Arte – « La grotte Cosquer, un chef-d’œuvre en péril »

© Arte / Gedeon Programmes

« Cosquer Méditerranée » ouvre ses portes au public ce samedi 4 juin. Abritant la restitution de la grotte préhistorique exceptionnelle découverte il y a trente ans par le plongeur Henri Cosquer, elle veut rendre dans les plus infimes détails ce joyau d’art pariétal menacé par la montée des eaux. Pour ceux qui veulent préparer leur visite – ou qui n’auront pas la possibilité de se rendre à Marseille, Arte consacre un documentaire passionnant qui mêle prises de vues réelles, images de synthèse spectaculaires et animations.

Une histoire qui fascine : pendant des milliers d’années, la mer a jalousement gardé cet inestimable trésor : ce que l’on a nommé « la grotte Cosquer » est non seulement l’une des plus importantes grottes ornées d’Europe, mais l’une des seules du pourtour méditerranéen à avoir survécu à la dernière période glacière. Pourquoi ? Le mystère reste entier.

Henri Cosquer au moment de la découverte de la grotte dans la calanque de la Triperie au Cap Morgiou le 3 septembre 1991 © Arte / Gedeon Programmes

Un double virtuel

Une bonne partie de la grotte (les deux-tiers) a déjà été engloutie par les eaux. A défaut de pouvoir stopper ce phénomène environnemental, il s’agit de conserver un maximum de détails avant la disparition complète des peintures murales. C’est avec ce sentiment d’urgence que le ministère de la Culture a choisi de numériser et reproduire la cavité au sein de « Cosquer Méditerranée », véritable double virtuel.

Peintures pariétales : mains humaines peintes sur la paroi © Arte / Gedeon Programmes

Sur le terrain, le travail continue

Le travail sur le terrain ne cesse pas pour autant. Une nouvelle mission scientifique de l’université d’Aix-Marseille rassemble les spécialistes pour soutirer à la grotte ses secrets. Géomorphologues, archéologues, ethnologues et spécialistes de l’art pariétal unissent leurs forces pour étudier cet incroyable patrimoine. Comment la grotte est-elle restée hors d’eau pendant des siècles ? À quoi ressemblaient les calanques à l’époque glaciaire ? Avec quels outils et techniques ont été réalisés les chefs-d’œuvre qui ornent les parois de la cavité ? À quelles sociétés appartenaient les hommes qui l’ont fréquentée ? Comme le souligne Luc Vanrell, plongeur sous-marin et archéologue, « la menace de [l’]engloutissement [de la grotte Cosquer] a donné un caractère d’urgence à l’archéologie ».

Fabrication d’un facsimilé de la grotte qui sera présenté au public dans la Villa Méditerranée à Marseille © Arte / Gedeon Programmes

Parois exceptionnelles…

On reconnaît dans cette grotte les techniques utilisées à différentes périodes préhistoriques : pochoirs, détourages, gravures, peintures… L’un des mystères qui mérite pourtant encore d’être étudié est le fait que ces hommes ont prélevé une quantité importante de matière sur les parois même de la grotte.

…mais aussi témoignage historique

La grotte – d’autant plus de par sa rareté – constitue également un témoignage historique essentiel : on sait que sa fréquentation la plus ancienne remonte à environ 33 000 ans. « Le site permet d’appréhender des surfaces disparues, dont une plaine côtière très peuplée, où pâturaient des troupeaux d’herbivores, explique Luc Vanrell.  La grotte elle- même a été engloutie aux deux tiers. La longue période de sa fréquentation témoigne, elle, de la relative sédentarisation de populations de chasseurs-cueilleurs, collecteurs de coquillages. Ils survivaient au climat rigoureux grâce à des biotopes favorables et aux ressources alimentaires fournies par la riche faune terrestre et marine représentée sur les parois de la grotte : grands mammifères, chevaux, bouquetins, phoques, pingouins… Le spectateur s’engouffre volontiers à la suite des scientifiques.

Jeanne RIVIERE

« La grotte Cosquer, un chef-d’œuvre en sursis », sur arte.tv du 4 juin au 23 août 2022, et sur Arte le 25 juin à 22h20.