La start-up qui promet – Agrove (Aix) présente sa stratégie de végétalisation durable au CES de Las Vegas

© Agrove

Le CES (Consumer Electronique Show), grand rendez-vous annuel de l’innovation high-tech et des start-ups à Las Vegas, a ouvert ses portes le 5 janvier. Parmi les quelque 130 entreprises françaises présentes à Las Vegas (la France reste d’ailleurs le deuxième pays le plus représenté après les Etats-Unis), une vingtaine viennent du territoire provençal. Agrove est l’une de ces pépites. Ses mots d’ordre : végétaliser les villes de façon durable, grâce à l’innovation.

> A voir aussi : La start-up qui promet – Un « wine truck » pour les villages de Provence

« D’où vient le nom Agrove ? Sans doute du mélange entre « agriculture Â» et « mangrove Â», vous savez, l’écosystème de marais maritime Â», nous explique avec un sourire Céline Picot, responsable de projets et marketing RSE de cette jeune pousse (au sens figuré). On a d’emblée envie d’en savoir plus sur cette start-up créée en 2019, qui a passé méthodiquement les étapes de sa construction, jusqu’à décrocher un « CES Innovation Award Â» dans la catégorie « Smart City Â».

Le choc de la ville

Lorsque Quentin Rousselot arrive en ville pour faire ses études d’ingénieur, c’est un changement complet de paysage. Pour ce fils d’agriculteur habitué à déguster de bons produits au quotidien, les légumes sont fades, et les coins de verdure sont rares ! Après quelques tentatives de jardinage sur son balcon, il se rend à l’évidence : il manque de place, de temps et de connaissances assez précises sur le climat pour que ses essais soient couronnés de succès. Qu’à cela ne tienne ! La perspective de prendre à bras le corps la difficulté ne lui déplaît pas. Il cherche à développer une solution qui allie agriculture et technologie.

© Agrove

Un tas de problèmes à contourner

« On a souvent en tête l’agriculture périurbaine, qui constitue une ceinture de sécurité alimentaire autour des villes, souligne Céline Picot ; mais en ville, se lancer dans la culture, même modeste, n’a rien d’évident. Â» Les difficultés ne manquent pas, au premier chef, la place ; mais aussi l’entretien, et tout simplement, les méthodes. C’est ce que constatent Céline Picot et ses collègues : « En discutant avec des associations et des collectivités, on s’est aperçu que les citoyens se décourageaient car ils manquaient de connaissances. Â»

La technologie pour support

L’équipe d’Agrove rumine tous ces éléments et monte patiemment le projet pendant plusieurs mois. Concrètement, la start-up propose (aux professionnels uniquement, pour le moment) des parcelles de culture verticales. Avec 2m2 d’emprise au sol, on a 6m2 de culture. Les matériaux sont éco-conçus ou recyclés, et les filtres qui supportent les cultures sont en lin ou en chanvre ; ce matériau naturel (cultivé en Normandie), résistant au froid et au gel permet aussi à la plante de respirer et est très peu consommateur d’eau.

> A voir aussi : La start-up qui promet – Les Maronneuses, des cosmétiques naturels, beaux et provençaux

Mais ce n’est pas tout, et c’est là que la technologie entre en scène. Les parcelles d’Agrove sont équipées de capteurs climatiques ; ces derniers analysent la température, le taux d’humidité du sol, de l’air… en fonction du micro-climat. Oui, on parle bien de micro-climat ! Car cela n’a rien à voir de cultiver des plantes au rez-de-chaussée ou au sixième étage d’un immeuble.

© Agrove

Où sont collectées toutes ces données ? Sur des applications (pour les professionnels et pour les citoyens) qui mettent en place un calendrier des tâches et une certaine automatisation. La plante est par exemple arrosée en fonction de ses besoins précis (au lieu d’être noyée sous les arrosoirs…), grâce à un système autonome d’énergie solaire. « Cela permet une économie d’eau allant jusqu’à 70% par rapport à un arrosage classique Â», renchérit la responsable de projets.

Le citoyen au cœur de la démarche

La start-up aixoise propose son projet aux collectivités, entreprises et bailleurs sociaux. Mais le but du système d’Agrove, c’est bien que la culture s’adresse in fine au citoyen lui-même (un axe plus marqué que dans la concurrence). Si l’application professionnelle permet d’intervenir en cas de problème, ce sont les gens qui ont « les mains dans la terre Â», et qui découvrent ou redécouvrent l’agriculture à petite échelle. C’est aussi une occasion de rencontre entre collègues ou habitants, et pourquoi pas, de troc de récoltes !

L’équipe fondatrice d’Agrove se structure peu à peu. Rassemblant aujourd’hui six personnes, et en plein processus de levée de fonds, elle cherche à s’étoffer dans les prochains mois. A Marseille, elle est en train de développer un projet d’envergure à L’Epopée village (14ème arrondissement), grâce au plan France Relance : au printemps, ses jardins partagés accueilleront les habitants du quartier Sainte-Marthe.

> A voir aussi : La start-up qui promet – My City Memory, du paillasson à l’art de vivre

Si la start-up conserve son attachement à la Région Sud (la gare SNCF d’Aix a ainsi accueilli les premières expériences d’Agrove, et d’autres partenaires du territoire lui ont également fait confiance), elle vise un développement à plus grande échelle. En alliant intelligemment agriculture et technologie, Agrove démontre sa capacité à transformer « durablement Â» l’aspect des villes. Son ambition sur le plus long terme ? Analyser l’impact environnemental positif de ces petits poumons verts.

Raphaëlle PAOLI