendre l’om plus séduisant
Pablo Longoria a déclaré en conférence de presse qu’il voulait franchir un cap en termes d’identité de jeu, on peut y voir un souhait de rendre l’OM plus tranchant, plus séduisant. On l’a vu avec Sampaoli, certains matchs étaient assez ennuyeux la saison dernière. Il y a une volonté de franchir une étape là -dessus mais le profil de Tudor pose question. Le Croate a t-il le bagage tactique pour être celui qui opère ce changement ? Rien n’est moins sûr.
Cependant, le technicien apportera de la stabilité, quelque chose qui a cruellement manqué sous l’ère Sampaoli et qui permettra de construire plus de repères. Igor Tudor connaît également bien les contextes méditerranéens « chauds » (PAOK, Galatasaray), et Marseille est dans la lignée de son parcours avec un gros tempérament qui colle parfaitement avec Vélodrome. Sa philosophie de jeu avec un pressing haut et constant rappelle d’ailleurs celle d’un certain Marcelo Bielsa et pourrait bien fonctionner.
la sauce va-t-elle prendre ?
Pour que la sauce prenne entre le club et Igor Tudor, il faudra surtout des garanties sur l’effectif. Celui-ci doit être plus vaste afin de pouvoir enchaîner les matchs tous les 3 jours. Le groupe doit être renforcé également qualitativement avec des zones à consolider qui sont fondamentales dans le système de Tudor comme les côtés.
En bref, le choix du coach croate est assez surprenant sur le papier et paraît risqué, mais Longoria nous a souvent surpris depuis son arrivée à l’Olympique de Marseille, en février dernier.Â
Cyriane VIALA