Alain Bogé est spécialisé en Géopolitique, Relations Internationales et Commerce International. Il a notamment donné des cours à l’université de Lyon 3, à Lille et en Inde. Il enseigne actuellement à l’université de Prague et à l’European Business School de Paris.
Alors que le conflit entre l’Ukraine et la Russie fait rage, on ne peut s’empêcher de regarder quelques années en arrière : cette région était déjà sujette à des troubles annonciateurs.
EN GÉORGIE
Il y a 10 ans, le 8 août 2008, la Russie envahit la Géorgie pour soutenir les séparatistes pro-russes d’Ossétie du Sud face au gouvernement de Tbilissi dirigé par Mikheil Saakashvili. En cinq jours, les forces de Moscou mettent l’armée géorgienne en déroute et menacent de prendre la capitale. Nicolas Sarkozy, alors président de l’Union européenne, négocie un accord de paix qui aboutit au retrait des troupes russes, mais Moscou reconnaît l’indépendance des régions séparatistes d’Ossétie du sud et d’Abkhazie. Ces deux pays ont aujourd’hui une forte présence militaire sur leur territoire.
Dmitri Medvedev, président lors de la guerre en été 2008, avait justifié la reconnaissance par le Kremlin de l’Ossétie du Sud et de l’Abkhazie comme « la seule mesure possible » afin « de préserver une paix durable et la stabilité dans le Caucase du sud ».
La similitude entre le conflit en Géorgie et la guerre en Ukraine paraît évidente : le premier avait trouvé sa source dans la volonté de M. Saakashvili d’adhérer à l’OTAN, inacceptable pour la Russie ; celle-ci avait volé au secours des deux régions séparatistes, « opprimées » par la Géorgie. Aujourd’hui, lesdites régions sont des satellites de la Russie. Cela aurait pu servir de leçons aux Occidentaux quant à la stratégie de la Russie. Cela n’a pas été le cas.
UKRAINE, ACTE 1
L’élection du président réformateur pro-occidental Viktor Iouchtchenko (2005-2010) marque le début du rapprochement de Kiev avec l’Union européenne et l’OTAN.
En novembre 2013, le régime autoritaire de Viktor Ianoukovitch décide de ne pas signer un accord d’association avec l’Union européenne au profit d’un accord avec la Russie.
Une décision qui provoque des manifestations massives sur la place de l’Indépendance (Maïdan) à Kiev, où sont réunis entre 200 000 et 500 000 manifestants pro-européens qui réclament la fin du pouvoir autoritaire de Ianoukovitch. Cette manifestation est réprimée dans le sang par le régime en place, et entraîne la fuite du président pro-russe Viktor Ianoukovytch le 22 février 2014.
Vladimir Poutine profite des circonstances pour, d’abord, occuper la Crimée puis, après un référendum « fabriqué » où le rattachement de la presqu’île est accepté à 96%, inclure la Crimée dans le territoire russe. Parallèlement, des combats éclatent dans les provinces de Donetsk et de Louhansk, dans le Donbass ukrainien, qui s’autoproclament «républiques populaires» après des référendums jugés eux aussi illégaux et avec le soutien de Moscou.
Le 5 septembre 2014, les accords de Minsk I sont signés par les représentants de l’Ukraine, de la Russie, de la République populaire de Donetsk (DNR) et de la République populaire de Lougansk (LNR) pour mettre fin à la guerre en Ukraine orientale, et mettre en œuvre un cessez-le-feu immédiat. Ces accords ne seront pas respectés.
Le 12 février 2015, les accords de Minsk II sont signés selon le Format Normandie (Hollande-Merkel-Porochenko-Poutine avec des représentants des rebelles) et mettent en place un nouveau cessez-le-feu. Ce cessez-le-feu ne sera pas non plus respecté, les Ukrainiens arguant qu’ils ont signé sous la menace russe.