Jean d’Orléans, 57 ans, Comte de Paris, fils de Henri d’Orléans et de Marie-Thérèse de Wurtemberg, duchesse de Montpensier, prétendant au trône de France sous le titre de « Jean IV », était à Marseille ces derniers jours à l’invitation de Jean Gugliotta, président de la fédération royaliste de Provence et des jeunes de l’Action française de Provence.
Le Comte de Paris, duc de France, a fait une halte à Gap dans les Hautes-Alpes à l’occasion de la Saint-Georges pour saluer le quatrième régiment de chasseurs, une unité de cavalerie désormais rattachée à la brigade de montagne, et il en a profité pour faire un crochet par Marseille où il compte de nombreux amis royalistes.
Ancien élève de l’école de cavalerie de Saumur, affecté comme commandant d’un peloton de chars de combat AMX au septième régiment de chasseurs d’Arras et colonel de réserve depuis 2015, Jean d’Orléans, père de cinq enfants, est le parrain de ce régiment de chasseurs de Gap. Il a bien voulu répondre, sans le moindre faux-semblant, aux questions du « Méridional » au cours d’un entretien qui s’est déroulé dans un appartement de la rue Jean Mermoz à Marseille.
Le Méridional : Monseigneur, pourquoi avez-vous quitté votre domaine de Dreux avec votre famille pour vous installer dans le village de Montréal dans l’Aude ?
Jean d’Orléans : Nous avons quitté Dreux pour mieux défendre les intérêts de la famille royale concernant la chapelle royale de Dreux, le château d’Amboise, le château Beaumont-L ’Archambault et un immeuble de la rue Miromesnil à Paris. Ces biens sont administrés en notre nom par la fondation Saint-Louis et je n’ai pas voulu que nous subissions les retombées immédiates de l’action en justice en cours visant à récupérer nos biens afin de les gérer nous-mêmes. La fondation n’a manifestement pas rempli l’objet social pour lequel elle avait été instituée. J’estime que le chef de cette fondation est le garant d’une bonne gestion et qu’il doit respecter les obligations prévues dans les statuts.
L.M : Comment avez-vous vécu les récentes élections présidentielles ?
J. d’O : Je les ai vécues avec un sentiment de régression lié au fait que les Français ne sont pas suffisamment écoutés par nos gouvernants. De nombreux compatriotes éprouvent un sentiment d’abandon, en particulier dans la France périphérique et vous observerez que le vote contestataire a été largement majoritaire dans toutes ses composantes. Dans cette France triplement fracturée, l’idée royale peut faire son chemin. Les rois et reines permettent d’amortir le choc quand ça va mal et ils accélèrent une bonne dynamique quand ça va bien. La royauté permettrait en effet de réincarner le pouvoir en France et de le rapprocher de la population. Vous observerez que des royautés telles que celles du Danemark, de l’Espagne ou de la Grande-Bretagne sont aussi des modèles de démocratie et que les rois ou reines de ces grandes nations ne se permettraient jamais d’user de locutions triviales, telles que celle d’emmerder les Français par exemple.
L.M : Est-ce à dire que vous ne pouvez pas supporter le président de la République ?
J. d’O : Pas du tout. J’ai rencontré à deux reprises le président Macron, une fois chez Stéphane Bern au sujet de la préservation du patrimoine français, une seconde fois à ma demande pour sceller la réconciliation franco-italienne à Amboise où est enterré l’immense artiste Léonard de Vinci. Le président de la République italienne Sergio Mattarella a également été invité à célébrer en 2019 le cinquième centenaire de la mort de De Vinci décédé en 1519.
L.M : Avez-vous eu l’occasion de lui communiquer votre philosophie humaniste de l’exercice du pouvoir ?
J. d’O : Nos conversations ont été cordiales et j’ai également profité de la présence de Gérard Larcher président du Sénat avec lequel je chasse régulièrement dans la forêt de Rambouillet. J’ai dit au président que le souhait majeur de la famille royale était que la France retrouve son destin de pays libre, c’est-à-dire sa souveraineté, et qu’elle redevienne un pays indépendant et fort. Je lui ai également confié que la classe politique française devait impérativement redescendre sur terre et se reconnecter avec tous les citoyens. Je lui ai fait observer que la gestion du confinement avait constitué une atteinte forte aux libertés individuelles et aux libertés publiques. Enfin, je lui ai recommandé d’épargner à la France une « oligarchisation » du pouvoir entre les mains de quelques-uns car la politique ne doit pas être un business.
L.M : Qu’est-ce qui va mal en France à votre avis ?
J. d’O : Il faut tout reprendre. L’éducation, par exemple, il faut savoir si on enseigne ou si on se contente d’éduquer. On a oublié me semble-t-il le premier terme de l’alternative. Il faut rétablir une justice humaniste et rendre ses titres de noblesse au travail. Je pense aussi que rien ne pourra se faire sur le long terme si l’on ne réhabilite pas l’autorité dans tous les domaines. Je constate que celui qui fait des discours attrayants durant la campagne électorale n’a aucun moyen ensuite de mettre en œuvre les mesures qu’il préconise. D’où la défiance actuelle des citoyens à l’égard de la classe politique. Il me paraît opportun aussi d’accorder davantage de pouvoirs aux élus locaux qui sont par définition plus proches des gens et mieux à même de les satisfaire.
L.M : Le pouvoir républicain est-il condamné à terme en France ?
J. d’O : Non. Ce qui est menacé dans notre pays, c’est la cohésion nationale et les socles anciens de la société qui s’effritent et prennent l’eau. Je constate que les présidents de la République n’ont plus les moyens de gouverner et que leurs pouvoirs essentiels ont été délégués à des structures et à des technocrates européens non élus.
L.M : Monseigneur, si vous disparaissez, qui sera votre successeur comme prétendant au trône de France ?
J. d’O : Ce sera mon jeune fils Gaston, âgé de douze ans aujourd’hui. Depuis la mort de mon père Henri en 2019, il est le dauphin de France.
Propos recueillis par José D’ARRIGO, rédacteur en chef du Méridional