Renaud Muselier : « J’ai grandi avec des Arméniens »

Renaud Muselier © DR

L’Arménie et le monde arménien sont plus que jamais au cœur des préoccupations. Le Méridional, dans la continuité de ses précédents articles sur le sujet, a tenu à interroger Renaud Muselier, président de la Région sud, sur ses relations avec la communauté des Français d’origine arménienne, si importante sur notre territoire.

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Renaud Muselier, quelles sont vos relations avec la communauté d’origine arménienne, importante en Région sud ?

Mes relations avec les Français d’origine arménienne sont historiques. Toute ma vie j’ai vécu avec des Arméniens, à l’école, au lycée, à la fac et dans mon immeuble. J’étais à l’école avec certains, on habitait dans un immeuble où vivaient les Melian, les Tcherpachian, les Melkonian, les Davichian, et plus tard à la faculté … j’ai donc grandi avec des Arméniens. Je connais parfaitement cette génération. Et ce qu’ils ont vécu après la guerre.

Sur le plan politique, plusieurs choses importantes. Quand j’étais élu jeune député RPR, je me suis exprimé au nom du groupe RPR avec Patrick Devejian pour demander la reconnaissance du génocide des Arméniens au Parlement de la République. J’ai été désigné par mon groupe parce que je suis Marseillais, parce que j’ai grandi avec des Arméniens. Patrick était le porteur national, et j’étais à ses côtés.

Au niveau local, j’ai toujours été très proche de la communauté, à tel point d’ailleurs que j’ai posé la première pierre de l’école Hamaskaïne à Marseille. Cela montre bien qu’au-delà de ma vie de citoyen marseillais, au-delà de mon engagement politique national, et au-delà de mon engagement politique local, j’ai toujours été d’une proximité sans faille avec l’Arménie.

Parallèlement à ça, comme j’étais secrétaire d’Etat à cette époque-là [en 2006] auprès de Jacques Chirac, j’étais parti à Erevan avec M. Aznavour et le président, pour organiser l’année de l’Arménie en France, puis l’année de la France en Arménie, Compte tenu des travaux que j’avais menés avec Aznavour pour mon pays la France et pour l’Arménie, on m’a nommé docteur honoris causa de la faculté de médecine de Erevan. Voilà des preuves tangibles de mes liens très forts avec les Arméniens et l’Arménie.

Il y a quelques jours, M. Mariani a réitéré ses propos soutenant l’action de l’Azerbaïdjan. Votre réaction ?

C’est la dérive permanente de Thierry Mariani vers les dictateurs et les dictatures. Il se retrouve toujours en position opposée à la mienne, finalement. Quand j’étais aux Nations-Unies avec Jacques Chirac et Dominique de Villepain pour lutter contre la décision unilatérale des Américains d’entrer dans la guerre d’Irak, lui était chez Saddam Hussein.

Cette dérive politique se manifeste maintenant. Jusqu’au bout, puisqu’elle a été lente et récurrente ; mais aujourd’hui, Thierry Mariani est un des membres de l’Association des Amis de l’Azerbaïdjan. Il l’a manifesté plusieurs fois, il est très proche de la famille Aliyev ; on l’a vu dans le documentaire de Cash Investigation [de 2015] où l’on comprend bien que c’est un des opérateurs de l’influence azerbaïdjanaise au cœur de l’Europe et au cœur de la France. Par conséquent, il ne peut pas condamner l’Azerbaïdjan. Il est un ami du président Aliyev. Il le soutient quand il fait sa démonstration ignoble, lorsqu’il marche au milieu de sa galerie de trophées, c’est-à-dire les casques de ces pauvres Arméniens qui ont péri dans le conflit.

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Le 20 mai, alors que même son groupe au Parlement européen a voté pour la résolution demandant la libération des prisonniers arméniens, il s’est absenté exprès du Parlement pour ne pas avoir à voter. Il va donc jusqu’au bout de sa logique. Il est pour les dictateurs, il est pour Aliyev, il est pour l’Azerbaïdjan, et il soutient l’Azerbaïdjan quand celui-ci massacre les Arméniens, avec des armes de guerre qui ne sont pas reconnues dans le cadre des conflits internationaux. Donc il a choisi son camp. Je suis dans le camp d’en face.

Propos recueillis par Francis PAPAZIAN